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Dans l'intimité des reines et des favorites

Dans l'intimité des reines et des favorites

Titel: Dans l'intimité des reines et des favorites Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Guy Breton
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causes d’infinis malheurs à ceux qui les aiment et qu’elles aiment » [17] .
    Parmi les amis du duc d’Alençon se trouvait le seigneur Boniface de La Mole, gentilhomme provençal qui présentait cette particularité de manger les plumes de son chapeau lorsqu’il était en colère… Il était néanmoins fort aimé des dames. « Monsieur le duc, son maître, nous dit Pierre de l’Estoile, lui portait une amitié et une faveur extraordinaires ; au contraire, il était haï et mal voulu du roy pour quelques particularités fondées plus sur l’amour que sur la guerre, étant ce gentilhomme meilleur champion de Vénus que de Mars ; au reste, grand superstitieux, grand messier et grand putier (comme disaient les huguenots). Comme à la vérité il ne se contentait d’une messe tous les jours, ainsi en oyait-il trois ou quatre ; et quelquefois cinq et six, même au milieu des armées, chose rare à ceux de sa profession : et lui a-t-on ouï dire que, s’il y eût failli un jour, il eût pensé être damné. Le reste du jour et de la nuit, il l’employait à l’amour, ayant cette persuasion que la messe ouïe dévotement expiait tous les péchés et paillardises qu’on eût su commettre ; de quoi le feu roy, bien averti, a dit souvent en riant que qui voulait tenir registres des débauches de La Mole, il ne fallait que compter ses messes [18] . »
    Ce dévot lubrique était fait pour s’entendre avec Marguerite qui passait elle-même facilement de l’église à l’alcôve et allait se coucher près de ses amants, les cheveux encore imprégnés d’encens…
    Un jour, il la rencontra, moulée dans une robe de brocart, le corsage ouvert, laissant voir cette gorge « pleine et charnue dont mouroient tous les courtisans » [19] et il en tomba immédiatement amoureux…
    Si amoureux qu’il se défia de lui-même et se persuada qu’une intervention céleste pouvait seule lui faire obtenir les faveurs de Marguerite. Alors il eut l’idée curieuse – paradoxale, il faut l’avouer – de s’adresser pour cela à la Sainte Vierge…
    Pendant des jours, il égrena avec rage des chapelets, sans autre résultat qu’un durillon au bout de l’index. Dégoûté, il décida de s’adresser au démon et demanda à Cosimo Ruggieri, magicien de Catherine de Médicis, d’envoûter Marguerite.
    Cosimo modela une statuette de cire à la ressemblance de la princesse, lui plaça une couronne sur la tête et lui piqua l’emplacement du cœur avec un pépin de raisin en récitant une formule en hébreu…
    Certain de la puissance de ce charme, La Mole, dès le lendemain, se présenta avec un air avantageux devant Marguerite. La volcanique reine de Navarre avait remarqué Boniface depuis longtemps. Séduite par ce bel homme, elle avait senti s’allumer en elle une espèce de feu « qui lui embrasait le bijou », et elle attendait avec impatience qu’il voulût bien lui faire un signe…
    Ce jour-là, il se permit un regard un peu insistant. L’effet dépassa ses espérances. Marguerite bondit sur lui, le prit par la main et le traîna dans sa chambre où leurs amours furent si peu discrètes que, deux heures plus tard, toute la cour savait que la reine de Navarre avait un amant de plus.
    Charles  IX en fut avisé aussitôt. La nuit suivante, malgré son état, il se posta dans un escalier en compagnie de Henri de Guise, ex-amant de Marguerite, et attendit, l’épée à la main, avec l’intention de tuer La Mole ; mais personne ne parut. Informé sans doute des desseins du roi, le galant passa la nuit entière chez la reine de Navarre…
     
    À la mi-février, les Montmorency étaient prêts à passer à l’action. Il fut alors convenu que le sieur Guitry-Bertichères, accompagné de deux cents cavaliers, attaquerait le château de Saint-Germain-en-Laye le jour du Mardi Gras et enlèverait le roi de Navarre et le duc d’Alençon.
    La Mole devait naturellement participer à cette affaire et en éprouvait une grande vanité. Sur l’oreiller, il ne put s’empêcher de parler à Marguerite du complot qui se préparait et du rôle important qu’il allait y jouer avec un de ses amis nommé Coconas, amant de la duchesse de Nevers.
    Marguerite fut effrayée. Étant fille de roi, elle savait que tout désordre portait préjudice à la couronne. Malgré son amour pour La Mole, elle alla prévenir Catherine de Médicis qui envoya des gardes chercher le duc d’Alençon. Celui-ci arriva en pleurant,

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