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C'était le XXe siècle T.1

C'était le XXe siècle T.1

Titel: C'était le XXe siècle T.1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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l’expression de sa joie devant l’échec de l’attentat.
    Il ajoute encore, en serbo-croate, une phrase qu’il a apprise par cœur :
    — Je vous prie de transmettre mes vœux les plus sincères à la population de cette belle capitale, et je vous assure de mon inaltérable bienveillance.
    Un peu plus tard, l’archiduc demandera à Potiorek :
    — Pensez-vous qu’il y aura d’autres attentats contre moi ?
    Le gouverneur se récrie :
    — Tout danger est désormais passé !
    Cependant, il suggère de modifier l’itinéraire annoncé. Le programme de la visite officielle prévoit que l’archiduc se rendra au musée où l’attendent des membres du gouvernement. Pour cela, on doit emprunter la rue François-Joseph, particulièrement étroite. Potiorek préconise de suivre le même parcours qu’à l’arrivée, le long du quai Appel qui doit être maintenant désert. On éliminera ainsi tout péril.
    L’archiduc acquiesce, exprimant seulement son désir d’aller saluer les officiers blessés à l’hôpital militaire.
     
    Il est 10 h 45 lorsque le cortège quitte l’hôtel de ville. Comme à l’aller, l’archiduc et sa femme montent dans la troisième voiture. Le lieutenant-colonel Harrach se tient debout sur le marchepied, du côté du fleuve.
    Les voitures roulent à toute allure sur le quai Appel. Le chauffeur de l’archiduc constate que, contrairement à ce qui lui a été indiqué, les deux premières voitures tournent à droite dans la rue François-Joseph. Pourquoi cette fausse manœuvre ? Est-elle le résultat d’une erreur ? Faut-il penser qu’elle a été délibérée ? Personne ne l’a jamais su. Le chauffeur de l’archiduc va suivre le mouvement lorsque Potiorek crie :
    — Arrêtez ! Vous prenez la mauvaise direction ! Nous devons longer le quai Appel !
    Brutalement, le chauffeur freine. Il arrête la voiture en face d’une boucherie, près du trottoir où une petite foule est encore amassée. Or, dans cette foule, il y a Princip. Il s’avance. Il dira qu’il a d’abord eu l’intention de lancer sa bombe. Au milieu de cette foule, comment la sortir de sa poche sans être vu ? C’est donc son revolver qu’il brandit. Il le braque sur la voiture. Il ne vise même pas. Il confiera qu’au moment de tirer il a détourné la tête ! Un policier a vu son geste, il s’élance. Un coup de pied dans le genou le déséquilibre : un conjuré vient d’intervenir. Princip appuie sur la détente.
    Affolé, Potiorek voit l’archiduc et sa femme chanceler sur leur siège. Le gouverneur crie au chauffeur de remettre en marche. La voiture roule à toute vitesse. À l’aide de son mouchoir, le lieutenant-colonel Harrach essuie le sang qui coule des lèvres de l’archiduc. La duchesse s’écrie :
    — Pour l’amour de Dieu, qu’est-ce qui est arrivé ?
    Puis elle glisse sur son siège, la tête sur les genoux de l’archiduc. Harrach entend François-Ferdinand murmurer :
    — Soferl, Soferl, ne meurs pas ! Vis pour mes enfants !
    Harrach, bouleversé, demande à l’archiduc s’il souffre :
    — Ce n’est rien.
    Récit de Harrach  : « Son visage était légèrement distordu, il répéta six ou sept fois, mais en perdant de plus en plus conscience et d’une voix de plus en plus éteinte : "Ce n’est rien." Il y eut ensuite une courte pause, suivie d’un gargouillis convulsif de la gorge où le sang affluait. Cela cessa lorsque nous arrivâmes à la résidence du gouverneur. Les deux corps inanimés furent transportés à l’intérieur du palais où le constat de décès fut bientôt établi. »
    La duchesse a été frappée d’une balle qui, traversant la paroi de la voiture, a pénétré dans son côté droit. Quant à l’archiduc, la balle a percé le col de sa capote, tranché la veine jugulaire, pour aller se loger dans la colonne vertébrale.
     
    Et Princip ? La foule furieuse s’est ruée sur lui, l’a rossé, jeté à terre, piétiné. Des policiers l’ont frappé à coups de sabre. Il est blessé – grièvement. Il perd son sang en abondance. Ceux qui l’entourent sont persuadés qu’il ne survivra pas. Ils se trompent.
    Tous les conjurés – sauf un – seront arrêtés. Princip, Chabrinovitch et Grabez n’ont pas vingt ans. À cause de leur âge, ils ne seront condamnés qu’à vingt années de prison. Cinq de leurs complices, en revanche, sont promis à la pendaison, dont Danilo Ilitch. Plusieurs autres accompliront de

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