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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Graves
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tâche.
    —  Bien sûr, ma très chère, dis-je avec mélancolie, si tel est vraiment ton désir, je ne suis pas l’un de ces maris qui cherchent à imposer leur volonté. Mais est-il vraiment nécessaire que nous fassions chambre à part   ? Ne pourrions-nous du moins partager le même lit, pour le seul plaisir d’être ensemble   ?
    —  Ô Claude, répondit-elle en pleurant presque, il m’a été si difficile de me résoudre à te faire cette demande, parce que je t’aime tant et ne veux surtout pas te blesser. Ne rends pas la situation plus difficile encore. Et maintenant que je t’ai dit sans détour mon sentiment, ne serait-ce pas terriblement pénible pour toi si, ressentant un violent désir alors que nous couchons côte à côte, je ne pouvais sincèrement y répondre   ? Si je te repoussais, notre amour serait aussi meurtri que si je te cédais contre ma volonté   ; et je suis sûre que le remords te rongerait si mon amour pour toi recevait une blessure inguérissable. Ne comprends donc tu pas qu’il vaut bien mieux pour nous faire chambre à part jusqu’à ce que se réveillent mes anciens sentiments pour toi   ? Que dirais-tu si, pour me mettre à l’abri de la tentation, je m’installais avec ma suite dans le nouveau palais   ? J’y aurais plus de commodités pour mon travail. Je pourrais me lever tôt le matin et m’installer directement devant mes papiers. Cet accouchement m’a vraiment mis en retard pour les listes de citoyens.
    —  Combien de temps, plaidai-je, voudras-tu rester éloignée de moi   ?
    —  Nous verrons bien, dit-elle en m’embrassant tendrement sur la nuque. Comme je suis soulagée de ne pas subir ta colère. Combien de temps   ? Oh, je ne sais pas. Est-ce tellement important   ? Après tout, le sexe n’est pas indispensable à l’amour lorsqu’il existe entre les amants des liens aussi forts que, par exemple, la poursuite commune d’un idéal de beauté ou de perfection. Je partage tout à fait l’avis de Platon à ce sujet. Il pensait que le sexe faisait obstacle à l’amour.
    —  Il parlait de l’amour homosexuel, lui rappelai-je en m’efforçant de cacher mon découragement.
    —  Eh bien, mon cher mari, reprit-elle avec légèreté, je fais un travail d’homme, le même que toi, cela revient donc au même. Tu ne trouves pas   ? Quant à l’idéal commun, il nous faut en effet être bien idéalistes pour venir à bout d’une besogne aussi ingrate, sous le prétexte d’atteindre à une certaine perfection politique, n’est-ce pas   ? Alors, est-ce bien d’accord   ? Vas-tu vraiment te montrer un Claude très très mignon et ne pas insister pour que je partage ton lit –  au sens littéral, s’entend. Je suis toujours ta dévouée petite Messaline dans tous les autres domaines   ; et rappelle-toi qu’il m’a été très, très pénible de te demander cette grâce.
    Je lui répondis que je la respectais et l’aimais encore plus pour sa franchise et que, bien entendu, il serait fait selon sa volonté. Mais que naturellement j’attendrais avec impatience le retour de ses sentiments anciens à mon égard.
    —  Oh, je t’en prie, ne sois pas impatient, s’écria-t-elle. Tu me rends les choses si difficiles. Si tu me montres ton impatience, j’aurai l’impression de ne pas avoir été gentille avec toi et je feindrai probablement des sentiments que je n’éprouverai pas. Peut-être suis - je une exception, mais d’une certaine façon le désir physique ne signifie pas grand-chose pour moi. Je me doute, cependant, que beaucoup de femmes se lassent, sans pour autant cesser d’aimer leur mari ou de désirer en être aimée. Mais je continuerai de me méfier des autres femmes. Si tu devais avoir des aventures avec d’autres, je crois que je serais folle de jalousie. Non que je trouve à redire à ce que tu couches avec une autre   ; c’est la crainte que tu n’en viennes à l’aimer plus que moi, à ne plus la considérer uniquement comme un dérivatif sexuel agréable et à vouloir divorcer de moi. Autrement dit, s’il t’arrive de coucher de temps en temps avec une jolie servante, ou avec une petite femme coquette de condition trop basse pour me rendre jalouse, je serai très contente, vraiment ravie, que tu aies pris du bon temps avec elle   ; et si plus tard nous devions toi et moi coucher de nouveau ensemble, nous passerions l’éponge sur cet incident. Nous n’y verrions qu’une mesure d’hygiène, comme une

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