Contes populaires de toutes les Bretagne
qu’elle consentit à devenir l’épouse du Diable.
Quand le mariage fut célébré, le Diable fut porté, ainsi que
sa mère et sa femme, dans un four plein de feu, aussi grand que le monde et
qu’on nomme l’Enfer. Et c’est depuis ce temps-là que le Diable s’appelle aussi
Lucifer de l’Enfer. C’est là qu’il rôtit les méchantes gens qui lui sont
envoyés : il les retourne avec une fourche à deux dents afin de les brûler
de tous les côtés.
Mais le Diable était si méchant qu’il revenait parfois sur
la terre pour chercher des gens, et il les emportait tout vivants dans l’Enfer.
En voyant cela, le Bon Dieu ne voulut pas qu’il pût tourmenter encore longtemps
les vivants, et lui interdit de quitter l’Enfer.
Quand le Diable vit qu’il ne pouvait plus aller chez les
humains pour leur faire du mal, il chercha un moyen de tourmenter quand même
ceux qui habitaient la terre. Il prit sa baguette et créa une race
maudite : c’est celle des lions, des fées et des fétauds. En leur faisant
quitter l’Enfer, il leur dit :
— Vous ne mourrez jamais et personne ne pourra jamais
rien contre vous. Vous ferez des présents à ceux qui vous plairont, mais vous
leur demanderez de vous obéir, et malheur à ceux qui refuseront : vous me
les amènerez afin que je les rôtisse. Vous resterez longtemps parmi les hommes,
et quand votre temps sera terminé, vous reviendrez ici avec moi.
Les fées vinrent donc sur la terre. Mais au lieu d’habiter
sur la terre, dans des maisons, comme les hommes, elles se retirèrent dans des
endroits sombres, sous la terre, ou dans des grottes, au bord de la mer.
Maintenant, elles ont disparu, mais on dit qu’elles reviendront le siècle
prochain. Quant au Diable, il ne pourra jamais revenir sur terre : il
restera toujours en Enfer à rôtir des méchantes gens et à les retourner avec sa
fourche.
Saint-Cast (Côtes-du-Nord).
Ce
conte, recueilli en 1882, est une sorte de condensé des croyances concernant le
Diable. On remarquera le nom de Préserpine, déformation de Proserpine
(Perséphone-Korê), déesse des Enfers et épouse de Pluton-Hadès dans la
mythologie gréco-romaine. Il faut préciser que dans toute la Haute-Bretagne, on
donne le nom de Préserpine à des femmes laides et méchantes qui passent pour
être quelque peu sorcières.
LE MARIAGE DU SOLEIL
Un jour, dans un petit village, une belle jeune fille se
maria avec un époux resplendissant de lumière. Immédiatement après les noces,
il emmena la jeune femme avec lui dans son pays. Alors elle s’aperçut qu’elle
avait épousé le Soleil.
Quelques mois plus tard, l’aîné des frères de la mariée
voulut aller la voir. Il franchit des rivières et des montagnes et parvint
enfin au château de son beau-frère. Là, il aperçut sa sœur enfouie jusqu’à la
taille dans une cuve de feu.
— Ah ! dit-il, comment faire pour te tirer de
là ?
— Il te faudrait parler à mon mari. C’est le Soleil.
Mais il est en tournée et ne rentre que le soir.
Il s’en retourna chez lui. Quelque temps après, le second
des frères vint voir sa sœur. Après avoir marché longtemps et après avoir
franchi des rivières et des montagnes, il parvint jusqu’au château du Soleil.
Il vit sa sœur dans le feu, et elle en avait au niveau des épaules.
— Ah ! ma sœur, comment faire pour te tirer de
là ?
— Il faudrait, lui répondit-elle, le demander à mon
mari, le Soleil. Mais il est en tournée et ne rentre que le soir.
Le garçon attendit le soir. Quand le Soleil revint de sa
tournée, il l’accueillit avec bienveillance. Le lendemain matin, au moment où
le Soleil repartait pour faire sa tournée, le jeune frère lui demanda la
permission de l’accompagner.
— Je le veux bien, répondit le Soleil. Mais quoi que tu
puisses voir, il ne faudra pas t’étonner et surtout ne pas me parler avant que
nous soyons de retour.
Il s’en alla avec le Soleil. Il vit des vaches grasses et
belles dans une pâture où il n’y avait pas plus d’herbes que sur le haut du
Mené. Plus loin, il y avait des vaches maigres qui étaient dans l’herbe
jusqu’au ventre. Le long de la route, il vit encore deux pigeons qui
s’embrassaient, puis deux corbeaux qui se battaient à coups de bec. Mais il se
garda de poser une seule question. Le soir, le Soleil lui demanda ce qu’il
avait plus particulièrement remarqué.
— J’ai vu, dit-il, des vaches grasses dans une pâture
maigre, des vaches
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