Contes populaires de toutes les Bretagne
demanda la raison de ses larmes.
Mais la mère ne voulait pas répondre. À la fin, pourtant, elle dit à l’enfant
qu’il avait été voué au diable et que celui-ci viendrait le chercher quand il
aurait sept ans.
— Ce n’est que cela, dit l’enfant. Ce n’est pas bien
grave. Donnez-moi un petit sac et je vais quitter le pays pour que le diable ne
me trouve pas.
La mère donna un petit sac à son fils et celui-ci partit sur
la route. Il vivait comme un mendiant. Il couchait dans les granges, et chaque
fois qu’il pouvait rendre service quelque part, on lui donnait un morceau de
pain.
Cependant le diable n’avait pas oublié qu’on lui avait
promis l’enfant. Il alla chez les parents et réclama son dû.
— Hélas ! lui dit la mère. Mon fils a disparu et
je ne sais pas où il est allé.
Le diable était furieux d’avoir perdu son temps lorsqu’il
était sous la forme du marminet. Il se mit aussitôt en campagne pour retrouver
l’enfant. Après avoir fait beaucoup de chemin, il le rencontra sur un chemin,
où il allait, avec son petit sac. Il s’approcha de lui et engagea la
conversation. L’enfant, qui avait reconnu le diable, lui dit :
— J’ai entendu parler de vous. On m’a dit que vous
pouviez prendre la forme d’une souris.
— Bien sûr, c’est très facile, dit le diable.
Et pour prouver qu’il pouvait le faire, il se mit sous la
forme d’une souris. Aussitôt l’enfant ouvrit son petit sac et fit entrer la
souris dedans. Il ferma le sac et noua soigneusement les cordons. Le diable
était maintenant prisonnier dans le sac.
Alors l’enfant alla trouver deux forgerons qui travaillaient
dans le village voisin. Il mit le sac sur l’enclume et dit aux forgerons de
taper dessus avec leurs marteaux. Les forgerons obéirent et le diable, au fond
du sac, demandait pitié. L’enfant lui dit :
— Je veux bien te remettre en liberté, mais il faut que
tu me promettes de n’avoir jamais aucun droit sur moi, ni sur les miens jusqu’à
la septième génération.
— Je te le promets, dit le diable, remets-moi en
liberté.
Et l’enfant relâcha le diable qui partit sans demander son
reste.
Camors (Morbihan).
LES MÉSAVENTURES DU LOUP
Autrefois, à Camors, il y avait beaucoup de loups. Pour les
prendre, on creusait dans les sentiers de la forêt des fosses profondes, plus
larges par le bas que par le haut, et on les recouvrait de branches.
Un soir, au temps du carnaval, alors qu’on fait beaucoup de
mariages dans le pays, un sonneur de biniou rentrait d’une noce à Bieuzy où il
s’était attardé très tard dans la nuit. Comme il était un peu troublé par ce
qu’il avait bu, il tomba dans une fosse où se trouvait déjà un
loup. Celui-ci, qui n’était point allé à la noce, avait le ventre vide, et
il eût volontiers rompu son jeûne en croquant le sonneur. Ses yeux brillaient
comme deux tisons ardents dans cette prison ténébreuse. Le sonneur croyait sa
dernière heure venue. Cependant, il eut une idée : il prit son biniou et
se mit à en jouer. Le fauve, surpris par cette musique inconnue, recula le plus
possible. Mais le sonneur se fatigua vite. Il s’arrêta de jouer. Alors, le
loup, quelque peu rassuré, se rapprocha de lui dans l’intention de l’attaquer.
Immédiatement, le biniou sonna un air de danse.
Il faut dire que ce ne fut pas une nuit de repos, aussi bien
pour le sonneur que pour le loup.
Le lendemain matin, des chasseurs arrivèrent, étonnés
d’entendre le son du biniou sortir d’une fosse. Ils délivrèrent le sonneur de
sa fâcheuse situation, mais le loup en profita pour se sauver à travers la
forêt.
Mais il y avait longtemps qu’il n’avait pas mangé, et il
cherchait un moyen de se restaurer. C’est alors qu’il rencontra le renard qui
était en train de lécher les derniers restes d’une motte de beurre qu’il venait
de dérober à une fermière.
— Que fais-tu là ? demanda le loup à son compère.
— Tu le vois, répondit le renard, c’est du beurre que
je mange, et c’est bien bon. Veux-tu en goûter, je sais où il y en a.
— Certainement, dit le loup qui sentait l’eau lui
monter à la gueule.
— Eh bien, dit le renard, il y a, non loin d’ici, une
fontaine dans laquelle la fermière a mis son beurre à durcir. Nous allons aller
là-bas et nous nous régalerons avec la motte de beurre.
— Volontiers, dit le loup de plus en plus tiraillé par
la faim.
Tous deux se dirigèrent vers la
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