Des rêves plein la tête
mauvais coup à l'école, tu vas avoir une claque sur les oreilles.
Elle sursauta
quand la porte d'entrée s'ouvrit à nouveau.
— Bon. Vlà autre
chose à cette heure ! s'exclama-t-elle en voyant un Jean-Louis furieux entrer
dans la cuisine.
— Te v’là, toi,
fit l'aîné en apercevant son jeune frère près de la porte moustiquaire.
Qu'est-ce que tu fais là ?
— Il paraît que
l'école est finie, s'interposa sa mère. Je t'avais dit de t'occuper de ton
frère quand l'école finirait.
— Elle est pas
finie pantoute l'école, m'man. Il s'est sauvé pendant la récréation, le petit
maudit, s'emporta Jean-Louis en esquissant le geste de flanquer une taloche à
son frère. Ils l'ont cherché partout dans l'école. Le directeur était pas de
bonne humeur. Il est venu me chercher dans ma classe et il veut que je le
ramène tout de suite. Envoyé, les oreilles ! ???Vens-t'en. J'espère que le
bonhomme va t'en sacrer une.
— M'man, je veux
pas retourner là, dit le gamin de six ans d'une voix suppliante. J'haïs ça,
l'école. La maîtresse est bête et elle arrête pas de crier après nous autres.
— Toi, mon agrès,
disparais à l'école et fais ça vite ! s'écria sa mère, mécontente. Si jamais tu
te sauves encore une fois, c'est à moi que tu vas avoir affaire et je te
garantis que les fesses vont te chauffer ! Et reviens pas tout seul, surtout !
Richard suivit
son frère avec une mine de condamné. Il sortit de la maison en rechignant.
Debout sur le pas de la porte, Laurette regarda ses deux fils se diriger vers
la rue Fullum en éprouvant un peu de pitié pour le cadet.
— Dis-moi pas que
je vais en avoir un autre qu'il va falloir forcer à étudier tous les soirs, se
dit-elle à voix basse. Qu'est-ce que j'ai fait au bon Dieu pour avoir des
enfants qui aiment pas plus l'école que ça ?
Il fallait
reconnaître que seul Gilles semblait se plaire à fréquenter l'école et à
étudier. Denise et Jean-Louis étaient des écoliers sages, mais détestaient
l'école parce qu'ils étaient peu doués pour les études. Richard était peut-être
talentueux, mais son premier contact avec le monde scolaire laissait présager
des jours agités.
La mère de
famille s'était bien doutée que l'arrivée à l'école Champlain de son fils cadet
ne se ferait pas sans susciter quelques vagues, et elle ne s'était pas trompée.
Dès le troisième
jour de classe, elle vit revenir Gilles et Jean-Louis seuls, à la fin de
l'après-midi.
— Où est passé
votre frère? leur demanda-t-elle, mécontente de constater qu'ils l'avaient
laissé revenir seul de l'école.
— Il est en
retenue, m'man, dit Gilles en déposant son sac d'école sur la table.
— Comment ça ?
— J'ai demandé à
un petit dans sa classe, il m'a dit que sa maîtresse est enragée après lui
parce qu'il a pas encore fait couvrir ses livres, expliqua Jean-Louis.
— Mais il m'a dit
que c'était elle qui voulait pas qu'ils soient couverts ! s'exclama Laurette.
— C'est pas vrai.
— Attends qu'il
arrive, lui... fit sa mère sur un ton menaçant. Bon. Vous autres, faites vos
devoirs en attendant que le souper soit prêt.
Un peu avant cinq
heures, Richard rentra à la maison, l'air insouciant, balançant à bout de bras
son sac d'école. Laurette l'attendait de pied ferme.
— Comment ça se
fait que t'arrives si tard? lui demanda-t-elle, sévère.
— J'étais en
retenue.
— Pourquoi?
— Je le sais pas,
j'ai rien fait. La maîtresse était enragée après moi.
— Ce serait pas
parce que tes livres sont pas couverts ?
— Ça se peut,
mais j'ai rien, compris. Elle passe son temps à crier après moi.
— Où ils sont tes
livres ?
— Là, dans mon
sac, dit-il en déposant son sac d'école sur la table. .
Laurette fit un
effort surhumain pour ne pas se fâcher et y parvint difficilement.
— Bon. C'est
correct. Je vais te les couvrir, tes livres. En attendant, tu vas aller te
changer tout de suite et après le souper, je veux te voir couché à sept heures.
Comme ça, demain, tu vas être assez reposé pour écouter quand ta maîtresse te
parle.
Richard s'esquiva
dans sa chambre sans formuler la moindre plainte.
Moins de deux
semaines plus tard, à la récréation des petits du jeudi matin, deux
surveillants aperçurent un
rassemblement
tapageur d'élèves dans un coin de la cour de l'école
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