Clio Kelly et l'éveil de la gardienne

l'étincelle que je croyais éteinte
    À Toi dont la lumière a si souvent apaisé mes angoisses et mes peurs
    À Toi aujourd'hui je dédie chacune de mes joies et chacun de mes plaisirs
    Afin que nos esprits, plus proches enfin, deviennent chacun une part de l'autre [5] .
    Pendant plusieurs secondes, le gardien des portes resta penché au-dessus d’elle, l’œil brillant d’inquiétude. Déposant une main apaisante sur son épaule, il demanda d’une voix douce qu’elle ne lui connaissait pas :
    — Comment te sens-tu ?
    — Beaucoup mieux, répondit Clio en s’appuyant sur lui pour se relever. Que m’est-il arrivé ?
    — On t’a simplement jeté un sort. Dis-moi, il ne s’est rien passé de bizarre ?
    — Je ne sais pas, la dernière chose dont je me rappelle, c’est de m’être accrochée avec l’autre gardienne et puis… Il y a eu cette odeur de lys… et c’est le trou noir. Je ne sais pas comment je suis arrivée jusqu’ici.
    — Tu as vu Alexia ! Comment ? Où ? Quand ?
    — On travaille sur la même enquête.
    Janus marmonna dans sa barbe, puis il se mit à faire les cent pas. Finalement, il s’arrêta et sortit de sa poche une sorte de fleur qui semblait être constituée d'un voile comparable à de la soie.
    — Qu’est-ce que c’est ? demanda la jeune femme.
    — Il s’agit d’une Kaliesope, une fleur messagère.
    Posant la fleur avec délicatesse dans la paume de sa main, celle-ci se mit à onduler comme si quelque chose voulait en sortir. La fleur laissa place à une petite silhouette qui ressemblait à une fée de cristal ; elle tourna sur elle-même dans une sorte de danse puis s’inclina devant Janus.
    — Trouve le renard d’argent et dis-lui de revenir ici au plus vite ! ordonna-t-il sèchement.
    La fée déploya de minuscules ailes, s’éleva dans les airs et sortit par la fenêtre, si vite que Clio eut juste le temps de voir un éclat de soleil traverser son corps de cristal. Résolue à obtenir une réponse du dieu, elle s’assit en face de lui. Contrairement à son habitude, le regard de Janus se fit fuyant. Un silence de marbre s’installa sans qu’elle se sente le courage de le briser. D’un geste nerveux, elle attrapa alors une mèche de ses cheveux qu’elle entortilla entre ses doigts.
    Quelques minutes plus tard, la fée réapparut, Hermès à sa suite, la mine grave.
    — Que se passe-t-il ?
    — Je crois qu’ils ont décidé de s’en prendre à la plus jeune, murmura Janus d’une voix sombre. La petite a eu droit à un Rhythm.
    — Un quoi ? demanda Clio, dont les sourcils ne formaient à présent qu’une seule ligne.
    — Un Rhythm est un sort de mort, il fait grimper la chaleur du corps, le sang se met à bouillir jusqu'au trépas.
    — Alexia a été victime de ce sort elle aussi ! s’exclama un petit félin qui venait de rentrer dans la chambre par la fenêtre.
    Tous trois tournèrent la tête vers le nouveau venu : l'ocelot fit quelques pas dans leur direction et, sautant sur le canapé, prit place auprès de Janus. Il regarda Clio une dizaine de secondes avant de s'adresser à Hermès :
    — Ta protégée ne semble pas bien évoluer.
    — Occupe-toi de la tienne, grogna Hermès en le foudroyant du regard. Jusqu'à maintenant, elle n’a pas été assez sotte pour se vanter d’être un Esprit Ancien et encore moins la potentielle Gardienne !
    — Laisse-moi te rappeler que tout ça, c’est de sa faute ! hurla Melicerte en pointant sa patte sur Clio. Rien ne serait arrivé si…
    Melicerte n’eut pas le temps de finir sa phrase qu’Hermès se jeta sur elle, lui enfonçant ses crocs dans la chair, ce qui la fit glapir de douleur. Une lumière vive enveloppa l’ocelot qui reprit aussitôt sa forme humaine et en profita pour projeter le renard contre le mur. Poussant un cri, Clio se leva et se précipita pour prendre Hermès dans ses bras. À peine l'avait-elle saisi qu’il se dégagea et s’approcha à grands pas de Melicerte, prêt à se battre, lorsque Janus hurla :
    — Assez ! Je vous ordonne de vous calmer tous les deux !
    Clio referma sa main sur le bras d’Hermès qui tenta de se dégager, mais finit néanmoins par se rasseoir sous l'insistance de sa compagne. Il ne se départit pas pour autant de son expression meurtrière.
    — Melicerte ! Hermès ! Arrêtez tout de suite vos gamineries et pensez à vos protégées !
    — Ils savent qu’elles sont ici, reprit Melicerte d’une voix froide. Ils n’ont pas perdu