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Dernier acte à Palmyre

Dernier acte à Palmyre

Titel: Dernier acte à Palmyre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Lindsey Davis
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partir, murmurai-je. J’ai simplement voulu me mettre à l’abri de la pluie.
    — À d’autres ! Tu n’as pas envie que ta bien-aimée entende dire que tu te trouvais confiné dans un chariot avec la femme du directeur.
    J’avais fait mine de me lever, je me laissai retomber à ma place. Par simple politesse. Elle paraissait quinze ans de plus que moi, mais pouvait être encore plus âgée. Phrygia me gratifia de son rire amer.
    — Consoler la troupe est mon privilège, Falco. Je suis la Mère de la Compagnie !
    Je ris avec elle, comme il se devait. Je me sentais étrangement menacé, me demandant brièvement si accepter les consolations de Phrygia était une obligation pour tous ses collègues masculins.
    — Ne te fais pas de souci pour moi. Je suis un grand garçon.
    — Vraiment ? (Elle prononça ce mot sur un tel ton que je me sentis rapetisser mentalement.) Alors, que penses-tu de cette première expérience ? me provoqua-t-elle.
    — Disons que je commence à comprendre pourquoi Heliodorus avait tourné le dos à la société !
    — T’en fais pas, tu apprendras vite, me consolat-elle. Commence par ne plus écrire des trucs trop littéraires. Et ne perds pas non plus ton temps à glisser des allusions politiques. Tu n’es pas ce putain d’Aristophane, et les gens qui achètent les billets ne sont pas des Athéniens éduqués. On joue pour des navets ! S’ils viennent au spectacle, c’est seulement pour avoir l’occasion de parler avec leurs cousins en pétant à qui mieux mieux. Alors ce qu’il faut leur offrir, c’est un maximum d’action et des plaisanteries bien grasses. Et tu peux nous faire confiance pour ça. On a tous assez de métier. Ton boulot à toi, c’est de tisser un canevas. Et n’oublie surtout pas : des tirades courtes et pas de mots à rallonge.
    — Oh ! et moi qui croyais que j’allais traiter des thèmes majeurs de la désillusion sociale, de l’humanité, de la justice !
    — Oublie les thèmes majeurs. Traite de la vieille jalousie et des jeunes amours.
    En somme, il n’y avait pas une grosse différence avec mon boulot de détective privé.
    — Je suis vraiment idiot !
    — Quant à Heliodorus, poursuivit Phrygia, c’était vraiment un sale bonhomme.
    — Quel était son problème ?
    — Junon seule le sait !
    — Est-ce qu’il s’était fait un ennemi en particulier ?
    — Non, il était équitable. Il haïssait tout le monde.
    — Et tout le monde le haïssait pareillement ? Et toi, Phrygia ? Quel genre de relations avais-tu avec lui ? Je pense que sa petitesse n’atteignait pas une actrice de ta valeur ?
    — Ma valeur… murmura-t-elle amèrement. (Je restai parfaitement immobile et silencieux.) J’ai eu mes chances. On m’a même offert de jouer Médée à Épidaure…
    Il devait y avoir au moins dix ans, mais je ne mettais pas sa parole en doute. Ce soir, dans le rôle court de la prêtresse, elle nous avait offert un bel aperçu de son talent.
    — J’aurais aimé voir ça. Je t’imagine très bien en train de te déchaîner contre Jason et de massacrer les enfants… Pourquoi ça ne s’est pas fait ?
    — J’ai épousé Chremes.
    Et elle ne le lui avait sans doute jamais pardonné. Mais j’ignorais quelles autres crises avaient pu jalonner et envenimer leurs relations. En outre, mon travail m’avait appris depuis longtemps à ne pas porter de jugement sur un mariage.
    — Heliodorus savait que tu avais dû refuser cette Médée ?
    — Bien sûr.
    Elle s’exprimait calmement. Sachant cela, je pouvais imaginer l’usage qu’il avait pu en faire. D’ailleurs, sa retenue dissimulait mal un monde de tourments.
    Mais c’était une excellente actrice. Alors qui sait si elle n’était pas en train de me jouer un numéro ? Peut-être Heliodorus et elle avaient-ils été des amants passionnés ? Ou peut-être qu’elle avait eu envie de lui et qu’il l’avait repoussée ? Elle avait ensuite organisé sa noyade… Heureusement qu’Helena n’était pas présente pour se moquer avec mépris de ces théories simplistes. Pour le moins.
    — Alors, est-ce que tu peux m’expliquer pourquoi Chremes le gardait ?
    Même si son mari et elle n’abordaient plus de sujets intimes dans leurs conversations, je demeurais persuadé qu’ils discutaient ensemble des problèmes de la troupe. C’était probablement le seul lien qui leur restait.
    — Chremes a le cœur trop tendre pour renvoyer quelqu’un. (Elle m’adressa un grand sourire.) Et beaucoup de gens

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