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C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
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son collaborateur Theodore C. Sorensen. Mais il ne pensait pas que tout était acquis d’avance. Il estimait au contraire que la lutte serait dure  (135) . » Le voyage au Texas – et surtout à Dallas – n’est autre qu’un voyage électoral « à peine déguisé ». Le 9 novembre 1960, le candidat démocrate Kennedy l’a certes emporté au Texas – surtout grâce à la présence à ses côtés du Texan Lyndon Johnson – mais par la faible majorité de 46 233 voix sur 2 311 845 votants. La ville de Dallas s’est prononcée en faveur du républicain Nixon. Au sein même du parti démocrate, les conservateurs sont en majorité depuis quelques années. Quel avenir peut y attendre Kennedy le libéral ? Johnson fait de son mieux pour apaiser les passions. John Connally s’est démis de ses fonctions de secrétaire d’État à la Marine pour se présenter avec succès au poste de gouverneur. De son côté, le sénateur Ralph Yarborough peut être rangé au nombre des amis du président. L’ennui est que Connally et Yarborough se détestent cordialement. Ce qui n’arrange pas les choses. Pour la campagne qui va s’ouvrir, Kennedy compte beaucoup sur l’influence que Johnson pourra exercer « afin qu’on mette fin à cette lutte qui déchire le parti démocrate texan ». Arthur M. Schlesinger, conseiller spécial du président Kennedy et intime de la Maison-Blanche, commente : « En se rendant lui-même au Texas, Kennedy comptait sur son autorité de président pour aider son vice-président à réconcilier les Texans en guerre  (136) . »
    Un instant on s’est demandé si l’on irait à Dallas. Kennedy a tranché : impossible de se rendre au Texas sans visiter Dallas. Il n’a jamais fui les difficultés, ni les périls. À Caracas, Nixon avait été malmené par des émeutiers : Kennedy est allé à Caracas. Délibérément, il a traversé des pays et des villes où dominaient les ennemis des États-Unis. Arrêtant sa voiture, il s’est partout mêlé à la foule.
    Dans son livre Profiles in courage , on trouve cette phrase significative : « Un homme fait ce qu’il doit, en dépit des circonstances personnelles… et des dangers, parce que c’est le principe élémentaire de la morale humaine. » À Dallas sa sécurité ne saurait être garantie ? Donc, il irait à Dallas. « Il fit tout cela, dit Sorensen, parce qu’il devait le faire, et certainement pas dans le but de prouver son courage. »
    Et pourtant !
    Quatre semaines avant la date fixée pour le voyage de Kennedy à Dallas, Adlai Stevenson – éminente personnalité démocrate et adversaire malheureux d’Eisenhower à l’élection présidentielle – s’est rendu dans la capitale texane pour participer à une réunion à l’occasion de la journée des Nations unies. L’extrême droite – « indignée » par les mesures pour l’égalité des races prises par le gouvernement Kennedy – a organisé un meeting de protestation animé par le général Walker, l’un des extrémistes les plus farouches de l’État. Des tracts ont été répandus dans Dallas et sa banlieue, illustrés par deux photographies de Kennedy, de face et de profil, avec ce titre en gros caractères : RECHERCHÉ POUR TRAHISON et un texte commençant ainsi : «  Cet homme est recherché pour s’être rendu coupable du crime de trahison envers les États-Unis . » La suite reprochait à Kennedy – en termes orduriers – son action raciale, mais aussi sa politique de détente mondiale.
    Les partisans du général Walker ont rempli la salle où Stevenson devait parler. Pendant son discours, les hurlements et les injures ont pratiquement fusé sans interruption. Quand Stevenson a regagné sa voiture, il a été bousculé. La foule l’a entouré. Une femme l’a injurié, une autre lui a brisé une pancarte sur la tête, un homme lui a craché au visage. Alors – alors seulement – la police a repoussé la foule. Stevenson s’est tranquillement essuyé la figure et a dit :
    — Est-ce que ce sont des êtres humains ou des bêtes sauvages ?
    Quand Schlesinger, le lendemain, est venu lui transmettre, à Los Angeles, un message d’affectueuse sympathie de la part de Kennedy, Stevenson a commencé par plaisanter sur ce qui s’était passé à Dallas. Puis, redevenu grave :
    — Mais, vous savez, l’atmosphère avait quelque chose d’horrible et d’effrayant. J’ai parlé ensuite avec quelques-uns des personnages importants de

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