Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
juste, dit Bel-Argent.
    Ils n’avaient plus soif, ni l’un ni l’autre ne parlait plus d’aller au proche cabaret. Brisard étouffait. Son remords lui montait à la gorge. Ces quatre jours passés dans le silence du vaste hôtel désert… de l’hôtel où sûrement il y avait un mort !… ces quatre jours passés en tête à tête avec le fantôme, passés à étouffer les besoins de parler d’heure en heure plus impérieuse, oui, ces quatre jours avaient transformé l’homme. Ce n’était plus la machine à obéir…
    – Il faut que je parle ou je crève ! gronda-t-il. Écoute, tu me trahiras si tu veux. Tant pis, il faut que je parle… Je n’en puis plus !…
    – Eh ! parle donc ! Pourquoi voudrais-je te trahir ? Ton maître est un rude sacripant. Voilà tout ce que je sais. De plus, s’il me voit à Paris, je crois qu’il aura fort envie de me faire pendre. Ce n’est donc pas moi qui irai lui répéter ce que tu as à me dire.
    – Tant pis ! grogna Brisard. Dis-lui, Dis-lui si tu veux. Il faut que je parle. Bon sang ! Je n’aurais jamais cru que c’était si dur à avaler et que ça vous étouffait à ce point. Eh bien, donc, ils sont entrés ensemble. Je les ai vus comme je te vois. Et ils n’avaient pas l’air camarades, non ! Ils sont entrés tous deux, et le comte de Loraydan est sorti tout seul. C’est donc qu’il a tué l’autre. Il l’a tué, que je te dis ! Et moi, je ne peux plus vivre sous le même toit que ce cadavre. J’ai peur ! Oui, j’ai peur, au nom de tous les diables ! Le jour, ça passe encore. Je vais, je viens, je siffle, je bois…
    – Tu bois ? interrompit Bel-Argent, machinalement.
    – Mais la nuit !… Quelles nuits, bon sang de bon sang ! Quelles nuits ! Je l’entends, oui, sur ma foi, il y a eu des moments où j’ai cru entendre le cadavre se lamenter ! Loraydan a tué l’autre, et l’a laissé là. Le cadavre est là ! Et il faut que je le garde, moi ! Ce n’est pas juste. Ce n’est pas à moi de le garder, l’homme mort, puisque ce n’est pas moi qui l’ai tué ! Et voilà le cadavre qui se met à appeler et à frapper comme qui dirait des coups dans une porte, comme s’il m’appelait, moi ! Est-ce juste ? Est-ce moi qui l’ai tué ? Voilà bien pourquoi mon maître ne revient pas, l’animal ! Ah ! le bougre se doute bien que le cadavre l’appellerait pendant la nuit. Pas de danger qu’il vienne ! Il faut que ça soit moi qui reste à écouter le cadavre, et à ne rien dire, et à suer de peur et à claquer des dents !… Voilà. Maintenant, ça va mieux…
    Brisard se tut, soulagé, mais regrettant déjà d’en avoir tant dit, et examinant avec attention Bel-Argent, pour tacher d’établir quel fond il pouvait faire sur sa discrétion.
    Et Bel-Argent, tout à coup :
    – Où est-il ?…
    – Qui ça ?… Loraydan ?…
    – Eh non !… Lui !… Le cadavre !…
    Brisard frissonna. D’un vague geste de la main, il désigna les salles du rez-de-chaussée.
    – Par là, fit-il… je ne sais pas trop où…
    – Allons voir ! dit Bel-Argent.
    – Voir ! sursauta Brisard. Quoi voir ? Tu es fou ? Le cadavre est bien où il est. Laisse donc, va. Et puis, ça ne te regarde pas, dis donc ! Et d’abord, qu’est-ce que tu viens espionner ici, toi ? Dehors ! Et plus vite, encore !
    – Non ! dit Bel-Argent.
    – Non ? Pourquoi dis-tu non ? Puisque je te dis de sortir, tu n’as pas à dire non !
    – Si je sors, ce sera pour crier dans la rue qu’il y a ici un homme mort et que tu l’empêches de s’en aller, vociféra Bel-Argent.
    – Moi ! moi ! râla Brisard dont les cheveux se hérissèrent. Moi ! j’empêche l’homme mort de s’en aller ? Ça n’est pas vrai, d’abord ! Et puis, où veux-tu qu’il aille, dis ?…
    – Mais… où il doit être… au cimetière ou au charnier…
    Brisard essuya la sueur qui ruisselait sur ses joues. Il tremblait. Bel-Argent n’était point si ému. Des cadavres ? Il en avait assez vu dans sa vie.
    – Alors, reprit Brisard, tu dirais cela dans la rue ?
    – C’est sûr. Ce que tu dois faire, c’est d’ouvrir à l’homme mort, et de le laisser s’en aller si ça lui plaît… Il faut que tu n’aies ni cœur ni âme pour retenir un mort qui ne veut pas rester ici et qui veut tout bonnement rejoindre son gîte au cimetière.
    – Bon sang de bon sang !…
    – Au moins, quand il sera parti, tu pourras dormir tranquille.
    Ce

Weitere Kostenlose Bücher