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Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Titel: Christophe Colomb : le voyageur de l'infini Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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un fils.
    — Quel bel idiot j’ai été de ne pas remarquer son état
avant mon départ pour Lisbonne ! Je ne songeais qu’à moi et à mes projets.
    — Idiot, vous ne l’êtes pas toujours. Prénommer votre
fils Ferdinand pour rendre hommage au roi d’Aragon, vous commencez à vous faire
aux usages de la cour. En tous les cas, ces efforts ne sont pas passés
inaperçus. Ils vous ont valu cette convocation.
    Rasséréné, Cristobal écouta attentivement les explications
d’Antonio de Marchena. Depuis bientôt quatre mois, les Chrétiens assiégeaient
Baza, tenue par l’émir Zagal, l’oncle du roi de Grenade, Boabdil. Disposant
d’importantes réserves de vivres, l’émir se sentait à l’abri derrière les
solides murailles de la cité. Mais l’artillerie de Castille avait commencé à
ouvrir quelques brèches dans les remparts, là du moins où ils étaient à portée
des canons manœuvrés par des mercenaires génois. Cristobal constata que la fine
fleur de la noblesse castillane vouait à ses compatriotes une haine encore plus
féroce que celle qu’ils avaient envers les Maures. Ils reprochaient aux
artilleurs d’ôter à la guerre son charme et de remplacer les joutes entre
chevaliers par des sièges sans intérêt. Antonio de Marchena se moquait
ouvertement de leurs affirmations :
    — Ces combats leur tenaient tant à cœur qu’ils en
oubliaient la raison. Au point d’accepter de servir des princes maures et de se
battre contre d’autres Chrétiens pourvu qu’ils aient la possibilité de
guerroyer à leur manière. Ces imbéciles ont fait du Cid Campeador leur héros
alors qu’il n’a en rien contribué à la Reconquista. Ils s’ennuient ici car on
les oblige à rester en arrière et à suivre du regard les milices des paroisses
qui, seules, peuvent monter à l’assaut des murailles. Ces beaux chevaliers sont
réduits à l’inactivité. Enfin, ils pourront toujours contempler demain un beau
spectacle. Un ambassadeur du Soudan de Babylone est arrivé au camp de Leurs
Majestés qui lui donneront audience. Alonso de Quintanilla m’a fait savoir que
la reine Isabelle te recevra ensuite. Nous serons donc bien placés pour savoir
ce que veulent ces maudits païens.
    La tente royale avait été dressée un peu en retrait du camp,
au sommet d’une butte assez large pour permettre à des dizaines de courtisans
d’observer de loin les mouvements des souverains. L’ambassadeur maure avait
gravi à pied la pente, accompagné de sa suite, quelques guerriers au visage
farouche et des esclaves noirs porteurs de coffrets richement ouvragés. Il
avait jeté un regard dédaigneux en direction des prêtres et moines rassemblés
autour du Grand Inquisiteur comme s’il était étonné de les trouver là. C’est en
excellent castillan qu’il s’adressa aux monarques, soulignant qu’il était natif
de Cordoue. Il avait quitté cette ville pour s’installer au Caire et y devenir
l’un des principaux conseillers du sultan mamelouk. Celui-ci adressait mille
grâces et bénédictions à Isabelle de Castille et à Ferdinand d’Aragon, ainsi
que des présents que ses esclaves déposèrent à leurs pieds : des coffrets
remplis de pierres précieuses et de perles et, posée sur un coussin richement
brodé, une grosse clef. C’était, affirma l’ambassadeur, la reproduction de la
clef ouvrant la porte principale du Saint-Sépulcre à Jérusalem. Il ajouta d’un
ton badin qu’il serait fort dommage que son maître fût contraint de raser cet
édifice pour venger l’éventuelle prise de Grenade. Et il serait encore plus
désolé d’avoir à traiter ses sujets chrétiens comme Ferdinand et Isabelle
traiteraient les Maures passés sous leur domination. C’était, disait-il, un
avertissement amical donné par le Soudan de Babylone aux deux monarques. Il en
avait un autre à délivrer maintenant à Boabdil, l’émir nasride de Grenade,
celui de faire preuve de bonne volonté en libérant les captifs chrétiens en sa
possession. L’ambassadeur se faisait fort de revenir avec eux au camp royal,
espérant qu’un tel geste permettrait la conclusion d’une trêve. Ayant délivré
son message, il s’inclina cérémonieusement et se retira comme si la réponse des
deux souverains lui importait peu.
    Quand elle reçut en audience privée Antonio de Marchena et
Cristobal, la reine Isabelle ne dissimula guère son agacement :
    — Avez-vous entendu ce misérable formuler ses
menaces ? Je frémis à

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