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Des Jours sans Fin

Des Jours sans Fin

Titel: Des Jours sans Fin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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par cinq et on les emmena à gauche de l’entrée. Pendant ces divers mouvements, arriva l’adjoint au commandant du camp Bachmayer. Il poussa divers hurlements, brandit sa matraque, frappa un certain nombre de détenus. On laissa les prisonniers debout. Il faisait terriblement froid. Vallée dit à de Dionne : « Je crains que cela ne se termine très mal. » C’était aussi l’avis de Dionne. La souffrance faisait hurler les détenus. Les S.S. alors allèrent chercher des lances à eau et arrosèrent le groupe avec de l’eau froide. Vallée dit encore : « C’est la dernière absolution. » La nuit tomba peu à peu. On les fit alors se placer entre la lingerie et le mur extérieur du camp, où se trouvait d’ailleurs un mirador. La nuit venue, le froid augmenta. Dionne l’évalua à moins 15°. Bientôt Le Dref mourut. D’autres hommes tombèrent ; ils tournaient d’abord sur eux-mêmes, puis tombaient. Les rangs s’éclaircissaient.
    Beaucoup d’entre les Russes et les Polonais qui formaient la majorité du groupe parlaient allemand. L’un des S.S. dit à un Russe : « Il nous faut un certain nombre de morts. » Des Russes et des Polonais pensèrent sauver leur vie en tuant un certain nombre de voisins et en fournissant ainsi aux S.S. les morts dont ils avaient besoin. Ils attaquèrent donc aussitôt en essayant de tuer les voisins en les écrasant contre le mur. C’est ainsi que de Dionne fut violemment poussé contre le mur et blessé à l’épaule, à la hanche et la fesse. Malgré la douleur très vive, il réagit et étrangla le Polonais. Cette réplique énergique intimida les autres qui ne s’attaquèrent plus à lui. Quelques cadavres gisaient par terre. Non loin, sur un tas de sable, les enfants assis pleuraient. Ils moururent de froid. Au fur et à mesure que passaient les heures, des hommes tombaient, morts, d’autres hurlaient. Ces hurlements furent parfaitement entendus des blocks du camp de Mauthausen. Les déportés qui étaient occupés à la lingerie virent très bien le groupe nu, tout près lxxxv .
    — Vers 11 heures du soir, ce qui restait du groupe (il y avait peut-être déjà cent cinquante morts) fut emmené aux douches. Il y eut un court moment d’espérance. Le Durgeon crut que le martyre était fini… Il ne faisait que commencer. À l’entrée, Bachmayer vint offrir un revolver à un prisonnier en lui disant de se tuer. Comme il refusait, l’Allemand l’abattit d’une balle dans la tête.
    — Quand tous les détenus furent entrés dans les douches, on jeta sur eux de l’eau glacée. On avait pris soin de fermer les évacuations d’eau : elle monta et atteignit bientôt 50 centimètres. Ceux qui tombaient se noyaient. Il était impossible de grimper sur la marche surélevée qui entourait la pièce car les S.S. l’occupaient. La douche dura vingt minutes environ. On fit sortir les déportés ruisselants : ils furent saisis par le froid, l’eau gelait sur eux ; beaucoup tombèrent sur l’escalier, morts. Les autres furent emmenés près du mirador. Ils étaient peut-être encore deux cents à deux cent cinquante… Vers 2 heures du matin, on les ramena aux douches et la même scène recommença : eau glacée pendant vingt minutes, sortie dans le froid, morts tombant dans l’escalier… Encore une fois, ils furent ramenés près du mirador. Étaient-ils deux cents, cent quatre-vingts ?…
    C’étaient les plus résistants, évidemment, et on en vit moins tomber, brusquement, de froid. Parmi les survivants, se trouvaient de Dionne, l’abbé Vallée et Le Durgeon.
    — Le jour se leva (17 février) ; alors arrivèrent trois S.S., grands, forts, munis d’énormes gourdins, gros comme le bras et très longs. Ils séparèrent en deux le groupe des survivants, 10 mètres l’un de l’autre. Ils ordonnèrent aux détenus de se mettre à courir au coup de sifflet, d’un mur à l’autre, en se croisant au milieu. Ils se placèrent entre les deux groupes. Quand les détenus, en courant, passaient près d’eux, ils les frappaient à la tête à coups de gourdin. À chaque passage, plusieurs morts tombaient. De temps en temps, ils arrêtaient la course pour permettre à une charrette, poussée par un kommando de prisonniers allemands, de transporter les morts au crématorium.
    — À l’un de ces arrêts, les trois S.S. partirent puis revinrent avec des haches : ils recommencèrent à donner des coups de sifflet et à faire courir les

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