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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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seule, avait-elle décrété quand sa fille avait abordé le sujet. On
connaît pas ce monde-là.
     
    — Mais m'man, je
vais être avec Gérard, avait vainement protesté Laurette.
     
    — Non. Si ça
devient plus sérieux entre vous deux, on en reparlera plus tard.
     
    Cependant, la
jeune fille avait beaucoup entendu parler de Lucille et de Conrad Morin par
leur fils. Le magasinier de la Dominion Rubber adorait sa mère qu'il lui avait
décrite comme une pianiste très douée que la musique classique et la lecture
enchantaient. Son père, accordeur chez Casavant, à Saint-Hyacinthe, partageait
les goûts de sa femme.
     
    Laurette avait
rapidement compris que la famille Morin, sans être riche, appartenait à une
autre classe sociale que la sienne. Même s'ils n'étaient que locataires, comme
les Brûlé, ils possédaient un gramophone, une radio et, surtout, un piano.
Gérard parlait parfois de Colombe, sa jeune sœur de quatorze ans, à qui sa mère
donnait des cours de piano.
     
    Quelques jours
plus tard, après la fête du Travail, Gérard s'arrêta exceptionnellement un
jeudi soir chez les Brûlé.
     
    — J'ai reçu une
lettre de ma mère aujourd'hui, dit-il aux parents de Laurette. Ma mère et mon
père vont venir
     
    dimanche prochain
à l'oratoire Saint-Joseph pour voir le frère André. Je me demandais si je
pourrais pas amener Laurette pour y aller avec eux. En même temps, ça lui
permettrait de faire leur connaissance.
     
    Honoré avait jeté
un coup d'œil à sa femme avant d'accorder sa permission.
     
    Le samedi
suivant, Laurette s'était mise au lit dès le départ de Gérard, à la fin de la
soirée, mais avait très mal dormi. Elle s'était réveillée de nombreuses fois,
en proie à des cauchemars. Elle n'avait cessé de rêver aux parents de son
amoureux et à ce qui se produirait si elle ne leur plaisait pas. Lorsqu'elle se
leva pour se préparer à assister à la messe dominicale, elle était nerveuse et
irritable. Elle mangea peu au dîner et s'empressa de se préparer avec soin.
     
    — Veux-tu ben
arrêter de t'énerver pour rien ! lui ordonna sa mère pour la seconde fois en
une demi-heure. C'est pas le pape que tu vas voir. C'est du monde comme nous
autres. Puis, oublie pas de mettre ton chapeau. Si vous arrêtez prier quelque
part, tu vas en avoir besoin pour entrer dans l'église.
     
    — Je les connais
pas pantoute, moi, ce monde-là, dit Laurette en se levant encore une fois pour
aller se poster à la fenêtre.
     
    — Inquiète-toi
pas, tu vas les connaître, lui dit son père en levant le nez du journal qu'il
lisait, assis dans sa chaise berçante.
     
    — Et ils te
mangeront pas, compléta sa mère. Après tout, t'as juste à te dire que c'est pas
eux autres que tu fréquentes, mais leur garçon.
     
    Cette dernière
phrase sembla calmer un peu la jeune fille. Quelques minutes plus tard, Gérard
vint sonner à la porte pour lui dire que ses parents étaient arrivés. Lorsque
Laurette sortit sur le palier, elle vit une rutilante Dodge bleu marine 1930
stationnée devant la maison voisine.
     
    — C'est le char
de mon oncle Paul, lui expliqua Gérard. C'est le frère de ma mère. Mon père et
ma mère sont dans le char. Ils nous attendent.
     
    Lorsque le jeune
couple arriva près de la voiture, le passager assis à côté du chauffeur
descendit. L'homme de taille moyenne au visage glabre et passablement ridé
semblait âgé d'une cinquantaine d'années. Quand il souleva son chapeau pour
saluer Laurette, il révéla une chevelure clairsemée.
     
    — Je te présente
mon père, dit Gérard.
     
    Conrad Morin lui
sourit et lui serra la main. Pendant ce temps, Gérard ouvrit la portière
arrière de la Dodge. La femme qui y était assise se contenta d'un mince sourire
avant de se glisser à l'autre extrémité de la banquette pour laisser une place
aux nouveaux arrivants.
     
    — M'man, je vous
présente Laurette, dit Gérard en faisant monter la jeune fille.
     
    — Mademoiselle,
se contenta de dire Lucille Morin sans aucune chaleur.
     
    — Notre
chauffeur, c'est mon oncle Paul, conclut Gérard en prenant place à côté de son
amie, près de la portière.
     
    — Bonjour, dit
l'homme en tournant vers Laurette un visage rond et souriant. C'est moi qui
emmène les clients du frère André aujourd'hui.
     
    Paul Bouchard
démarra doucement et la voiture se dirigea vers la rue Dufresne. Gérard
cherchait quelque chose à dire pour faire diminuer l'impression de gêne

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