Contes populaires de toutes les Bretagne
Le soir, le
monsieur lui demanda :
— Ton ouvrage est-il fini ?
— Oui, répondit-il, vous pouvez aller voir.
Le monsieur alla voir et fut encore plus surpris que la
veille. Il y avait là un magnifique verger planté d’arbres les plus robustes,
et chargés de fruits, et au milieu, un étang plein de poissons, sur lequel
nageaient de jolis canards.
— C’est bien, dit le monsieur. Demain, je te donnerai
autre chose à faire. Il y a une tourterelle sur la plus haute tour du château.
Cette tour est en marbre poli, mais il faudra que tu ailles me chercher la
tourterelle et que tu me la ramènes.
Cependant le monsieur n’était pas dupe. Il pensait bien
qu’une de ses filles avait aidé son domestique. Et ce ne pouvait être que la
jeune fille en blanc. Alors, il ordonna à celle-ci d’aller en ville pour
chercher des provisions. Quand la jeune fille en blanc eut appris cela, elle se
retira dans sa chambre et se mit à pleurer. Ses deux sœurs vinrent la voir et
lui dirent :
— Qu’as-tu donc à verser des larmes ?
— C’est que notre père veut m’envoyer à la ville, et
j’aimerais mieux rester ici.
— Ce n’est que cela ? dirent-elles. Ne t’inquiète
pas et ne pleure plus. Nous irons à ta place à la ville et notre père ne
s’apercevra de rien.
Le lendemain, à midi, la jeune fille en blanc vint apporter
son dîner au jeune homme. Elle le trouva assis au pied de la tour, en train de
méditer tristement sur son sort.
— Eh bien ! dit-elle. Je te trouve tous les jours
à ne rien faire alors que mon père t’a ordonné de travailler pour lui. S’il te
voyait ainsi, il te tuerait sûrement.
Le jeune homme la regarda d’un air accablé :
— Je ne suis pas capable de monter sur cette tour,
dit-il, elle est plus glissante que du verre.
— Il est impossible de monter sur cette tour, dit-elle,
et la tourterelle ne peut être prise que si elle descend. Mon père t’a demandé
une chose impossible, parce que si tu réussissais, il ne pourrait empêcher que
je me marie avec toi.
— Est-ce vrai ? dit le jeune homme. Voudrais-tu te
marier avec moi ?
— Oui, répondit la jeune fille en blanc. Je vais donc
t’aider, mais il faut que tu suives jusqu’au bout les recommandations que je te
fais.
— Je t’écoute, dit le jeune homme.
— Ce n’est pas difficile, dit la jeune fille, il suffit
que tu prennes un chaudron, que tu me coupes en morceaux et que tu y mettes
tous les morceaux.
— C’est impossible, dit le jeune homme. J’aimerais
mieux mourir que de faire du mal à une aussi jolie fille que toi.
— Il faut que tu fasses ce que je te dis, c’est le seul
moyen. Quand tu auras mis tous mes morceaux dans le chaudron, tu allumeras le
feu par-dessous. Alors la tourterelle descendra et tu pourras l’attraper.
— Mais toi ? demanda le jeune homme.
— Ne t’inquiète de rien et obéis-moi.
Le jeune homme finit par se laisser convaincre. Il découpa
en petits morceaux la jeune fille en blanc, mais au lieu de mettre tous les morceaux
dans le chaudron, il garda l’os du petit doigt du pied gauche. Quand il eut
fini de remplir le chaudron, il alluma le feu par-dessous. La fumée s’éleva et
devint épaisse, et elle atteignit bientôt le sommet de la tour. Alors la
tourterelle descendit au-dessus du chaudron et le jeune homme put la saisir.
Il se demanda ce qui allait arriver à la jeune fille en
blanc, mais quand le feu eut cessé de brûler, elle sortit du chaudron, tout
entière et encore plus belle qu’elle ne l’était auparavant. Il lui manquait
seulement l’extrémité du petit doigt de son pied gauche.
— As-tu bien mis tous les morceaux dans le
chaudron ? demanda la jeune fille.
— Non, avoua le jeune homme, j’avais gardé l’os du
petit doigt de ton pied gauche.
— Tu as bien fait, dit la jeune fille en blanc, cela
pourra nous aider, le moment venu. Garde-le. Maintenant que tu as réussi les
épreuves que mon père t’avait imposées, il sera obligé de te donner une de ses
filles. Mais il nous présentera à toi de telle façon que tu ne pourras pas me
reconnaître autrement que par le petit doigt de mon pied gauche.
Le jeune homme rentra dans le château et il alla jusqu’à la
salle où se trouvait le monsieur. Il lui montra la tourterelle.
— C’est bien, dit le monsieur d’un ton très contrarié.
Je t’ai promis de te donner une de mes filles. Ce sera à toi de choisir celle
que tu voudras.
Il fit venir
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