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Dans l'ombre de la reine

Dans l'ombre de la reine

Titel: Dans l'ombre de la reine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Fiona Buckley
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parce qu’il avait découvert leurs agissements. Après les avoir poursuivis dans toute la région, j’apprends non seulement que Johnson vit à Withysham, mais qu’il dîne ici ! Vous avez convié un meurtrier à votre table, Oncle Herbert !
    — Je ne sais rien de tout cela, mais si tu dis vrai, ma foi, de tels accidents peuvent se produire lorsqu’on œuvre à une noble cause. La sécurité du grand nombre dépend, hélas, de la disparition d’un seul, soupira-t-il d’un air de regret peu convaincant.
    Je m’appuyais contre le bureau, les genoux tremblants. Je m’étais laissé emporter par la colère. J’avais baissé la garde parce que… Eh bien, parce que c’était Faldene, où j’avais grandi et que j’avais connu mon oncle toute ma vie. Je ne l’aimais pas, et lui non plus du reste, néanmoins, quoique à contrecœur, ma tante et lui m’avaient élevée. Comme les sourcils épais, un sens solide de la famille caractérisait les Faldene et je l’avais reçu en partage. Je ne l’avais pas cru capable de me faire du mal. J’en étais moins certaine, tout à coup.
    — Ainsi vous… cautionnez le meurtre ?
    — Je désire voir le pays revenir à la vraie foi, sous l’autorité d’une reine catholique.
    C’était une réponse pour le moins évasive.
    — La reine Marie est morte. C’est Élisabeth qui occupe le trône, à présent.
    — Pour l’instant, mais pas pour toujours, répliqua mon oncle avec un petit rire qui montait de sa poitrine. Surtout si elle cède à son désir concupiscent pour son Maître des écuries, ce qui semble très probable. D’ici là, je dois décider ce que nous allons faire de toi.
    Il se tut. À la lumière de la chandelle, il me scruta et dit enfin :
    — Qu’as-tu jamais été dans cette maison, hormis le symbole de la disgrâce de ta mère ? Vas-tu maintenant signifier la ruine de toutes nos espérances ?
    De nouveau, il garda le silence. Le cœur battant à tout rompre, j’étais partagée entre le désir de fuir et celui de me battre. Étais-je vraiment en danger ? Je me demandai si je pouvais m’emparer du chandelier ou de l’encrier pour m’en servir d’arme, mais ils étaient hors de ma portée.
    Le silence fut rompu par l’arrivée d’une troisième personne, munie elle aussi d’une chandelle.
    — Herbert ? dit Tante Tabitha. Vous disiez que quelqu’un était entré dans votre bureau. Ne vous voyant pas revenir, je… Ursula !
    — Elle examinait mes comptes, lui dit-il. Elle se figure que c’est son affaire, si nous contribuons à la cause de notre foi.
    — C’est mon affaire ! affirmai-je, retrouvant ma voix. Vos collecteurs ont assassiné mon serviteur.
    — De quoi parle-t-elle ? demanda Tante Tabitha.
    Oncle Herbert le lui expliqua. Ma tante, en robe de chambre gris perle et bonnet de nuit blanc, me toisa avec fureur.
    — Ton serviteur n’a rien à voir avec nous. Comment oses-tu espionner et fourrer ton nez dans les comptes de ton oncle ? Tu n’as jamais été qu’une ingrate, mais pour le coup…
    — Là n’est pas la question, dit Oncle Herbert. Bien sûr qu’elle n’est qu’une ingrate, rien de nouveau à cela. La différence, c’est qu’elle est maintenant en mesure de nous nuire. Nous avons réchauffé un serpent dans notre sein.
    — Je suis dame d’honneur de la reine, répliquai-je. On m’attend à la cour. Si je ne me présente pas, on procédera à une enquête.
    Ma tante fronça les sourcils et pinça les lèvres.
    — Je pense, Herbert, que nous avons besoin d’un conseil. Quant à moi, je ne souhaiterais pas faire du mal à cette malheureuse. Elle est notre nièce, quelle que soit la noirceur de son âme. Enfermons-la à double tour le temps de consulter Withysham en la matière.
    « Withysham ! » pensai-je, sentant croître ma panique. Withysham, où habitaient William Johnson et les meurtriers de John Wilton !
    — Dès lors, son sort ne reposerait plus entre nos mains, approuva Oncle Herbert, pensif.
    Je m’étonnai, non pour la première fois, de l’étrange et délicat équilibre des pouvoirs entre ces deux-là, et aussi des singuliers accommodements de Tante Tabitha avec sa conscience. On n’étouffe pas les bébés illégitimes, on les élève comme des domestiques. On aime Dieu, et l’on est prêt à infliger la mort la plus atroce à quiconque ne partage pas ses opinions sur d’infimes points doctrinaux. On n’étrangle pas une nièce encombrante, on la livre

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