Chronique de mon erreur judiciaire
cette dernière a souffert de l’incompétence d’un jeune juge d’instruction, mais aussi de la paresse intellectuelle de ses pairs, dont le rôle était notamment de surveiller son travail.
Fabrice Burgaud est, d’abord et avant tout, un très mauvais magistrat. Il connaissait parfaitement les codes, la couleur du formulaire correspondant à telle ou telle demande. Mais à côté de cela, il a simplement oublié l’humanité que son métier exigeait de lui, il a « oublié » les femmes et les hommes qu’il avait en face de lui. Il a omis l’essentiel. On dit souvent qu’il était trop jeune pour une telle affaire. Mais, dans les faits, cette « Affaire » avec un A n’a jamais existé. L’affaire, le soi-disant réseau international de pédophiles, c’est lui qui l’a créée de toutes pièces. Le casting du dossier, c’est Burgaud qui l’a monté.
Dès le départ, nous avons tous été traités en présumés coupables. Des coupables qu’il fallait faire avouer à tout prix, alors que les juges ne disposaient d’aucun élément matériel, et pour cause, puisqu’ils n’existent pas. Les seuls éléments dont ils espéraient disposer sont des aveux. D’où cette violence inquisitoire et psychologique qui devait nous pousser à avouer ! Si Aurélie Grenon comparaissait libre, c’était pour nous faire craquer, nous inciter à parler à notre tour ! Burgaud ne cessait de nous le répéter lors de ses interrogatoires : « Vous voyez, Aurélie Grenon, elle a dit qu’elle a violé les enfants, elle est libre… Dites comme elle, et je vous libère ! » Aux yeux de la police, puis de la justice, nous n’étions qu’une bande de sales résistants, des durs à cuire qui ne voulaient pas céder. Pendant toute l’affaire d’Outreau, Fabrice Burgaud a été un chef d’orchestre. Jamais, alors que les musiciens jouaient faux, il n’a cessé de battre la mesure.
Avec le recul, je crois qu’au tout début, il a cru à cette histoire de réseau pédophile. Mais je ne peux pas imaginer qu’il y ait cru jusqu’au bout. Comme la machine était lancée, personne n’a eu le cran de faire marche arrière. Et c’est totalement irresponsable. Pire, tout cela, d’une certaine manière, a « tué » ma mère, c’est par cela aussi que François Mourmand est mort. Que de vies gâchées, brisées par un aveuglement têtu !
*
Mais ce combat pour nous pousser à avouer des crimes que nous n’avions pas commis, le juge Burgaud ne l’a pas mené seul. Il avait, pour complice, une folle mythomane perverse, une vraie coupable qui n’en revenait pas que l’on puisse s’intéresser à elle : Myriam Badaoui. Au risque de choquer, je l’affirme haut et fort : le couple infernal, dans Outreau, ce n’est pas le couple de parents incestueux Myriam Badaoui – Thierry Delay, c’est le tandem Myriam Badaoui et Fabrice Burgaud. Ce sont eux qui ont monté ce réseau imaginaire, qui ont envoyé des innocents en prison. La mytho faisait tout pour donner satisfaction au juge, pour lui suggérer un par un tous les ingrédients propres à un bon réseau de pédophiles : un métallurgiste, un curé, un méchant huissier, un chauffeur de taxi chargé de transporter les enfants (indispensable puisque le réseau est censé concerner la Belgique, patrie de tous les vices), une commerçante ambulante qui faisait circuler les cassettes pornos, un jeune homme pour filmer les scènes et quelques voisins en guise d’acteurs supplémentaires !
Myriam Badaoui disait à Burgaud tout ce qu’il avait envie d’entendre. Pensait-il pouvoir détenir une part de vérité ?
Aussitôt, elle acquiesçait. Il faut lire, pour le croire, les lettres qu’elle écrit au juge au début de sa détention : « Vous me promettez la liberté conditionnelle, mais je suis toujours en prison. Jusqu’où voulez-vous que je mente ? »
Ces courriers sont dans le dossier…
*
En 2009, trois ans après l’enquête de la commission parlementaire, le juge Burgaud comparaît en audience disciplinaire devant le Conseil supérieur de la magistrature. Malgré les poursuites disciplinaires engagées par Pascal Clément, il persistera dans sa volonté de nier toute faute dans l’affaire de pédophilie d’Outreau. Il ne recevra de ses pairs qu’une simple « admonestation ».
Fabrice Burgaud poursuit aujourd’hui sa carrière de magistrat comme juge d’application des peines au parquet de Paris.
Aucune sanction, pas même un
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