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Dans l'ombre de la reine

Dans l'ombre de la reine

Titel: Dans l'ombre de la reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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s’associer contre l’ennemi commun. Et le pire…
    Lady Catherine déclara ce que je pensais en mon for intérieur. Elle possédait un peu de la ruse des Tudors, après tout. Elle avait discerné le seul argument susceptible de la sauver :
    — Si cela devient un jour public, si l’on divulgue que Lady Dudley a bien été assassinée, personne ne croira que la reine et Dudley n’étaient pas du complot. Et si l’on nous envoie tous à la Tour ou bien…
    — Si l’on vous pend ? soufflai-je obligeamment.
    Je n’avais jamais détesté William Johnson et ses amis autant que cette vipère. Elle étouffa un cri et se remit à pleurer, mais je restai de marbre.
    — Que disiez-vous ? Même si vous, Smith, Derby, Verney, Holme et Forster êtes arrêtés, voire exécutés… ?
    — Ne prononcez pas ce mot-là ! implora-t-elle d’une voix stridente. Vous ne comprenez donc pas ? Si nous sommes tous accusés, l’histoire se répandra. Chacun pensera que nous sommes des boucs émissaires, et le scandale sera bien pire !
    Je me remémorai une fois encore les paroles d’Amy. Les gens ordinaires, dans les tavernes et autour des puits, n’usaient pas de raisonnements compliqués. Ces gens chercheraient aussitôt l’explication la plus simple et évidente. Et aussi la plus croustillante.
    Amy avait vu juste, et Catherine disait vrai.
    Néanmoins, je ne la laisserais pas puiser du réconfort dans cette idée. Comme quelqu’un qui tire la couverture d’un paresseux par un matin glacial, je déclarai d’un ton guindé :
    — Je ne peux garder tout cela pour moi. Je dois parler à Sir Cecil, et la reine sera certainement informée.
    Sur ce, je sortis.
    En fermant la porte, je l’entendis éclater en sanglots de terreur qui ne m’inspirèrent pas de pitié. Sans la conspiration où cette sotte s’était compromise, John Wilton eût encore été en vie.
    Et chaque fois que je pensais à Matthew, moi aussi j’avais envie de pleurer, plus fort encore que Catherine. Moi aussi je méritais la compassion, et je n’avais pas machiné de meurtre.

CHAPITRE XVIII

Un instinct face au complot
     
    Rares étaient ceux qui se voyaient admis, seuls, en présence de la reine, pourtant elle m’avait convoquée dans une petite pièce, au bout d’une galerie dans ses appartements de Windsor. Cette pièce était peu meublée : une commode, une chaise et quelques coussins sur la profonde banquette attenante à la fenêtre. Quand Élisabeth souhaitait s’entretenir avec quelqu’un seule à seul, elle disposait pour ce faire, dans chaque palais, d’endroits semblables à celui-ci. Il suffisait d’ouvrir la porte pour appeler, sinon nous ne pourrions être entendues à moins de hurler.
    J’étais retournée auprès de Cecil et je lui avais relaté mon entretien avec Lady Catherine, après quoi nous étions allés, ensemble, en aviser Élisabeth. J’avais eu la surprise, quelques jours plus tard, d’être ainsi convoquée. Peu après, elle tiendrait une audience publique à laquelle j’assisterais parmi ses dames d’honneur, aussi étions-nous vêtues avec apparat, quoique selon des styles opposés. J’étais en velours noir, non plus à cause de mon deuil mais pour mettre en valeur les manches de soie que j’avais mis tout l’été à confectionner. Élisabeth était en soie pêche couverte de broderies, sa taille fine serrée dans un large vertugadin espagnol, son menton pointu encadré, comme le mien, par une fraise blanche, quoique la sienne fût plus grande.
    Nous offrions par ailleurs un autre contraste car, pendant que j’étais assise, les mains serrées sur mon giron, Élisabeth allait et venait en dépit de sa lourde robe. La fenêtre donnait sur les collines verdoyantes et paisibles du Berkshire. L’état d’esprit de la reine n’aurait pu moins s’accorder avec le paysage.
    — Cette misérable a raison, bien entendu ! Chacun imaginerait le pire. Les trois meurtriers de votre John Wilton ont été arrêtés et votre oncle se repent de sa stupidité à la Tour, mais les assassins d’Amy Dudley ne pourront jamais être châtiés. Du moins, pas de manière officielle !
    Elle fit volte-face dans un froissement de soie. Son visage, pâle d’ordinaire, était empourpré par une rage qui m’effraya, bien qu’elle ne fût pas dirigée contre moi. Nous mesurions à peu près la même taille, mais telle était la force de caractère d’Élisabeth qu’elle paraissait toujours beaucoup plus grande

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