Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy

Titel: C’était le XXe siècle T.4. De Staline à Kennedy Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Alain Decaux
Vom Netzwerk:
réunion tripartite à Tunis : Algériens, Marocains, Tunisiens. C’est là un pas considérable, surtout si l’on se souvient des entretiens de Rome. Pauvres combattants de l’intérieur qui ne savent même pas jusqu’où les représentants de Guy Mollet sont allés ! Et ils voudraient imposer leurs lois ? Ben Bella décide de passer outre, Khider avec lui. Antérieurement à la réunion de Tunis, Mohammed V exprime le souhait de rencontrer les délégués du FLN. On ira donc à Rabat.
     
    Qui est Mohammed Khider ? En 1956, il a quarante-quatre ans. Parmi les délégués du FLN, il fait figure d’ancêtre. Ses cheveux virent au gris et son visage se creuse de rides profondes. Cet homme du peuple était conducteur de tramways. Très tôt, il a adhéré au PPA. De 1941 à 1943, il a connu la prison. Après la guerre, il a été de ceux qui ont tenté de jouer le jeu parlementaire. Sur les listes présentées par Messali Hadj, il a été élu député en 1946. On l’a donc vu s’asseoir – farouche, quasi muet – sur les bancs de l’Assemblée nationale. Il y avait d’autres députés musulmans algériens à Paris ; l’administration française avait facilité leur élection. Quand Khider les croisait dans les couloirs, il les regardait avec mépris, voire avec haine. Il lui arrivait même, au passage, de les insulter en arabe – à voix basse, mais suffisamment fort pour qu’on l’entende. Un jour – son mandat parlementaire allait prendre fin – il a brusquement quitté Paris. Destination : Le Caire.
    En octobre 1956, Mohammed Khider est président de la délégation du FLN-ALN au Caire. Il a donc priorité sur Ahmed Ben Bella. C’est Khider et non Ben Bella qui a rencontré les envoyés de Guy Mollet à Rome. C’est Khider qui a négocié la rencontre de Tunis à trois .
    Ceci connu, on comprend assez mal pourquoi l’opinion, en octobre 1956, a présenté Ben Bella comme le « chef », voire le « généralissime » du FLN. Souvenons-nous que le colonel Ducournau, entrant chez Pierre Chaussade le 26 octobre au matin, parle de l’avion qui va transporter « Ben Bella et consorts ». Dans les jours suivants, la presse française et étrangère évoquera Ben Bella et ses adjoints, Ben Bella et ses collaborateurs, Ben Bella et les autres. Rien de plus sûr : Ben Bella est la vedette.
    Pourquoi ?
    Ce n’est un secret pour personne, au Caire et ailleurs, que Ben Bella ambitionne d’exercer le premier rôle dans la révolution algérienne mais, devant une ambition qu’il n’a pas su dissimuler, ses propres compagnons ont manifesté une réticence grandissante. Ils se sont refusés à lui confier une tâche qui le distinguât des autres. Paradoxalement, le premier qui ait présenté Ben Bella comme un leader n’est autre que le président Bourguiba. Le 5 août 1956, il a reçu l’indépendantiste Ferhat Abbas et s’est montré extrêmement déçu par l’indécision de celui-ci :
    — Il m’a donné l’impression de ne pas vouloir ou de ne pas pouvoir s’engager. En fait, il semble être un instrument entre les mains du FLN et n’ose pas prendre de positions qui risqueraient d’être désavouées. Cette situation est préoccupante.
    Quelque temps plus tard, Ahmed Ben Bella rencontre Bahi Ladgham, vice-président du Conseil tunisien. Il produit une impression excellente, aussitôt rapportée par Ladgham à Bourguiba qui, le 8 septembre, confie à un collaborateur d’Alain Savary, secrétaire d’État français aux Affaires étrangères marocaines et tunisiennes :
    — Il faut que je voie les autres dirigeants du FLN pour savoir s’ils sont, plus que Ferhat Abbas, en mesure de parler utilement. Ben Bella a fait une très bonne impression à Bahi Ladgham lorsque celui-ci l’a vu. Il s’est exprimé en termes raisonnables. Ladgham m’a dit que Ben Bella serait favorable à un compromis avec la France, qu’il était convaincu que la violence ne permettrait pas au FLN de régler le problème  (45) .
    Formulant cette opinion, Bourguiba ne se doute pas qu’il comble les vœux de Ben Bella. Celui-ci devient tout à coup l’homme fort du FLN. Par voie de conséquence, quand Ben Bella se présentera au Maroc devant Mohammed V et son fils Moulay Hassan, il n’aura pas de mal à leur imposer cette nouvelle image.
    Car la négociation avance et se précise. Le 18 octobre, Ben Bella a quitté Le Caire à destination de Madrid. De la capitale espagnole, il part, le 20

Weitere Kostenlose Bücher