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Don Juan

Don Juan

Titel: Don Juan Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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croyait énoncer une péremptoire vérité.
    Il l’énonça avec fermeté. Et il ajouta pour se soulager :
    – Bon sang de bon sang !
    Loraydan, avec une sorte de calme, répéta sa question. Brisard avoua ensuite à Bel-Argent que ce calme était si terrible qu’il crut sa dernière heure venue, et que, tout en répondant, il adressa une fervente prière à deux ou trois saints de ses amis pour leur recommander son âme.
    – Je veux dire, murmurait Loraydan, je veux dire : comment a-t-il pu s’en aller puisque tout était fermé ? Qui lui a ouvert ?
    – Qui ? Des truands, monsieur. Que sont-ils venus faire ici ? Le diable le sait. Mais ils disaient qu’ils connaissaient bien la salle au trésor. Quel trésor ? Bon sang !
    – Oui, oui. Je sais ce qu’ils ont voulu dire. Continue.
    – Eh bien, ils ont ouvert les portes. Et l’homme mort est sorti. Je l’ai vu sortir.
    – Combien étaient-ils ?
    – Quinze ou vingt. J’ai oublié de les compter. Plutôt vingt que quinze. Des diables !
    – Tu n’as pas essayé de défendre l’hôtel ?
    Brisard défit rapidement son pourpoint et montra sa poitrine nue.
    C’était un chef-d’œuvre : au travers de cette poitrine, une longue estafilade s’allongeait, d’un rose vif ; une éraflure de poignard ou d’épée. La blessure était réelle. Elle était héroïque : elle était l’œuvre de Brisard lui-même… un chef-d’œuvre.
    – Voilà ce qu’ils m’ont fait, dit-il. Et ils m’ont lié par les pieds. Et ils m’ont mis un bâillon pour m’empêcher de crier au feu. Je suis payé pour défendre l’hôtel : je l’ai défendu, mais ils étaient quinze ou vingt, mettons vingt, sans compter l’homme mort.
    Loraydan lui tourna le dos et regagna la salle d’honneur, où il trouva le roi buvant, riant, disant mille folies à ses deux compagnons.
    – Sire, dit Loraydan, j’ai fait une ronde pour obéir à l’ordre de Votre Majesté. Mais j’étais bien sûr que nul de mes serviteurs n’oserait…
    – Bon ! s’écria François I er . Eh bien, voici ce que nous avons décidé : Sansac et Essé prétendent que tu connais ce Turquand, et qu’il t’a prêté de l’argent.
    – C’est vrai, sire, Turquand m’a prêté de l’argent, dit Loraydan, d’une voix morne.
    – Tu l’as vu, tu lui as parlé souvent ?
    – Souvent, oui, Majesté.
    Et Loraydan regardait fixement devant lui, et ce qu’il voyait, c’était Clother de Ponthus.
    – Alors, il connaît ta voix, reprit le roi. Voici ce qu’il faudra faire : moi, Essé et Sansac, nous nous tiendrons cachés aux abords de la porte du logis, et tandis que j’invoquerai le divin Cupidon, toi, Loraydan, messager d’amour, tu heurteras à l’huis. Tu te feras reconnaître du bon usurier. Tu invoqueras quelque urgent prétexte à pénétrer en cette demeure bénie qui abrite l’ange de mes rêves. La porte ouverte, nous entrerons tous les quatre, et… or çà, que penses-tu ? où es-tu ? m’écoutes-tu bien ?
    Loraydan tressaillit violemment. Il balbutia :
    – J’écoute, Sire !…
    Oui, il écoutait. Et cette fois, c’était une autre terreur qui faisait irruption en lui. Clother de Ponthus, à son tour, s’effaçait de son esprit. Ainsi, parmi les fantasmes qui viennent assaillir le mourant, un rêve d’horreur succède à un rêve d’épouvante.
    Il entendait. Il écoutait. Et il comprenait que le plan du roi, très simple, était infaillible. Il comprenait que Bérengère était perdue.
    C’était sûr : Turquand lui ouvrirait à lui, Loraydan, sur son premier mot. Rien ne pouvait faire que Turquand n’ouvrit pas au fiancé de Bérengère. Le mécanisme de la porte de fer ne serait donc pas manœuvré. Bérengère ne serait donc pas prévenue d’avoir à fuir, puisque c’était le déclenchement même du mécanisme qui l’informait du danger en agissant sur la clochette d’alarme. Et les défenseurs étaient absents du logis… de la forteresse ! puisque les huit valets étaient assemblés à l’hôtel Loraydan !… Ah ! misérable imprudence du chef de la forteresse !
    Toute l’admirable organisation de défense imaginée par Turquand était réduite à néant.
    – Et c’est moi qui ferai ouvrir la porte ! Et c’est moi qui livrerai Bérengère à ce larron d’honneur ! Moi, Loraydan, moi, dis-je, moi, messager d’amour, comme il dit, messager d’infamie, messager de honte et de désespoir venu au nom du divin

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