Christophe Colomb : le voyageur de l'infini
25 septembre de l’an de
grâce 1489
De Pablo de Santa Maria à Don
Abraham Senor,
trésorier de la Maison de la
reine Isabelle de Castille
Je te remercie de certaines choses que tu as bien voulu me
communiquer et qui me permettront de me mettre en règle avec ma conscience.
Il m’a été donné de rencontrer un navigateur génois qui
prétend pouvoir naviguer jusqu’à Cypango et en rapporter de fabuleuses
richesses.
J’avais fondé sur lui de grands espoirs, sur la foi de
certaines informations que je tenais à propos de sa compagne, et ai été
cruellement déçu par ses réponses.
Je ne puis t’en dire plus par écrit mais sache qu’il
n’est pas de ceux auxquels nous puissions prêter notre concours.
Pablo de Santa
Maria.
*
Le 2 janvier de l’an de
grâce 1490
Mon cher frère,
Pour une fois, je ne puis que me féliciter de la prudence
avec laquelle tu agis et des précautions que tu prends pour que notre
correspondance ne tombe pas en de mauvaises mains.
Tu as joué à la perfection devant nos amis la farce du
cadet outragé par l’humiliation que lui a fait subir, une fois de trop, son
aîné. Tout le monde ici croit à notre brouille et te plaint sincèrement d’avoir
dû t’exiler en Angleterre dont je leur ai fait une description terrifiante.
Tu as eu parfaitement raison de te défier de ce Joao de
Coïmbra qui prétend m’avoir connu à Thulé. Il est exact que nous nous sommes
rencontrés et qu’il a joué un rôle important dans ma vie en me faisant
découvrir les récits de Messer Millione.
J’incline à penser qu’il ne t’a point approché par hasard
et qu’il cherche à se renseigner sur ce que t’a dit le roi Henri VII lors
de l’audience qu’il t’a accordée. Je suis convaincu que les Portugais cherchent
par tous les moyens à m’empêcher de réaliser ce voyage car ils espèrent
parvenir à Cypango avant moi. J’ai de bonnes raisons de penser que leurs
propres capitaines ne croient pas à l’existence d’une route qui contournerait
l’Afrique.
Veille donc à ce qu’il en sache le moins possible mais qu’il
ait l’impression que les choses traînent en longueur. Ici, elles progressent et
je t’en donnerai de plus amples détails à une autre occasion.
Cristoforo.
*
Le 15 mai de l’an de grâce
1490
De Martin Pinzon à Luis de
Santangel
Grâce à un stratagème auquel ont bien voulu se prêter
certains de mes amis génois, j’ai cherché à entrer en contact avec l’homme dont
tu m’as parlé et qui se conduit comme s’il fuyait la société de ses semblables.
Au lieu de me remercier de mon intervention et de m’offrir son amitié, il s’est
tout bonnement contenté de me tourner le dos et de reprendre ses activités
comme si de rien n’était.
J’essaierai toutefois d’en savoir plus sur son compte
lors de ma prochaine visite à la Rabida dont le prieur est un ami.
Martin Pinzon,
armateur à Palos.
*
Le 17 juillet de l’an de
grâce 1491
De Don Luis de Santangel à Martin
Pinzon,
armateur à Palos
Je te sais gré des précieuses informations que tu m’as
adressées concernant les discussions entre frère Juan Perez et son protégé
génois. Par l’un de mes agents à la cour de France, je sais que son frère,
après avoir essuyé un véritable camouflet à Londres, s’efforce d’intéresser à
son projet la régente Anne de Beaujeu. La même déconvenue l’attend.
Reste qu’il est préférable de prévenir son éventuel
départ pour l’étranger et continuer à garder l’œil sur lui. Fais-en toi un ami.
J’ai pour ma part donné des ordres afin qu’il soit invité à paraître sous peu à
la cour. De la sorte, nous en saurons plus sur ses intentions et ses exigences.
Pour te récompenser de tes bons services, j’ai obtenu
d’Abraham Senor qu’il annule les amendes qui t’ont été infligées pour avoir
transporté de Palos à Bordeaux une cargaison de peaux tannées sur laquelle tu
n’avais pas acquitté le quinto.
Je suis ton serviteur,
Luis de Santangel,
trésorier de
la Maison de
Ferdinand, roi d’Aragon.
*
Le 23 septembre de l’an de
grâce 1491
De Martin Pinzon à Abraham Senor
Je te remercie de la diligence dont tu as fait preuve
pour l’obtention de mes lettres de rémission.
Je suis heureux d’avoir pu faire ta connaissance et
discuter avec toi des projets que tu nourris de donner à notre commerce avec la
France et
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