C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy
« 1 000 jours » – l’expression devenue célèbre est de Arthur M. Schlesinger Jr – où il exercera le pouvoir présidentiel, Kennedy verra une coalition paradoxale se lever au Congrès : républicains et démocrates du Sud s’allieront pour tenter d’annuler la législation libérale prônée par la Maison-Blanche. L’alliance contre nature retardera les projets de JFK en matière d’aide médicale gratuite aux personnes âgées, d’aide fédérale à l’enseignement et, évidemment, de lutte contre la ségrégation raciale.
Kennedy a dû faire face à un monde au sein duquel la guerre froide a atteint des proportions inconnues jusque-là. S’il n’a pu empêcher la mise en place du mur de Berlin, il a, au moment de l’affaire de Cuba, marqué un point capital dans la réaffirmation de la puissance des États-Unis. Paradoxalement son attitude et celle de Khrouchtchev ont amorcé une politique de détente. La tournée européenne qu’il a entreprise, durant l’été 1963, s’est muée en apothéose. À Berlin, il a affirmé hautement la position de son pays :
— Il y a beaucoup de gens dans le monde qui ne comprennent pas, ou prétendent ne pas comprendre, en quoi consiste le problème qui oppose le monde libre et le monde communiste. Qu’ils viennent à Berlin. Certains disent que le communisme est un régime d’avenir. Qu’ils viennent à Berlin. Il y a aussi en Europe et ailleurs, des gens qui disent qu’on peut travailler avec les communistes. Qu’ils viennent à Berlin… Tous les hommes libres, où qu’ils soient, sont des citoyens de Berlin et c’est pourquoi, en homme libre, je suis fier de dire : « Ich bin ein Berliner . »
Au moment où s’amorce la perspective d’une seconde campagne présidentielle, sa popularité est à son zénith. Il a décidé de visiter chaque État, l’un après l’autre et, avant tout, ceux qu’il est nécessaire de conquérir. Dans le Sud, au Texas et en Arkansas, les sondages indiquent qu’il manquera 6 % des voix pour que des grands électeurs démocrates soient désignés à la prochaine élection présidentielle. Il faut donc convaincre l’Arkansas : il s’y rend en octobre 1963. Vient ensuite, dans la première quinzaine de novembre, le tour de la Floride. Reste à jouer la carte la plus difficile : persuader les Texans.
Le dernier voyage de John F. Kennedy a commencé au milieu de la matinée du jeudi 21 novembre 1963. Ce matin-là, avant le petit déjeuner, le président des États-Unis a « ajusté son corset orthopédique, enfilé les vêtements préparés par son valet de chambre, mis ses souliers dont le gauche avait une talonnette, noué une cravate discrète…, a glissé dans sa poche son portefeuille de cuir noir contenant vingt-six dollars en billets, un permis de conduire du Massachusetts N° 053332 D et une médaille de saint Christophe en or (134) ».
Avec l’habituel laconisme administratif – s’appliquât-il à un président des États-Unis – ce permis de conduire livrait le signalement du titulaire : taille 1,83 m, cheveux châtains (code 4), yeux gris (code 6), date de naissance 29 mai 1917.
Un hélicoptère s’est élevé des pelouses de la Maison-Blanche, emportant le président et Mrs Kennedy vers la base des Forces aériennes Andrews : douze minutes de vol. Le président a accepté que son petit garçon John – on l’appelle John-John et il va avoir trois ans – accompagne jusque-là ses parents. Le petit raffole de ce genre de randonnées. Quand l’hélicoptère s’est posé, ses parents l’ont embrassé. John-John n’avait d’yeux que pour l’avion présidentiel, Air Force One , éblouissant dans le soleil.
— Je veux y aller ! criait-il.
Ses parents lui ont expliqué que ce n’était pas possible et, naturellement, le petit a éclaté en sanglots. Le président l’a embrassé une dernière fois et, suivi de Jackie, s’est dirigé vers le grand avion blanc.
Air Force One a décollé à 11 heures et atterri, à 13 h 30, à San Antonio, première étape de leur voyage au Texas. Quatre arrêts prévus : San Antonio, Houston, Dallas et Austin.
Le périple se prépare depuis cinq mois. Trois hommes en ont choisi les étapes : le président Kennedy, le vice-président Lyndon B. Johnson et John B. Connally, gouverneur du Texas.
En 1964, aura lieu l’élection présidentielle. Kennedy songe à son second mandat. « Il était certain d’être réélu, a dit
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