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De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires

De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires

Titel: De Gaulle Intime : Un Aide De Camp Raconte. Mémoires Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: François Flohic
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Général invite pour un week-end Emmanuel d’Harcourt qu’il tient à remercier de sa sollicitude. Nommé par le Général à son poste, sans doute d’Harcourt s’autorise-t-il de sa qualité d’ambassadeur pour l’interroger sur sa politique étrangère. Après son départ, Mme de Gaulle me dit :
    — Le Général a fait, bien volontiers, de longs exposés à l’ambassadeur. Cela l’a beaucoup fatigué. Et puis tout cela est terminé. Il ne faut pas retourner le couteau dans la plaie.
    Ce que je me garde naturellement de faire, me cantonnant dans de simples évocations historiques qui alimentent la conversation pendant les repas. Il est principalement question des entreprises de la Marine française d’autrefois – royale, révolutionnaire, impériale.
    Lors de la promenade dans la baie de Bantry, où s’est tenue l’expédition avortée de Hoche en décembre 1796, le Général me reproche presque, en tant que marin, de n’avoir pu assurer à Bonaparte les vingt-quatre heures de maîtrise de la Manche qui lui étaient nécessaires pour envahir l’Angleterre à partir du camp de Boulogne.
    Il me faut défendre vigoureusement mes lointains « compagnons d’armes » – sans d’ailleurs prétendre que nous aurions pu mieux faire – par l’exposé des faiblesses de notre Marine par rapport à celle de nos adversaires : on ne peut rien contre le fait qu’ils habitent une île, que la Marine constitue la force sur laquelle repose leur sécurité – ce qui ne sera jamais le cas de la France. D’où les illusions de Napoléon, qui croit pouvoir tout plier à sa volonté et à ses plans. Il s’efforce d’assurer la concentration de ses flottes en Manche par des marches et contremarches, comme il fait avec succès sur le continent avec ses armées. Mais notre flotte aurait-elle échappé par miracle à la surveillance des frégates ennemies que nous aurions trouvé toute la Marine anglaise rassemblée sur notre route à l’entrée de la Manche, à cause des ordres judicieux qui lui avaient été donnés. La conséquence des ordres comminatoires de l’Empereur à Villeneuve aura été la défaite de Trafalgar et notre infériorité sur mer.
    J’ose même prétendre que, si Napoléon avait conquis l’Angleterre, la question de ses rapports avec la France n’aurait pas été réglée pour autant. Guillaume le Conquérant avait bien régné sur le pays, dont les Angevins en l’affermissant avaient fait un rival du nôtre. Peut-être en aurait-il été de même de la conquête de Napoléon ?
    Je crains que mes arguments n’aient pas convaincu le Général, car il revient plusieurs fois sur le sujet, tel un regret que rien ne peut chasser ni amoindrir. Il est perceptible qu’il déplore de n’avoir pu faire en sorte que la candidature de la Grande-Bretagne au Marché commun ne soit définitivement écartée, au moins à vue d’homme. Il sait bien que, lui parti, son entrée n’est plus qu’une question de temps ; il pressent, il craint, que la participation de l’Angleterre à l’entreprise européenne n’apporte des ferments de division et n’en dénature les perspectives. Cela paraît l’obséder, et il revient, presque dans les mêmes termes, sur ce qu’il m’a dit en 1968 à propos de l’Angleterre.
    — Dans le présent, sa situation n’est pas brillante. On ne peut compter sur elle. Voyez ce pauvre Macmillan : lorsque je suis allé chez lui à Birch Grove, il m’a supplié de sauver la fusée Blue Streak, dont ils n’avaient pas l’utilisation, pour en faire le lanceur européen. Aussitôt après mon départ, il s’est entendu avec Kennedy pour acheter la fusée américaine Polaris, trahissant ainsi l’amorce d’une coopération dans un domaine capital pour la défense de l’Europe. Aujourd’hui, voici les Anglais engagés avec les Hollandais et les Allemands dans le procédé d’enrichissement de l’uranium par ultracentrifugation, ce qui pourrait permettre à ces derniers de disposer de matières fissibles propres à la confection de bombes, ce que nous ne devons jamais tolérer.
    Ainsi, nous échangeons des considérations sur les stratégies navales et terrestres, sur les événements historiques, parfois sur son destin. Rien qui se rapporte à l’actualité. Notamment, rien sur la campagne présidentielle en France, qui met en lice Georges Pompidou et Alain Poher.
    Un soir au dîner, c’est lui qui aborde le sujet. Il vient de prendre les nouvelles sur

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