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Crépuscule à Cordoue

Crépuscule à Cordoue

Titel: Crépuscule à Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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emblématique. Par ailleurs, son seul supérieur hiérarchique, le proconsul, était très occupé par les problèmes législatifs et diplomatiques ; alors, si les fonctionnaires qui gouvernaient véritablement la province étaient corrompus, ou s’ils manquaient tout simplement de conscience professionnelle, un poste avancé de l’Empire comme celui-ci pouvait se désagréger assez rapidement.
    Pareille chose était arrivée en Bretagne une décennie auparavant. Je le sais, car je m’y trouvais à ce moment-là. La révolte qui éclata fut provoquée par une combinaison de politiciens indifférents, de forces armées despotiques et d’une gestion inadaptée des finances.
    — Je commence à comprendre ce qu’ils insinuent quand ils parlent de toi, déclara Quadratus.
    Il ne précisa pas qui « ils » étaient ni ce qu’ils disaient de moi. Je savais cependant ce que lui, Quinctius Attractus, voulait. Il cherchait à comprendre si je faisais bien mon travail et à quel point je pouvais être dangereux.
    Je me contentai de hausser un sourcil en attendant qu’il reprenne la parole, ce qu’il fit avec une certaine gêne :
    — Tu restes là, assis, à boire ton vin d’une façon aussi détendue que n’importe qui d’autre, mais je suis certain que tu n’es pas en train de penser : « Ça, c’est un cru qui se laisse boire, même s’il est un peu trop sucré. » Tu vis dans un autre monde, Falco.
    — Le problème, en Bétique, c’est qu’il y a beaucoup trop de vent qui souffle du sud. Alors, forcément, les raisins en pâtissent.
    — Ma parole, tu sais tout ! Je t’admire. Oui, vraiment, je t’admire. (Il avait l’air parfaitement sincère.) Tu es un vrai professionnel. Voilà une attitude que j’aimerais imiter.
    Je l’en croyais capable, sauf s’il devait travailler avec le même salaire que moi et payer un loyer aussi élevé pour occuper un taudis, ou peu s’en fallait.
    — Il suffit d’être un peu consciencieux, affirmai-je, pour couper court à ses flagorneries.
    — Si tu me disais où tu veux en venir ? suggéra-t-il soudain.
    — Rien ne change jamais, répondis-je. La vie a beau nous infliger beaucoup de leçons, nous refusons d’apprendre.
    Quadratus avait toujours l’esprit vif, même si son élocution devenait moins précise. J’avais bu beaucoup moins que lui. Parce que je n’en avais pas eu envie. Je ne souhaitais pas davantage philosopher.
    Au-dessous de nous, dans le jardin, des silhouettes indistinctes s’agitaient un peu partout, occupées à une partie de cache-cache aux règles particulières. Je les suivis des yeux pendant un moment. Soudain conscient de mon âge, je me retournai vers le questeur :
    — Eh bien, ce que je voudrais savoir, Tiberius Quinctius Quadratus, c’est comment tu comptes agir, en ta qualité de questeur de Bétique, pour empêcher la formation d’un cartel de l’huile d’olive dans cette province.
    — Est-ce qu’on essaierait d’en former un ? demanda-t-il, les yeux aussi innocents que ceux des vierges d’occasion qui se laissaient rattraper dans les bosquets soigneusement taillés.

38
    Je me levai pour partir. Je posai ma main sur son épaule en lui tendant le pichet de vin.
    — Profite bien de ta soirée.
    — De quel cartel veux-tu parler ? ânonna-t-il bien trop solennellement.
    — De celui qui ne peut être qu’imaginaire dans une province aussi respectable, où l’éthique des hommes d’affaires est irréprochable, et où les membres officiels du gouvernement accomplissent leur devoir avec une probité exemplaire !
    L’abandonnant à ses pensées, je retournai dans la bibliothèque. Il y faisait très chaud ; du vin s’était répandu un peu partout. Le visage écarlate et luisant, le fils aîné de la maison et ses amis hurlaient de rire à l’unisson. Ils avaient atteint le degré de béatitude qui permet de proférer les pires inepties et de s’en amuser soi-même. Je constatai toutefois la disparition de Marius Optatus. Sans surprise, vu l’ambiance qui régnait ici. Cependant, comme nous partagions la même voiture, c’était tout de même un peu ennuyeux. Il avait probablement rencontré le régisseur de la propriété et il discutait culture avec lui. Ses intérêts étaient tellement terre-à-terre.
    — Superbe fête ! criai-je à l’adresse de mon hôte, qui parut ravi. Est-ce que ta sœur est ici ?
    — Elle s’est enfermée dans sa chambre pour feindre de n’être au

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