Clopin-clopant
plus
belle du monde et leur papa le plus fort, pour devenir des « vieux »,
ringards et chiants, ils se fichent bien qu’ils toussent : à leur âge, c’est
normal.
Étant établi que, si ça tue, ça ne tue quasiment que les
vieux, les ados fument, les filles d’autant plus qu’il faut compenser des
petites disparités.
De toute manière, qu’aiment les jeunes ? Braver les
interdits. Quel est leur dernier souci ? La santé. Qu’est-ce qu’ils
redoutent le moins ? La mort.
Alors ? Ben rien, le meilleur moyen serait peut-être de
mettre la pédale douce sur l’interdit, de ne plus invoquer, dans les campagnes
de prévention à l’usage des jeunes, des arguments dont ils n’ont que faire. Quelle
est la Lolita qui a peur des maladies cardio-vasculaires ? Quel est le
petit marlou faisant cramer des pneus dans sa cage d’escalier et mettant la
musique plein pot à une heure du matin qui se soucie de son entourage ? Quel
est le jeune motard slalomant sur l’autoroute à 200 km/h qui a peur de la
mort ? Ils répondent tous avec une cinglante insolence en appelant les
cigarettes des nuigraves. Si on imposait une tête de mort sur les paquets de
brunes, ils abandonneraient aussitôt les blondes. Ça tombe sous le sens. Il n’y
a que les antitabagistes qui l’ignorent.
Au fumeur !
Car, abordant le problème en terme de propagande, de
campagne, les tenants de la lutte antitabac tombent dans les mêmes travers que
les tyrans, les publicitaires et les militaires en temps de conflit : bourrage
de crâne, diabolisation et outrance qui induisent moins la terreur que le
scepticisme et le sarcasme.
Pour ne prendre qu’un exemple, on put lire sur les paquets
de cigarettes canadiens : « Fumer provoque l’impuissance. » Le
slogan était illustré d’une blonde filtre en train de débander.
Tels sont les progrès de la science : toujours trop
tardifs. Si l’on avait su ça plus tôt, à l’évidence, l’homme aurait écrasé sa
cigarette dès la plus haute Antiquité. Jules César eût renoncé à la guerre des
Gaules et aux Gauloises. Le Seigneur fût apparu en songe à Zacharie et Élisabeth,
et eût commandé au couple prétendument stérile d’arrêter de fumer. Des
sorcières auraient échappé au bûcher, disculpées d’avoir noué les aiguillettes
de leurs voisins. Des milliards de tigres et de rhinocéros ne seraient pas morts
de l’ablation respective de leur pénis et de leur corne pour pallier les défaillances
viriles, depuis des millénaires, etc. Quel gâchis !
Qu’importe : grâce à des campagnes mieux ciblées, nous
connaissons aujourd’hui les risques spécifiques encourus par les hommes. Et par
les fœtus : « Femmes enceintes, fumer nuit à la santé de votre enfant. »
Ainsi l’enfant sain ne saurait-il naître que d’un couple
mixte : un non-fumeur et une éventuelle fumeuse avant la procréation ;
une non-fumeuse et un éventuel fumeur pendant la gestation (un couple divorcé
ensuite du fait du sevrage alterné ?).
De ces deux slogans, on peut tirer une bonne nouvelle :
celles des femmes qui ne sont ni sujettes à l’impuissance ni gravides ni en âge
de procréer pourraient fumer sans danger.
Ce qu’il ne fallait pas démontrer.
À la santé de votre entourage
Je pense que, dans notre pays où l’on préfère laisser les
enfants maltraités à la garde de leurs parents pochetrons, cogneurs ou
incestueux plutôt que de les placer dans un milieu moins toxique, il nous sera
épargné quelques dérives judiciaires à l’américaine.
Ainsi, Juanita DeMatteo, fumeuse et divorcée, s’est vu
retirer par un juge de l’État de New York le droit de visite de son fils de
treize ans. Le jeune Nicholas est soustrait à l’affection de sa mère bien qu'elle
ne fume jamais en sa présence. On ose espérer que le père est non fumeur. Sinon,
au prétexte de sa santé, Nicholas serait privé de ses deux géniteurs. Il est
clair qu’aux États-Unis mieux vaut être orphelin qu’avoir des parents fumeurs.
L’enfant de Juanita étant un garçon, il est probable qu'elle
ne fumait pas pendant sa grossesse puisque le Lancet , encore lui, a
quasiment établi que le surcroît de naissance de bébés filles était dû au
tabagisme des mères pendant la gestation. On peut légitimement se féliciter que
les femmes aient pris le risque de fumer depuis les origines jusqu’à nos jours
pour assurer une raisonnable parité car sinon nous ne serions pas là pour
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