Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Chronique d'un chateau hante

Chronique d'un chateau hante

Titel: Chronique d'un chateau hante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Magnan
Vom Netzwerk:
dois découvrir par toi-même !
    Il se mit
en route, le sac à l’épaule. Le Mèche l’accompagna tant qu’il put. Le vieillard
disait qu’il errait à la recherche de tous les saints qui avaient acquis cette
pureté dont il avait plein la bouche. À chaque question que posait le Mèche sur
la nature de cette pureté à acquérir, chaque fois que, plein d’espoir, il
avançait un mot ou plusieurs qui d’après lui en contenaient substance, le
vieillard secouait la capuche qui lui faisait une tête d’ombre. Il répondait
avec elle par le signe non, interminablement.
    Le Mèche
ne le lâcha qu’après avoir descendu le sentier qui longeait le Mardaric, alors
que tournant le dos aux plaines le vieillard s’engageait vers le nord vers
Sisteron, vers les montagnes qui grondaient en sourdine au fond de la vallée de
tous leurs échos si profonds.
    Le Mèche
resta les bras ballants. Il aurait voulu poser au vieillard des questions qui
lui paraissaient insolubles et notamment celle-ci :
    — Vous
qui semblez tout savoir. D’après vous, qu’est-ce que c’est le ciel, qu’est-ce
que c’est l’univers ?
    Longtemps
dans ses nuits de veille, apprenant le latin à la lueur du calen, le Mèche
imagina ce vieil homme disparaissant ainsi, chargé de cette incompréhensible
pureté dont il faisait état sans l’expliquer.
    Le curé
de Lincel lui fut d’un grand secours, c’était une manière d’innocent qui ne
voyait le mal nulle part. « Serait-ce lui, se dit le Mèche, qui serait la
parfaite pureté ? » Le prêtre entreprit consciencieusement
d’enseigner le latin à ce catéchumène monté à graine, à partir de ce livre qui
sentait le fagot.
    Le Mèche
apprit avidement les rudiments de l’alchimie. Il fut très tôt capable de loger
un athanor dans le grand âtre de la salle commune de ce manoir qu’on appelait
château. Ses parents étaient morts tués par des bandes qu’on disait de Raymond
de Turenne mais ce n’était pas vrai. En réalité Raymond de Turenne avait été
noyé depuis longtemps, assassiné par ses compagnons qui voulaient tous signer
ses crimes de leur propre nom et auxquels il portait ombrage par la terreur
unanime que sa signature répandait partout.
    Le Mèche
avait réuni sur les murs de la grande pièce où sévissait l’athanor toutes les
figures allégoriques que Flamel indiquait dans son livre et il les avait
peintes lui-même, maladroitement mais avec la ferveur d’un néophyte. Il avait
ainsi figuré Hercule portant le lion de Némée sur ses épaules, Atalante raflant
toute courante les pommes d’or du jardin du Soir, Ulysse regagnant Ithaque sur
son navire tandis que Circé à qui il tourne le dos le regarde partir. Ces
figures mythiques, le Mèche les contemplait tous les jours et s’efforçait d’en
comprendre le sens. En ce temps-là toute tentative d’appréhender le monde
passait d’abord par une approche poétique.
    Ce
matin-là, il observait l’athanor avec une moue dubitative. C’était un robuste
poêle en céramique encastré dans le mur et qui tenait debout par trois pieds en
forme de sabots, enfoncés dans la terre. Le Mèche contemplait ces pieds, se
demandant où il avait déjà vu les pareils. Sur les doigts de ces extrémités qui
rappelaient à la fois ceux des hommes et ceux des animaux héraldiques que
figuraient les alchimistes dans leurs bestiaires, une bague était repoussée
dans le métal. Soudain le Mèche se souvint. Il bondit vers la table où étaient
répandues les trois dépouilles qu’il venait d’acquérir. La tablette
représentant un char était éclairée par les lueurs incertaines d’une chandelle
à bout de souffle et qui réclamait d’être mouchée. Sous cette clarté indécise
vivait et palpitait la couleur or du sabot qui dépassait de la bâche bleue
laquelle recouvrait l’ensemble. Ce pied était orné d’une bague identique à
celle de l’athanor. L’athanor était la réplique fidèle, coulée dans le bronze,
du dessin qui figurait sur le grimoire de Nicolas Flamel. Qu’est-ce que tout
cela pouvait avoir de commun ?
    C’était
le matin et le fourneau dont on avait fermé toutes les clés de tirage avait été
dolent toute la nuit.
    Le Mèche,
en dépit de la chaleur, frissonna. Il avait la pénible impression de tenter de
réveiller des forces plus néfastes que bénéfiques.
    Il
s’efforçait sans y parvenir de comprendre toute la partie ésotérique de
l’alchimie. Il voulait saisir le subterfuge

Weitere Kostenlose Bücher