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C'était le XXe siècle T.2

C'était le XXe siècle T.2

Titel: C'était le XXe siècle T.2 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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Krajli tueront le roi à Marseille. Si Alexandre leur échappe, Raitch et Pospichil « agiront » à Paris.
    Pour brouiller les pistes, les quatre tueurs sont allés s’acheter des vêtements à la Belle Jardinière, place Clichy. Vlada se trouve très chic dans un costume marron à rayures.
     
    Le soir du 6 octobre, Kvaternik, Vlada et Krajli prennent le train pour Avignon. À l’aube du 7, parvenus à destination, ils gagnent en car Aix-en-Provence où ils descendent à l’hôtel Moderne. Si Kvaternik a demandé une chambre pour lui seul, Krajli et Vlada doivent se contenter d’une chambre à deux lits. Selon la loi, la patronne a tenu à ce qu’ils remplissent leurs fiches. Seuls Kvaternik et Krajli, utilisant leurs faux noms tchécoslovaques, ont obtempéré. Vlada, fiche en main, a joué l’incompréhension totale. Devant l’impossibilité de se faire comprendre, la patronne a renoncé. De toute façon, à l’hôtel Moderne, les fiches ne sont relevées que tous les huit jours.
    Le lendemain, Jean et Maria Vondracek, porteurs des armes qui restent, arrivent à Aix. Kvaternik les distribue à Vlada et Krajli désormais armés jusqu’aux dents.
    Le 8 octobre, Kvaternik, Vlada Kerim et Krajli prennent le train pour Marseille. Kvaternik a soigneusement relevé dans un journal le parcours que doit suivre Alexandre dans la ville. À peine arrivé à la gare Saint-Charles, il va repérer sur les lieux l’itinéraire royal. Pesant les avantages et les inconvénients de chaque position, Kvaternik décide : c’est sur la Canebière, à la hauteur de la place de la Bourse, que les tueurs tenteront le tout pour le tout.
    Le soir, on regagne Aix. Kvaternik adresse à Vlada et Krajli une ultime exhortation :
    — Demain, vous abattrez Alexandre. Demain, la Croatie sera libre.
    Pour sa part, il choisit de quitter Aix. À 22 heures, un taxi le conduit à Avignon où il prendra le train de Paris pour changer à Lyon et passer ensuite en Suisse. Dans les armées secrètes comme dans les autres, on ne trouve pas mauvais que les chefs restent à l’abri.
     
    Le 6 octobre, au petit port yougoslave de Zenika, le roi Alexandre s’apprête à s’embarquer sur le croiseur Dubrovnik , la plus belle unité de la flotte yougoslave. La reine Marie – belle, jeune, sévère, un peu alourdie par trois maternités – l’a accompagné. Ils ont passé la nuit dans un vieux palais qui a appartenu à l’aïeul d’Alexandre, Nicolas de Monténégro. Ensemble, ils sont allés se recueillir dans un couvent voisin. Comment la reine Marie ignorerait-elle l’annonce réitérée par les oustachis de la mort imminente de son mari ? Chaque fois que le roi se déplace, elle ressent le même effroi. Pour conjurer le mauvais sort, ils ont prié et allumé quatre cierges.
    Les voici sur le quai. La houle est forte. La reine, qui souffre de lithiase biliaire, sait que le mal de mer déclenche chez elle d’insupportables crises. Elle décide de prendre le train. Alexandre approuve. On se rejoindra à Dijon.
    Au moment de l’appareillage, Alexandre reçoit à bord du Dubrovnik le chargé d’affaires français, M. Knobel. Celui-ci rayonne d’un optimisme de commande :
    — Vous allez trouver en France quarante millions d’amis !
    — Et peut-être aussi quelques-uns de mes ennemis les plus acharnés…
    Donc, Alexandre n’est pas dupe. Pendant le voyage, on le verra arpenter le pont, allumant gauloise sur gauloise.
    En mer, il va recevoir un message de la reine. Elle supplie Alexandre d’être prudent. Il est vrai que, depuis quelques jours, les avertissements se sont multipliés : en France, le roi court des risques certains. Refermant le message de Marie, il dit pensivement :
    — Braver les attentats, n’est-ce pas notre métier de roi ?
    Au large du détroit de Bonifacio, l’escadre française s’avance pour accueillir le Dubrovnik . Un spectacle magnifique. Le roi calcule qu’il sera à Marseille le 9 octobre, vers 16 heures.
     
    Jusqu’au bout, Louis Barthou s’est posé la question : irait-il à Marseille ? Ce septuagénaire garde toute sa vigueur intellectuelle mais, cette semaine-là, il se sent fatigué : état inhabituel chez un homme aux activités surabondantes, par ailleurs fin lettré, bibliophile et membre de l’Académie française. C’est à Paris qu’auront lieu les entretiens importants. François Piétri, ministre de la Marine, doit également se rendre à Marseille : faut-il vraiment

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