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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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spécialement dressés pour sauter à la gorge de possibles évadés. Des tourelles à tir automatique déclenchées électriquement.
    Le Mur. Son omniprésence se muait très vite en obsession, en cauchemar. Que l’on n’imagine pas seulement une muraille séparant les deux côtés de l’ex-capitale ! Celle-ci existait, et elle était longue de 46 kilomètres, mais toute la zone occidentale de Berlin était isolée du territoire de la RDA par un mur que rien ne différenciait de celui de la ville et qui ne faisait que prolonger le premier. Il mesurait 116 kilomètres. Le Mur, en fait, contournait et ceinturait Berlin-Ouest comme ces remparts que Vauban édifiait jadis autour d’une cité. C’est sur 162 kilomètres que, du haut de leurs miradors, derrière leurs plaques de béton, leurs chevaux de frise, leurs barbelés, veillaient les Vopos.
    L’homme obligé de vivre à Berlin-Ouest s’agitait comme dans une nasse, une souricière, dont il lui était impossible de s’évader. Qu’il marchât vers le nord, vers l’est, vers le sud, vers l’ouest, toujours il se heurtait au Mur et à ses insurmontables interdits. Encore l’Allemand de l’Ouest pouvait-il, muni d’un permis en règle – et à condition de payer vingt-cinq marks – passer une journée en RDA, voire des vacances auprès de sa famille. L’Allemand de l’Est, lui, devait oublier de caresser un tel rêve. Nul espoir pour lui d’entrer jamais dans Berlin-Ouest, paradis tant convoité. N’obtenaient de s’établir en zone occidentale que les citoyens de RDA parvenus à l’âge de la retraite. Les autorités de la RDA ne voyaient aucun inconvénient à ce que celle-ci fut versée aux titulaires par les caisses de la République fédérale allemande.
    À l’image des condamnés de l’enfer de Dante, les Allemands de l’Est pouvaient écrire en lettres de feu : Vous qui voyez le Mur, perdez toute espérance .
    En mars 1961, les pays du pacte de Varsovie ont refusé à Ulbricht le droit de barrer l’accès à Berlin-Ouest. En juin, à sa conférence de presse, « Vieille Barbe à pointe » a déclaré, en martelant ses mots : « Personne n’a l’intention d’ériger un mur. » Le 13 août, le Mur fut édifié.
    Pourquoi ?
     
    Dès le mois de septembre 1944, les Alliés avaient décidé que Berlin, après la victoire dont nul ne voulait douter, deviendrait le centre administratif des zones d’occupation. À l’origine, nul n’ayant pensé à en accorder une à la France, il ne devait en exister que trois. C’est Churchill qui a estimé que les Français avaient mérité leur part du gâteau. Les trois zones sont devenues quatre. Logiquement on a partagé Berlin en quatre « secteurs ». Cette décision, toute théorique, n’a comporté aucune modalité d’application. Robert Murphy, conseiller politique d’Eisenhower, avait seul manifesté ses alarmes en constatant qu’aucune voie d’accès vers Berlin n’était prévue pour les Anglo-Américains. Il s’était agité, adjurant le représentant américain à la commission de délibération, l’ambassadeur Winant, d’obtenir sur ce point essentiel des garanties soviétiques. Ami personnel de Roosevelt et demeuré imprégné de sa pensée, Winant s’y était refusé : selon lui, solliciter de telles garanties eût montré que l’on ne croyait pas à la bonne foi soviétique, doute qui se fut révélé du plus parfait mauvais goût. Il fallait faire confiance à Staline. Plus tard, Murphy écrira : « La décision fatale prise à Londres en septembre 1944 fut une décision personnelle. Elle était fondée sur la thèse américaine, alors trop en vogue, selon laquelle l’amitié personnelle peut déterminer judicieusement la politique d’un État. Les politiciens et les diplomates soviétiques n’avaient jamais adhéré à cette thèse  (108) . »
    Le 11 avril 1945, la I X e année américaine atteignit l’Elbe. Plus que 130 kilomètres, et les Alliés de l’Ouest pourraient entrer dans Berlin. Sur la plupart des fronts, la résistance allemande s’effondrait. Foncer sur Berlin pouvait légitimement être envisagé comme une promenade militaire. Pourtant les Alliés de l’Ouest ne dépassèrent pas l’Elbe. Ainsi en avait décidé le généralissime Eisenhower dans la ligne d’une politique clairement définie par Franklin D. Roosevelt. Depuis 1942, le président des États-Unis avait choisi de jouer avec Staline la carte de la confiance. Pourquoi

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