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Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Christophe Colomb : le voyageur de l'infini

Titel: Christophe Colomb : le voyageur de l'infini Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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à
s’emparer de lui. Sa mule était toujours à l’écurie et il avait réglé d’avance
son couchage pour deux nuits.
    Luis de Santangel sourit en écoutant ces explications
désordonnées. Le Génois ne changerait jamais, brouillon, maladroit, impulsif,
capricieux, capable, par ses maladresses, de s’aliéner définitivement les
sympathies de ses amis et protecteurs. Il n’avait pas eu tort de penser qu’il
lui suffirait de galoper à belle allure avec sa petite troupe pour rattraper
cet imbécile. Il ne pourrait lui échapper et aurait à rendre compte de sa
faute, avoir quitté sans autorisation la cour alors qu’il devait être reçu en
audience par Leurs Majestés.
    L’affaire était d’importance, plus que le Génois ne pouvait
l’imaginer. Il s’était cru victime d’une disgrâce soudaine alors qu’il était en
fait, sans le savoir, l’instrument d’un complot visant à monter l’Aragon contre
la Castille et compromettre l’unification de ces deux royaumes à laquelle lui,
Luis de Santangel, avait consacré tous ses efforts.
    Dès qu’il avait eu communication d’un certain message
anonyme, le trésorier du roi d’Aragon avait réalisé que la décision prise par
ses maîtres de congédier définitivement ce Génois était pire qu’un simple
caprice ou une volonté de lui faire payer un grave manquement à la bienséance.
C’était une faute dont ne manqueraient pas de profiter tous leurs ennemis, à
commencer par Dom Joao II de Portugal dont les entreprises maritimes
semblaient être couronnées de succès. Il s’en était très rapidement convaincu
en s’entretenant avec les membres de la fameuse commission présidée par Don
Hernando de Talavera. Ils se trouvaient tous à Santa Fé et il n’avait eu aucun
mal à les rencontrer. Il avait été stupéfait par leurs confidences. Chacun, en
particulier, lui avait confié que, s’il n’avait tenu qu’à lui, on aurait bien
volontiers accordé au Génois les trois navires qu’il réclamait. La dépense
n’était pas énorme et, en cas de succès, les bénéfices seraient considérables.
Mais ce malotru était tellement infatué de lui-même, tellement persuadé de
détenir la vérité, qu’il n’avait pas supporté qu’on le contredise ou qu’on
cherche à prendre certaines précautions. Il tenait Diego Deza pour le pire de
ses ennemis et avait accablé de sarcasmes l’archevêque de Tolède alors que
celui-ci tentait de lui venir en aide en évoquant le témoignage de Toscanelli.
Pour prix de sa bonté, il s’était vu répliquer que ce savant valait mieux, cent
fois mieux, que les esprits bornés que Cristobal avait devant lui. Résultat, il
avait fait l’unanimité contre lui. Ce n’était pas son projet qui avait été
condamné, mais son comportement. Tous avaient voté contre lui parce que
l’approuver, c’eût été accepter l’insolence dont il avait fait preuve envers
les autres membres de la commission. Or ceux-ci étaient suffisamment liés les
uns aux autres pour ne pas commettre pareil impair.
    Sa colère avait redoublé quand il avait rencontré son
dernier interlocuteur, le prieur de la Rabida. Celui-ci était comme anéanti par
la fuite de son protégé, supportant mal d’en avoir été prévenu uniquement par
un court billet dans lequel le Génois lui expliquait qu’il partait pour Cordoue
et qu’il gagnerait de là la France avec ses deux fils et sa compagne, Beatriz
Enriquez de Harana, afin d’y trouver un emploi digne de ses capacités. Le moine
en était tout bouleversé :
    — Ce n’était pas simplement l’un de mes pénitents.
C’était aussi un ami, presque un frère. Il n’avait aucun secret pour moi et je
n’en avais aucun pour lui. S’il était venu me faire ses adieux, j’aurais tenté
de le retenir. À tout le moins, je l’aurais supplié d’attendre d’être reçu par
Leurs Majestés et j’aurais usé de mon crédit auprès de la reine pour qu’à la
faveur de la prise de Grenade il lui soit octroyé un titre de chevalier. Il
s’en serait contenté et cela aurait calmé sa colère. Il serait alors resté en
Espagne et je suis sûr qu’il aurait mis ses immenses talents au service de la
Couronne, d’une manière ou d’une autre.
    — Vous en parlez à votre aise. Si je ne parviens pas à
le rattraper, qui sait ce qui peut lui arriver ? Il a commis une faute
impardonnable !
    — Dont je suis prêt à prendre sur moi le poids. Je suis
le seul responsable de son

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