Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
Vom Netzwerk:
été analysée et qu’elle n’en contenait aucun. Quand on nous parle d’histoplasmose, mycose mortelle décelée dans la fiente des chauves-souris, nous devons nous demander d’abord comment cette maladie aurait pu frapper des hommes et des femmes n’ayant jamais pénétré dans la tombe. Nous devons savoir qu’il n’existait pas la moindre chauve-souris dans la tombe de Tout Ankh Amon, hermétiquement close depuis des millénaires.
    Plus que d’une prétendue malédiction, préoccupons-nous plutôt de la dépouille de Tout Ankh Amon. J’avoue que, visitant le musée du Caire et découvrant la salle où, en rangs serrés, les pharaons sont exposés dans des vitrines à la curiosité de visiteurs non motivés, dont les plaisanteries stupides sont plus habituelles que le respect dû aux morts – à tous les morts –, j’ai ressenti un malaise qui s’est répété chaque fois que je me suis rendu de nouveau dans cette salle  (37) .
    Ces hommes tenaient essentiellement à ce qu’une paix éternelle entourât leurs tombeaux. Les voilà, après des millénaires, exposés à une curiosité goguenarde, du moins à l’indifférence.
    Je me rappelais l’indignation de l’écrivain anglais Haggard, lequel conseillait au gouvernement égyptien de « photographier, mesurer, examiner ou modeler en cire les restes des pharaons ». Après quoi, on les déposerait – tous – dans une chambre de la Grande Pyramide dont on scellerait l’ouverture avec du béton, afin que nul n’offensât plus le souvenir de ces souverains disparus.
    Une consolation : la momie de Tout Ankh Amon a été laissée en place. Mais – soyons lucides – c’est probablement parce qu’elle était en mauvais état.

XII

Tragédie au pôle
    25 mai 1928
    La « tente rouge ». Elle se dressait, quasi dérisoire, au milieu du désert de glace. Aussi loin que l’on pouvait porter le regard, ce n’était que blancheur infinie, chaos de blocs gelés. Surtout que l’on n’imagine point une étendue totalement solide. Le pack, semé de flaques, était fissuré par d’innombrables crevasses au fond desquelles, dans l’eau glacée, naissaient, glissaient, s’entrechoquaient des icebergs de toute taille.
    Dans cette immensité, la petite tente – 2,50 m de long et autant de large – avait été dressée sur une plaque gelée d’une cinquantaine de mètres carrés. Alentour, des débris épars salissaient la glace. Près d’une paroi, quelques caisses en mauvais état semblaient chercher protection.
    Rouge, la tente ?
    Au vrai, les parois de teinte gris-bleuté avaient été semées de zébrures et de taches rouges par les neuf hommes qui vivaient dans cet abri prévu pour quatre personnes. Sans cela l’avion tant espéré qui, un jour peut-être, les découvrirait, n’aurait rien pu distinguer dans la monotonie glaciaire.
    Neuf hommes, oui. Neuf hommes qui survivaient, attendaient et chaque jour glissaient un peu plus vers le désespoir. Naufragés du ciel, ils avaient connu un privilège unique : à bord du dirigeable Italia , construit et piloté par le général Umberto Nobile, ils avaient survolé le pôle Nord. Au retour, l’ Italia s’était écrasé là, dans les glaces. Des débris de la cabine on avait tiré de quoi ne pas mourir : la tente, d’abord, trésor inestimable, un poste émetteur de radio, des aliments pour quelques semaines.
    La catastrophe de l’ Italia représente en soi une tragédie. Ce qui va suivre sera pire. Des hommes vont périr : ex-passagers de l’ Italia et d’autres qui donneront leur vie pour les secourir.
    Le chef de l’expédition, le général Umberto Nobile, sera sauvé. Le moment viendra où il regrettera de n’être pas mort sur la banquise. Ce que l’on va jeter en pâture à des millions d’hommes et de femmes, ce sera son honneur. Le monde comme tribunal : voilà ce qui attendra Umberto Nobile.
    Paradoxalement, le naufrage de l’ Italia sera presque oublié. Ce qui surgira au premier plan de l’actualité sera l’affaire Nobile.
    Pour son malheur.
     
    « Je suis né en 1885, en plein hiver, à Lavro, riante petite ville qui se dresse autour d’un vieux château princier sur les collines vertes de l’Irpinia, dans le voisinage du Vésuve. »
    Ainsi Umberto Nobile commence-t-il le récit de sa propre existence. Il ajoute que, lors de sa naissance, un incendie a éclaté dans la maison de ses parents. Sa mère et lui ont dû être transportés dans la rue

Weitere Kostenlose Bücher