Comment le jeune et ambitieux Einstein s'est approprié la Relativité restreinte de Poincaré
en
français.
Définition du temps physique dans un
référentiel
Il faut ici se rappeler la distinction que fait Pascal entre
définition et postulat. Poincaré donne une définition du temps dans un
référentiel grâce à la synchronisation des horloges. Cette définition est basée
sur le postulat que le temps est homogène.
Poincaré reprend de manière détaillée l’idée qu’il avait
déjà exprimée dans sa publication [Po4] lors de l’utilisation du télégraphe
pour déterminer l’heure entre deux points terrestres éloignés. Il a remarqué
que « en général, on néglige la durée de la transmission » mais, selon
Poincaré, il faudrait en tenir compte car « sa nécessité théorique n’en
subsiste pas moins à notre point de vue, qui est celui d’une définition
rigoureuse. » du temps.
Cette définition rigoureuse du temps mesuré entre deux
points éloignés d’un même référentiel, Poincaré va précisément la donner lors
de sa conférence à Saint-Louis [Po1] :
Imaginons deux observateurs qui veulent régler leurs
montres par des signaux optiques ; ils échangent des signaux, mais, comme
ils savent que la transmission de la lumière n’est pas instantanée, ils
prennent soin de les croiser. Quand la station B aperçoit le signal de la
station A, son horloge ne doit pas marquer la même heure que celle de la
station A au moment de l’émission du signal, mais cette heure augmentée d’une
constante représentant la durée de la transmission. Supposons, par exemple, que
la station A envoie son signal quand son horloge marque l’heure zéro, et que la
station B l’aperçoive quand son horloge marque l’heure t. Les horloges
sont réglées si le retard égal à t représente la durée de la
transmission, et pour le vérifier la station B expédie à son tour un signal
quand son horloge marque zéro, la station A doit alors l’apercevoir quand son
horloge marque t. Les montres sont alors réglées.
Par cette méthode, Poincaré précise ce qu’on appelle la synchronisation des horloges, et des montres. C’est une définition du temps physique en
chaque point du référentiel dans lequel sont situées des horloges synchrones.
Poincaré pose donc comme principe que le temps physique, dans
un référentiel donné, doit être le même en chaque point de l’espace du
référentiel dans lequel les horloges sont fixes.
Quatrième postulat : le temps est
homogène
En d’autres termes, Poincaré postule que le temps physique
est homogène dans un référentiel donné ; le temps de Poincaré est
invariant par translation. On peut encore dire que les origines du temps sont
arbitraires pour l’expression des lois physiques.
Il nous semble d’ailleurs nécessaire que toutes les horloges,
au moins dans un référentiel donné, doivent être réglées toutes à la même heure
pour pouvoir faire des mesures, entre des lieux éloignés, dans lesquelles
intervient le temps. Cela est même essentiel pour mesurer n’importe quelle
vitesse. Et comment mieux synchroniser les horloges qu’en utilisant un signal
dont la vitesse est, dès cette époque, supposée invariante dans tous les
référentiels.
Cependant, ainsi que Poincaré l’a déjà signalé [Po1], le
problème n’est pas simple puisque la mesure de la vitesse de la lumière
nécessite un postulat, ce qui met en évidence le conventionnalisme de la mesure
du temps. De plus, toute mesure de vitesse demande d’avoir synchronisé au
préalable ses horloges.
Cinquième postulat : l’espace est
homogène et isotrope
Le cadre spatial des phénomènes physiques est classiquement
identique à celui des géomètres, et il en possède toutes les propriétés. Poincaré
les rappelle dans son ouvrage La science et l’hypothèse [Po5] :
Quelles sont les propriétés de l’espace proprement dit ?
Je veux dire de celui qui fait l’objet de la géométrie et que j’appellerai l ’espace
géométrique. Voici quelques-unes des plus essentielles : 1°Il est
continu ; 2°Il est infini ; 3°Il a trois dimensions ; 4°Il est
homogène, c’est-à-dire que tous ses points sont identiques entre eux ; 5°Il
est isotrope, c’est-à-dire que toutes les droites qui passent par un même point
sont identiques entre elles.
Poincaré montre ensuite que notre géométrie euclidienne n’est
qu’une sorte de convention de langage, et que la physique pourrait être énoncée
en la rapportant à
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