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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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le temps pantoute de penser à ça.
     
    — Il faut le
prendre, le temps, la sermonna Annette. C'est important. Oublie pas que t'es
une mère de famille et que t'as à élever tes enfants comme il faut. Pour
Denise, si tu veux pas t'en occuper, je vais l'amener avec moi à l'église, mais
c'est plus ton rôle que le mien de faire ça.
     
    — Non, vous avez
raison. Je vais y aller.
     
    — Tout en
marchant avec la petite, aide-la donc à choisir sa pénitence... et choisis
aussi la tienne, en même temps, ajouta Annette avec un petit sourire moqueur.
     
    Quelques minutes
plus tard, Laurette quitta l'appartement d'un pas résigné, la petite main de sa
fille dans la sienne. Elle se serait bien passée de cette sortie à l'église en
plein milieu de la semaine. Mais comment échapper à la surveillance de sa mère?
Devant elle, elle se sentait souvent redevenir une petite fille.
     
    Après
l'imposition des Cendres, qui lui avait paru interminable, elle discuta avec sa
fillette sur le chemin du retour.
     
    — T'es devenue
une grande fille, lui dit-elle. L'année prochaine, tu vas faire ta première
communion. Pendant le carême, on fait toujours une promesse qu'on essaye de
     
    tenir jusqu'à
Pâques. Qu'est-ce que tu dirais si on se privait de sucré toutes les deux ?
     
    Denise accepta
sans protester et Laurette, fière d'avoir rempli correctement son rôle de mère
chrétienne, rentra à la maison, persuadée d'entreprendre le carême du bon pied.
     
    Ce soir-là,
Gérard ne parvint à avoir la paix qu'après être lui aussi allé recevoir les
Cendres. A son retour de l'église, sa femme l'attendait dans la cuisine.
     
    — Denise et moi,
on mangera pas de sucré jusqu'à Pâques, lui annonça-t-elle. Toi, qu'est-ce que
tu promets?
     
    — Je te le dis
pas.
     
    — Envoyé !
Dis-le, lui ordonna-t-elle, mi-sérieuse.
     
    — Je trouve que
ça te regarde pas pantoute, protesta son mari, poussé dans ses derniers
retranchements.
     
    — Je te connais,
Gérard Morin, fit sa femme en élevant la voix. T'as rien promis, c'est ça, hein
?
     
    — J'ai promis de
pas fumer à partir de demain, dit Gérard, à contrecœur. T'es contente là ?
     
    — Tu vas être
capable de tenir quarante jours sans fumer, toi?
     
    — Certain,
affirma Gérard. C'est ça que t'aurais dû promettre, toi aussi.
     
    — Je fume pas
assez pour que ce soit un vrai sacrifice qui en vaille la peine, rétorqua
Laurette, l'air convaincu.
     
    Gérard n'ajouta
rien, mais tout dans son comportement indiquait qu'il n'en croyait rien. En
toute honnêteté, Laurette avait bien caressé durant un bref moment l'idée de se
priver de tabac pendant le carême, mais la seule idée de ne pouvoir allumer une
cigarette pour accompagner sa tasse de thé ou pour clore un repas l'avait fait
reculer. Elle avait mille fois préféré choisir de se priver de dessert.
     
    — Oublie pas que
c'est toi et la petite qui mangerez pas de sucré. Moi, j'ai pas à pâtir de votre
promesse durant le carême, lui rappela Gérard, moqueur.
     
    — Inquiète-toi
pas. Tu vas toujours avoir de la mélasse et des biscuits Village dans
l'armoire.
     
    En ce début
d'avril 1939, l'humeur du curé Crevier était aussi maussade que la température
extérieure. Il pleuvait depuis près d'une semaine et cela le déprimait.
     
    — Moi, quand je
lui vois cette tête-là, dit Eugénie Gagnon à la ménagère en claquant la porte
de sa cuisine, je le battrais. Il arrête pas de chialer depuis deux jours. Ma
foi du bon Dieu, on dirait qu'il prend plaisir à trouver des bibittes partout.
     
    — De qui vous
parlez, madame Gagnon ? lui demanda la ménagère, assise au bout de la table, en
train de finir de dîner.
     
    — De monsieur le
curé, avoua la cuisinière à mi-voix.
     
    Amélie Dussault
poussa un soupir d'exaspération. Elle aussi en avait assez de supporter les
sautes d'humeur de tout un chacun au presbytère. Si le curé Crevier ne cessait
pas de critiquer tout ce qu'elle faisait. S'il n'arrêtait pas, elle allait
partir et il devrait se débrouiller pour trouver une autre ménagère. Il y avait
tout de même une limite à être exigeant !
     
    — Qu'est-ce qu'il
y a encore ? murmura Amélie.
     
    — Je lui ai
demandé si vous pouviez encore engager madame Morin pour le ménage de
printemps. Il a pas voulu. Il trouve qu'il se dépense trop d'argent ici dedans.
Il a même eu le front de me dire qu'on gaspillait trop en nourriture au
presbytère ! Avez-vous

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