C’était le XXe siècle T.3. La guerre absolue
du 26 août 1945, l’officier SS donne la dimension des chambres destinées au gazage : 4 m x 5 m x 1,90 m, soit 20 m 2 et 38 m 3 . Sans se préoccuper d’effectuer l’opération, il aboutit à un résultat que l’on retrouve dans toutes les autres versions : 25 m 2 et 45 m 3 , erreur qui peut être considérée comme vénielle. Il n’en est pas de même quand il affirme que 6 700 personnes ont été conduites au camp dans 45 wagons, ce qui signifie plus de 148 personnes par wagon, chiffre déjà peu admissible. Si l’on tient compte que, selon lui, 1 450 étaient déjà mortes à l’arrivée, il faudrait admettre un total de 5 250 vivants destinés au gazage et en déduire qu’un petit garçon de trois ou quatre ans, apparemment seul puisque Gerstein ne parle que de lui, aurait distribué des ficelles à 5 250 déportés. Peut-on l’admettre ?
Gerstein affirme avoir vu 700 à 800 personnes entassées dans l’espace de 25 m 2 et dans 45 m 3 . Il suffit que nous mesurions, dans notre propre habitation, une pièce de 5 m sur 5 m pour concevoir l’impossibilité d’un tel entassement. Évoquant les tas de chaussures appartenant aux victimes, Gerstein en estime la hauteur de 30 à 40 m, ce qui correspond à celle d’un immeuble de dix à douze étages. Comment accéder à une telle altitude pour y ajouter des chaussures ?
Qui plus est, les cadavres sont jetés dans des fosses de 100 m x 20 m x 12 m. Or la profondeur de 12 m représente trois à quatre étages. Disposait-on de temps pour les creuser chaque jour ? Qu’aurait-on fait de la terre ? Selon Gerstein, les corps n’auraient été recouverts que d’une couche de 10 cm de sable : ce sont là des conditions favorables au développement d’une épidémie à laquelle les organisateurs se seraient gardés d’exposer les SS et leurs auxiliaires.
Une constante se retrouve dans toutes les « confessions » : le gazage est effectué au moyen du gaz d’échappement obtenu d’un moteur Diesel. Le mot n’a pas été écrit par distraction car il est répété plusieurs fois. Le Diesel, affirmait M. Roques, est un moteur à combustion interne qui dégage peu d’oxyde de carbone (CO), gaz mortel inodore, et beaucoup de gaz carbonique (C0 2 ), gaz asphyxiant qui rend d’abord malade et ne provoque la mort qu’au bout d’un long délai. Est-il plausible que les SS aient choisi un Diesel de préférence à un moteur à explosion ?
À cette époque, M. Roques ne se rangeait pas – ouvertement du moins – au nombre des révisionnistes. Il a tenu à m’exprimer par écrit sa position : « Pour moi, les “confessions” de Gerstein sont un bloc. On ne peut pas y contester beaucoup de choses, admettre qu’il y a de nombreux mensonges, de nombreuses exagérations et, en revanche, retenir ce qui serait l’essentiel, c’est-à-dire tout au plus quelques fragments. On se contenterait, alors, d’un témoignage au rabais, ce qui est indigne de la cause que l’on veut défendre : celle des souffrances réelles de la déportation, que personne ne conteste. »
Un témoignage au rabais ? Une cause à défendre ? En quoi faudrait-il défendre ces innombrables hommes, femmes et enfants qui sont allés à la mort du fait de leur seule appartenance à un groupe ethnique condamné par les théoriciens du III e Reich ? Leur malheur fut si grand que nul aujourd’hui – à part une poignée d’antisémites exacerbés – ne songerait à leur adresser autre chose qu’une pensée de respect et, s’il est croyant, des prières.
À la lumière des archives qui se sont ouvertes et des témoignages que l’on a rassemblés – si difficilement, si douloureusement –, on peut estimer au contraire que ce qui demeure du récit de Gerstein en constitue l’essentiel. La description du gazage auquel il a assisté est parfaitement identique à celle que nous tenons des rares survivants, mais elle est conforme aux souvenirs – non moins rares – des bourreaux qui se sont résignés plus tard à témoigner. Avons-nous le droit d’oublier que le récit de Gerstein est le premier ? Son auteur ne disposait d’aucun document, d’aucune source. Il ne se référait qu’à sa mémoire.
Si l’on se souvient que, de 1942 à 1945, sa santé – physique autant que morale – n’a cessé de se dégrader, on comprend mieux pourquoi, lors de l’effondrement du III e Reich, il s’est porté au-devant des troupes
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