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Chronique d'un chateau hante

Chronique d'un chateau hante

Titel: Chronique d'un chateau hante Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Magnan
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mystère ?
    — Que
vous l’éclaircissiez ! « Une vivante preuve de la vérité des Saintes
Ecritures » !
    Il répéta
en latin : testimonium quod infirmare non podest Sanctorum Scripturarum
fidei. Vous imaginez-vous ce que cela représente pour un vieillard de
quatre-vingts ans ? Non, n’est-ce pas ? La certitude de Dieu ne vous
préoccupe pas encore !
    — J’ai
eu lieu d’éprouver sa compassion, dit Palamède sobrement.
    — Mes
études d’abord et ensuite les devoirs de ma charge m’ont empêché moi toute ma
vie d’essayer de percer ce secret. Tenez, mon neveu, nous avons fait la moitié
du tour du grand canal. Nous allons bientôt tourner le dos au soleil face au
château. Auparavant, rapprochez-vous bien de moi, joignons nos mains en une
ultime effusion avant que vous montiez en voiture. Voici ! Comme
cela ! Je glisse dans vos manchettes le cartulaire dont il s’agit…
poussez-le avec vos doigts dans votre manche et faites bien attention que de
loin les valets bleus ne puissent vous voir accomplir votre geste !
Attention ! Voici le dernier mouvement subreptice que je puisse faire pour
vous ! Après c’est à vous ! Si l’objet tombe à terre, nous risquons
la bastille ! Le roi ne plaisante jamais avec les secrets qu’il ne connaît
pas ! Là ! Bravo ! Vous avez réussi ! Le cartulaire est
dans vos profondes ! Faisons volte-face maintenant vers le château, l’un
tourné vers l’autre, le visage riant mais néanmoins mélancolique par l’émotion
qu’éprouvent ceux qui se quittent probablement pour toujours. Encore un
mot : si par hasard vous découvrez la clé du mystère et que je sois encore
en vie, faites-le-moi savoir. Le roi me pardonnera d’avoir tenu la chose
secrète car, souvenez-vous ! pour le roi, vous, moi et le reste du monde,
« une vivante preuve de la vérité des Saintes Écritures », c’est bien
la chose du monde qui nous préoccupe le plus. Adieu mon cher !
    Gaussan
haussa sa béquille, mit en terre son seul genou pour recevoir en toute
contrition la bénédiction de l’oncle Toussaint.
    Regagnant
sa voiture et traversant le bois d’Amour, il vit par-dessus les buis
taillés – et ce fut le dernier regard qu’il jeta sur la Cour – la
taille élevée de la duchesse de Saint-Simon accourant vers son mari, occupé à
jouer au volant avec Son Altesse le duc de Bourgogne. Elle portait un gros tas
de papiers en désordre tenus par une ficelle. Gaussan l’entendit qui grondait :
    — Vous
avez encore laissé vos papiers sur une desserte du grand salon ! Vous êtes
incorrigible ! Vous les laissez traîner partout. Un jour vous vous ferez
embastiller et sans rien pour écrire !
    Gaussan
aurait bien voulu savoir ce que répondait le duc, mais à l’instant ses valets
le saisissaient, lui faisaient franchir le marchepied, l’installaient sur le
cuir de la banquette du carrosse et l’attachaient solidement afin qu’il ne
glissât point. Les cochers sonnaient de la trompe afin de bien marquer cet instant
solennel. Pons de Gaussan quittait la cour du Roi-Soleil pour regagner la
Provence et surtout sa femme chérie.
    Gaussan
avait hâte de retrouver sa citadelle de Mane. Il voyagea quatre jours par la
Seine d’abord sur un bac qui remontait à l’abbaye, et ensuite par la Saône et
le Rhône jusqu’en Avignon où ses gens et son carrosse l’attendaient. Il avait
été accueilli partout en héros par ses pairs mais il n’avait pas envie de
s’attarder. Les oaristys de ses amours avaient été à peine entamées avant la guerre
des Flandres où il avait perdu sa jambe. Gersande de Gaussan ne l’avait pas
encore vu en son nouvel état.
    Il
atteignit une fin de soirée le parvis de sa citadelle de Mane, que Richelieu
avait fait écrêter sous le grand-père du marquis pour quelque velléité sans
lendemain que celui-ci avait eue en faveur des parpaillots. Sans lendemain car
le premier cardinal de Gaussan avait remontré à son frère l’immense avantage
qu’il y avait à rester dans le camp des catholiques. Et effectivement Henri IV
et son fils avaient beaucoup mieux traité leurs anciens adversaires que leurs
anciens amis. Le grand-père du Gaussan blessé à Malplaquet avait été élevé au
marquisat par Louis XIII pour des raisons de commodité domestique.
    Palamède
hocha la tête à ce souvenir de famille. Ce sont là bagatelles qui décident des
carrières dans les cours et qui conduisent aux honneurs, à la gloire

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