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Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie

Titel: Douze ans de séjour dans la Haute-Éthiopie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Arnauld d'Abbadie
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du mur de l'église; pendant les offices même, elles circulent impunément dans l'intérieur, et personne n'oserait les molester, soit dans le cimetière, soit même au dehors. Les quatre faces externes du sanctuaire et le mur de l'enceinte qui court autour sont couverts du haut en bas de peintures à la colle représentant des sujets historiques ou religieux. Ces peintures, vives de couleurs, sont d'un dessin très-incorrect et primitif; les règles de la perspective y sont inconnues, et leur caractère rappelle un peu celui des peintures chinoises. Autour de l'église court un terrain enclos d'un mur et toujours planté de grands arbres dont la plupart sont des cèdres; c'est le cimetière. Un bâtiment à part, derrière l'église, sert de sacristie. On entre dans le cimetière par un porche quadrangulaire, bâti comme les murs de l'église, en pierre brute et bousillage. Au-dessus du porche se trouve ordinairement une chambre qui, lorsque l'église possède une cloche, soutient un beffroi, de façon à ce que la corde de la cloche descende sous le porche à hauteur de la main; à défaut de cet instrument on se sert de phonolithe, d'un sémantron ou de pièces de bois sonores. Lorsque les ecclésiastiques chantent les offices, ils se groupent en face de la porte principale du sanctuaire dans l'enceinte qui le contourne; le reste de cette enceinte est laissée aux fidèles. Comme on ne prononce pas de sermons, il n'y a pas de chaire. Pendant la messe, les portes du sanctuaire sont tantôt ouvertes, tantôt fermées, selon le rite éthiopien, mais un voile empêche de voir l'autel; le prêtre officiant et ceux qui le servent ont seuls le droit d'y entrer; ils se présentent sur le seuil pour la lecture de l'évangile, comme aussi pour donner la communion, et ils se retirent à chaque fois derrière le voile. Ceux qui ne sont point nets, d'après les règles mosaïques du pur et de l'impur, n'ont point le droit de pénétrer dans cette enceinte qu'on regarde comme l'enceinte d'Israël; ils doivent s'arrêter dans le péridrome, espèce d'enceinte des Gentils, ou bien dans le cimetière. Ceux qui sont nets depuis sept jours vont d'abord à la porte principale du sanctuaire, et ils en baisent le seuil, ou un des montants, avant et après leurs prières; les gens dévots font le tour du sanctuaire en stationnant à chacune de ses quatre faces et baisant successivement les quatre portes. En Amarigna et en Tegrigna, on ne dit pas visiter les églises, mais baiser les églises. On ne s'agenouille que durant la semaine sainte; les prières se font debout ou assis par terre; il n'y a aucune espèce de siége; ça et là se trouvent des béquilles isolées dont on se sert comme d'appui lorsqu'on est fatigué de rester debout. Ceux qui veulent prier sans être dérangés, ou lire leurs prières, s'adossent ordinairement aux arbres du cimetière ou s'asseyent sur l'herbe entre les tombes. Par un reste d'obéissance à la loi du Lévitique, ceux qui peuvent posséder deux toges, en réservent une spécialement pour se présenter à l'église. Des sistres et des tambours à main sont les seuls instruments dont il soit fait usage pour accompagner les chants religieux.
    Dans la plupart des églises, il est défendu de se présenter avec une arme à feu, un bouclier ou une javeline: on les laisse à l'entrée du porche; dans quelques-unes, il est même défendu d'entrer le sabre au côté, et, comme le fourreau est retenu aux flancs par plusieurs tours de ceinture, il est d'usage de dégainer et de laisser l'arme sous le porche. C'est sous le porche, qui sert aussi de porterie, que se réfugient les mendiants, les lépreux, les voyageurs ou les étudiants sans asile; c'est là qu'on dépose les étrangers malades ainsi que les enfants abandonnés, qui heureusement sont très-rares dans le pays. Les voyageurs sans asile couchent aussi dans le péridrome de l'église, mais comme la saillie du toit est fort courte et que les colonnes sont assez hautes, ils n'y sont guère plus abrités que s'ils étaient dehors.
    Lorsque l'église jouit du droit d'asile, celui qui veut invoquer ce droit s'empresse, en arrivant sous le porche, de sonner la cloche: il déclare à haute voix et par trois fois son intention de prendre refuge; dès ce moment sa personne est inviolable. Le porche se nomme en amarigna: porte du salut . Si les réfugiés sont nombreux, ils dressent des tentes ou des huttes dans le cimetière. C'est parfois un spectacle

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