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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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massivement eh faveur de la conscription.
Cependant, au Québec, plus de soixante-douze pour cent des gens votèrent
contre. Même si on traita les Canadiens français de peureux et de traîtres à
travers tout le pays, le mouvement contre la conscription prit encore plus
d'ampleur dans la province, ce qui n'empêcha pas King de la décréter.
     
    Le lendemain
soir, toute la famille se rassembla chez Honoré Brûlé, rue Champagne. Les adultes
étaient si nerveux qu'ils parlaient tous en même temps.
     
    — J'en.ai discuté
avec Bernard, fit Armand. On a décidé d'aller se cacher chez mon oncle Adrien,
à Saint-Guillaume. Il a une cabane à sucre en plein bois. On peut rester là un
bon bout de temps.
     
    — Comment
Marie-Ange, Pauline et Louise vont vivre pendant que vous allez être cachés ?
demanda Laurette. Ça risque de durer pas mal longtemps, cette histoire-là.
     
    — C'est ça le
problème, admit son frère cadet.
     
    — Toi, Gérard,
qu'est-ce que tu vas faire ? demanda Armand. v
     
    — Je le sais pas
encore. J'ai cinq enfants à nourrir, moi. Je peux pas les laisser comme ça pour
aller me cacher.
     
    — Oui, mais tu
seras pas ben ben plus utile si tu vas te faire tuer pour rien, rétorqua
vivement Laurette dont les yeux rougis laissaient à penser qu'elle n'avait pas
beaucoup dormi la nuit précédente. Tu devrais faire comme mes frères et aller
te cacher, toi aussi. Je me débrouillerai avec les enfants.
     
    — Moi, à votre
place, j'arrêterais de m'énerver, déclara Honoré sur un ton pondéré en allumant
sa pipe. Attendez donc votre convocation par l'armée. En 1917, il a fallu
attendre un bon bout de temps avant de recevoir la lettre qui nous obligeait à
nous présenter à l'examen médical. L'armée fera pas rentrer tout le monde en
même temps. Ça devrait nous donner le temps de trouver un moyen.
     
    — Un moyen ?
demanda Gérard.
     
    — Un moyen de pas
y aller, compléta son beau-père. Tu t'imagines tout de même pas que tous ceux
qui ont été appelés y sont allés en 1917. Il y en a qui ont été assez fins pour
s'inventer toutes sortes de maladies. Moi, je suis resté parce que j'ai les
pieds plats, mais je connais deux ou trois gars qui travaillent à la glacière
qui sont pas allés se battre parce qu'ils ont toujours dit qu'ils avaient
trouvé un moyen
     
    de pas aller dans
l'armée. Je vais leur parler et on va ben voir si c'est juste des vantardises,
leur affaire.
     
    Cette mise au
point d'Honoré sembla calmer un peu les jeunes couples, mais l'inquiétude
demeura tout de même palpable pendant toute la soirée.
     
    Durant les jours
suivants, Laurette et son mari ne reçurent aucune nouvelle d'Honoré. De toute
évidence, il n'était pas parvenu à arracher leur secret à ses compagnons de la
glacière. Au fil du temps, la tension monta progressivement chez les Morin, au
point qu'elle en devenait presque insupportable.
     
    Impatient, Gérard
se décida à aller rendre une courte visite à son beau-père. Il apprit alors que
les compagnons d'Honoré lui avaient révélé avoir évité l'enrôlement en 1917 en
allant se cacher près de la frontière américaine quand Borden avait imposé la
conscription. Ce soir-là, démoralisé, le père de famille revint à la maison en
se demandant comment il allait apprendre la nouvelle à sa femme.
     
    — Tu vas faire la
même chose que mes frères, déclara cette dernière sur un ton décidé. T'iras pas
te faire tuer pour rien, certain !
     
    Déjà, des
camarades de travail de Gérard, à la Dominion Rubber, avaient reçu leur
convocation à l'examen médical et certains n'étaient pas revenus à l'usiné*.
     
    Le mois de mai
s'écoula lentement, apportant des jours de plus en plus chauds. Les lilas, qui
fleurissaient en grand nombre dans la cour du presbytère, embaumaient l'air
quand Laurette passait chaque soir, un peu avant sept heures, avec Jean-Louis
et Denise. Depuis le début du mois, tous les trois participaient avec ferveur à
la récitation du chapelet à l'église Saint-Vincent-de-Paul, priant pour que
Gérard soit épargné.
     
    Un mardi matin,
Laurette trouva pourtant une enveloppe dans la boîte aux lettres. Quand elle
découvrit qu'il
     
    s'agissait de la
convocation à un examen médical adressée à son mari, son cœur eut un raté et
elle dut s'asseoir un long moment pour retrouver ses esprits. Elle avait eu
beau s'y attendre, le choc était brutal. Pendant tout le reste de la journée,
elle

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