Contes populaires de toutes les Bretagne
fontaine. Le soir tombait et
la lune, qui venait d’apparaître dans le ciel, se reflétait dans l’eau claire
et immobile. Le renard le savait bien, mais il voulait jouer un mauvais tour à
son compère le loup.
— Vois-tu cette motte au fond de la fontaine ?
elle est à nous. Il suffit que nous buvions l’eau et ensuite nous ferons un
régal !
Sur ce, le renard plongea son museau dans la fontaine. Il
faisait du bruit avec sa langue, mais il se gardait bien d’avaler une seule
goutte d’eau. Quant au loup, sans méfiance, il buvait à grandes lampées,
croyant que la fontaine allait être bientôt mise à sec. Mais plus il buvait,
moins l’eau diminuait et le beurre restait toujours à la même profondeur.
À la fin, le loup comprit que le renard se moquait de lui.
Il avait mal au ventre de toute l’eau qu’il avait bue, et il montra les dents
au renard. Celui-ci se mit à rire à pleine gorge et se sauva dans les fourrés,
laissant le loup à sa faim et à sa rage.
Cependant, le loup entendit du bruit dans les alentours.
C’était l’heure où l’on rentrait les bêtes. Ne sachant pas quoi faire de mieux,
le loup se mit à l’affût dans le coin d’une haie. Un troupeau de moutons
passait sur le chemin. Les bêtes étaient grasses et elles venaient d’être
tondues.
Le loup fit quatre bonds et se jeta sur une brebis toute
jeune qui s’était écartée des autres. Il s’apprêtait à la manger, lorsque la
mère de la brebis accourut et lui dit :
— Maître loup ! attendez quelques instants, je vous
prie. La sœur de cette brebis est morte ce matin, et nous allons lui rendre les
derniers devoirs. Laissez-nous l’enterrer : après quoi, vous pourrez
manger cette brebis à votre aise.
Le loup se dit qu’il pouvait espérer s’emparer de plusieurs
autres brebis et qu’il ne perdrait rien pour attendre, bien au contraire. Il
suivit le troupeau, bien décidé à croquer quelques-unes des sœurs de la brebis
qu’il venait d’attraper.
Quand le troupeau fut arrivé près de la bergerie, la mère
brebis se mit à bêler tristement, et tous les jeunes moutons se mirent à faire
de même, comme s’ils pleuraient la mort de quelqu’un. Le loup ne voulut pas
être en reste, pour donner confiance à ses futures victimes. Lui aussi rendit
les derniers devoirs à la défunte : il se mit à hurler hou, hou,
hou ! Mais à ces cris bien reconnaissables, le berger accourut, une trique
à la main et se précipita sur le loup. Celui-ci, pour éviter d’être
assommé n’eut qu’une seule chose à faire, il s’enfuit du plus vite qu’il put,
ce qui mit les moutons au comble de la joie.
Le loup cependant, n’avait toujours rien dans le ventre.
Après une nuit passée à chercher en vain quelque nourriture, il vit, au matin,
une truie qui barbotait dans une mare, avec cinq petits cochons.
— Cette fois, se dit le loup, je ne raterai pas ces
petits cochons. Ils doivent être bien tendres et je veux m’en rassasier.
Il s’approcha de la truie et dit :
— Donne-moi tes petits cochons, ou je me fâche !
— Comment ? dit la truie. Vous voudriez manger ces
petits ainsi couverts de boue. Attendez donc. On va les laver, ainsi ils seront
plus appétissants et plus présentables.
Aussitôt, elle dit à ses enfants d’amasser du bois et de
puiser de l’eau. Une chaudière fut remplie, et deux arbres abattus brûlèrent sous
la marmite. L’eau bouillait sur le feu, mais les petits cochons se tenaient un
peu à l’écart et laissaient faire leur mère. Le loup s’était assis devant le
brasier. Il se passait la langue sur ses babines et n’avait d’yeux que pour son
butin. Alors, quand la truie le vit ainsi occupé, elle renversa tout à coup la
chaudière et l’eau toute bouillante se répandit sur la peau du loup. Le
loup ne demanda pas son reste et s’enfuit dans la forêt. S’il n’est pas mort,
il doit y être encore.
Camors (Morbihan).
Dans la
région de Camors, il existe de nombreux contes sur les animaux et
particulièrement sur les loups qui paraissent avoir été assez nombreux dans
cette région. On notera que le ton est à peu près le même que dans le Roman de Renart : le loup est toujours
victime de sa goinfrerie et de sa bêtise, Mais les épisodes ne sont pas les
mêmes.
LE DIABLE QUI CHERCHAIT UN M É TIER
Lorsqu’il était jeune, le Diable était plutôt sot. Il avait
même conscience de sa bêtise et travaillait à s’instruire. C’est
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