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Comment vivaient nos ancêtres

Comment vivaient nos ancêtres

Titel: Comment vivaient nos ancêtres Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Louis Beaucarnot
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cœur sur ces épouses, leurs parents et leurs enfants. Le ton est tour à tour naïf et prude. À propos de Frédégonde, on demande à l’enfant : « Faites-nous connaître les crimes de cette femme scélérate. » Il est plus tard grandiloquent : « Racontez-nous les derniers instants de Louis XVIII. » Suit la réponse : « La santé du roi s’étoit depuis quelque temps altérée d’une manière sensible. Le 13 septembre 1824, un bulletin du premier gentilhomme de la Chambre informa que l’état où se trou voit Sa Majesté faisoit concevoir les plus vives alarmes. » Suivent dix-huit lignes décrivant les adieux du roi à sa famille et sa mort très chrétienne.
    Pour achever d’embrouiller les mémoires de nos aïeux venait encore la liste des quarante princes gouvernant les principautés allemandes, avec leurs prénoms, dans l’ordre : Alexis-Frédéric-Chrétien, prince d’Anhalt-Bernbourg, Auguste-Chrétien-Frédéric, prince d’Anhalt-Coethen, etc. Pour chacun d’eux, on demandait leurs dates de naissance et de mariage, les noms et prénoms de leurs épouses et l’état civil complet de leurs enfants ainsi que les lits dont ils sont issus lorsque leur père s’est remarié. Que d’efforts de mémoire ne demande-t-on pas aux élèves d’alors ? À quoi cela peut-il leur être utile ? Ils apprennent les généalogies des dieux grecs et les sept merveilles du monde dans les menus détails, les mesures des temples antiques – « De 63 pieds du midi au septentrion, il était haut de 25 coudées et avait 36 colonnes en son enceinte », – sans oublier les noms légendaires des quatre architectes.
    La leçon se termine par une tirade sur Jeanne d’Arc dans laquelle la Pucelle raconte elle-même sa vie au duc de Bedford :
    Sous un rustique toit Dieu cacha mon berceau.
Non loin de Vaucouleurs, quelques prés, un troupeau,
Des auteurs de mes jours composaient la richesse ;
[…]
Et, bergère comme eux, j’errais sur les montagnes.
Chantant le nom de Dieu qui bénit les campagnes.
    Ainsi de suite, pendant cent huit vers. S’il en manque un, gare aux verges du maître. L’enfant doit apprendre à craindre et à glorifier Dieu et ses saints, à connaître ses lois et les rois qu’il envoie, et surtout à bien parler. La rhétorique est alors l’atout le plus sûr d’un curriculum vitae.
    DE LA MYTHOLOGIE GRECQUE
À LA MYTHOLOGIE RÉPUBLICAINE :
LES PLUMIERS DE JULES FERRY
    Napoléon I er s’est intéressé au problème scolaire, mais il s’est surtout contenté de transformer les lycées en casernes, en y introduisant le tambour et la discipline militaire. Il préconise que chaque jour, dans chaque collège de France, chaque professeur fasse en même temps la même leçon. Le tambour sonne les heures, à commencer par le lever des pensionnaires, à cinq heures trente, et jusqu’à la prière du soir et le coucher à vingt et une heure quinze. Il a un peu oublié l’enseignement primaire, mais, après tout, seule une élite doit avoir une instruction solide pour fournir les cadres de l’État et de l’armée. L’instruction n’est guère nécessaire aux soldats et aux hommes de troupe.
    L’Empire a donc laissé subsister les vieilles écoles improvisées dans des locaux de fortune, où les progrès seront lents à s’imposer. L’apparition du tableau noir vers 1840-1850 est contemporaine du passage de la plume d’oie à la plume d’acier qui, à 6 sous la pièce, reste longtemps un objet de luxe.
    Seule une révolution peut changer ce système lourd et bancal et cette révolution, c’est Jules Ferry qui la fait. À la salle Molière à Paris, le 10 avril 1870, il est vivement applaudi lors d’une déclaration fracassante : « Je me suis fais un serment, dit-il, entre toutes les nécessités du temps présent, entre tous les problèmes, j’en choisirai un auquel je consacrerai tout ce que j’ai d’intelligence, tout ce que j’ai d’âme, de cœur, de puissance physique et morale, c’est le problème de l’éducation du peuple. » Ce qui pourrait n’être que de simples paroles en l’air d’homme politique démagogue devient l’acte de naissance de notre Éducation nationale. Jules Ferry apporte à la nouvelle République qui va naître quelques mois plus tard un extraordinaire atout, un formidable outil, un moyen de pénétrer et de s’imposer jusque dans les régions les plus reculées. Il lui fournit un arsenal, une véritable mythologie lui

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