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Des rêves plein la tête

Des rêves plein la tête

Titel: Des rêves plein la tête Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel David
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vais attendre d'avoir
assez d'argent. A ce moment-là, j'irai acheter mon linge dans un magasin. Ça me
dérange pas, j'aime ça aller magasiner.
     
    Moïse Reisman dut
sentir que la vente lui échappait, car il se résigna à faire une concession
supplémentaire.
     
    — Combien vous
êtes prête à mettre pour les deux robes et l'ensemble matelot?
     
    — Pas une cenne.
Non, c'est décidé. Je vous achète rien, déclara tout net Laurette.
     
    — Allez, madame.
Faites-moi un prix raisonnable, la supplia presque le petit homme.
     
    — Je sais pas,
moi. Il me semble que neuf piastres, ce serait ben payé pour ces guenilles-là.
     
    — Neuf piastres !
se récria le commerçant. Vous y pensez pas ! Vous voulez me ruiner ? A ce
prix-là, je vous donne presque le linge des enfants. J'ai une famille à faire
vivre, moi aussi, madame !
     
    — C'est pas
grave. Je vous le dis, j'en ai pas besoin.
     
    Reisman s'empara
d'un bout de papier sur lequel il se mit à compiler fiévreusement des chiffres
avec un crayon de plomb qu'il venait de tirer de la poche de poitrine de son
veston.
     
    — Onze piastres,
madame. Je peux vraiment pas faire mieux ! A ce prix-là, j'y perds.
     
    Après avoir
discuté encore une dizaine de minutes, Laurette arracha le marché pour dix
dollars. Moïse Reisman accepta finalement la transaction, presque les larmes
aux yeux.
     
    — J'espère qu'à
ce prix-là, vous me payez comptant?
     
    — Ben non !
s'insurgea Laurette comme s'il venait de dire une inconvenance. J'ai pas autant
d'argent ici dedans.
     
    — À ce moment-là,
ça marche plus pantoute.
     
    — C'est correct.
Vous avez juste à ramasser vos affaires et à vous en aller, dit la jeune femme,
excédée. J'ai pas l'intention de perdre ma journée avec vous. J'ai du lavage à
faire.
     
    L'homme poussa un
soupir exaspéré et sortit un carnet noir de la poche de son veston.
     
    — Et combien vous
pouvez me rembourser chaque semaine ?
     
    — Pas plus que
cinquante cennes, dit Laurette d'une voix décidée. Je suis pas capable de faire
plus.
     
    — Bon. C'est
correct. Je passerai tous les mardis matins me faire payer, lui annonça Reisman
en remettant dans la boîte les vêtements qui n'avaient pas été choisis par sa
cliente.
     
    A son retour du
travail, Gérard fut invité à s'asseoir dans sa chaise berçante pour admirer sa
femme et ses enfants habillés de neuf.
     
    Lorsque Laurette
revint dans la cuisine après avoir retiré sa robe neuve, son mari ne put
s'empêcher de lui dire:
     
    — J'espère que
t'as pas fait de folie. C'est ben beau les noces, mais l'automne s'en vient et
il va falloir acheter de l'huile et du charbon pour chauffer cet hiver.
     
    — Inquiète-toi
pas. Le «Juif» voulait quatorze piastres. J'ai barguigné pendant presque une
heure avec lui. J'ai eu tout ça pour dix piastres.
     
    — T'avais, dix
piastres ? s'étonna Gérard.
     
    — Ben non ! Il va
se contenter de cinquante cennes par semaine.
     
    — En tout cas, je
trouve que c'est ben de l'argent pour des guenilles.
     
    — Disons que ce
sera mon cadeau de fête et le cadeau de fête des enfants.
     
    — Ouais. C'est
correct.
     
    — En plus, ça
nous dérangera pas trop. Je suis capable de lui donner cinquante cennes par
semaine. Avant l'hiver, tout va être payé et on n'aura pas honte des enfants
quand on va les sortir.
     
    Laurette passa
habilement sous silence que le plus gros de la facture provenait de l'achat de
sa robe.
     
    Le jour du
mariage d'Armand Brûlé, deux semaines plus tard, la famille Morin avait fière
allure quand elle arriva à l'église. Par chance, il faisait un temps superbe en
ce samedi matin et la vingtaine de convives s'était regroupée sur le parvis de
l'église pour attendre l'arrivée de la mariée. Cette dernière fit bientôt son
apparition au bras d'un oncle, qui allait lui servir de témoin.
     
    — On est les
seuls à avoir amené des enfants, murmura Gérard à l'oreille de sa femme. On
aurait ben pu les faire garder par la petite Beaudoin.
     
    — Es-tu malade,
toi ? s'insurgea Laurette. Tu penses tout de même pas que j'ai dépensé tout cet
argent-là pour les habiller pour rien. De toute façon, la mère de Pauline a ben
insisté pour qu'on les amène.
     
    Le mariage
d'Armand et de Pauline donna lieu à une petite réception sans prétention dans
l'appartement de la rue D'Iberville où le couple emménagea dès le dernier
invité parti. Malgré la simplicité des mets et

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