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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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de vêtements, le froid me mordait avec une agressivité carnivore. Comment mon cheval parvint à le supporter, je l’ignore.
    Ce fut après la nuit tombée que je vis pour la première fois les lumières du village. Durant une nuit normale, elles nous auraient guidés, tel un phare, mais, dans la tempête de neige, elles n’étaient qu’une vision fugitive, un instant perceptibles et, le suivant, disparues. Les ayant vues une première fois, bien qu’elles se soient ensuite évanouies, je me dirigeai vers elles. Cinq minutes plus tard, je les aperçus de nouveau, cette fois à ma gauche et plus loin. J’éperonnai mon cheval et, à contrecœur, il tourna en direction des lumières. Le vent et la neige fouettaient l’interstice minuscule entre mon chapeau et mon col, d’où mon visage pointait. Il aurait été plus agréable de se faire fouetter les yeux que de supporter ce souffle gelé.
    Il s’écoula encore dix minutes avant que je revoie les lumières du village. Cette fois elles étaient plus proches, mais toujours sur ma gauche, à angle droit par rapport à la direction que nous suivions. Je tentai de faire tourner mon cheval une fois encore, mais il ne bougea pas. Ce n’était pas de l’entêtement de sa part, il était simplement bloqué. Il tenta de hennir, mais le son était étouffé par la neige qui s’était insinuée dans sa bouche et dans ses narines. Je mis pied à terre et constatai que je ne pouvais plus voir les lumières du village. J’étais dans une congère dont le sommet était bien au-dessus de ma tête. Je tentai de creuser la montagne de neige qui me faisait face, extirpant de la neige poignée après poignée et la jetant de côté, mais elle s’accumulait beaucoup, beaucoup plus rapidement que je ne pouvais la disperser. Rapidement, je ne pus bouger ni les jambes ni les mains. À chaque mouvement que je faisais, la neige gelait un peu plus pour former de la glace et resserrait son emprise sur moi. Je n’irais pas plus loin cette nuit-là et, si je ne bougeais pas, je ne pourrais plus jamais aller nulle part. Tout espoir envolé, le froid sembla redoubler d’intensité et je sus que j’allais rapidement succomber.
    Je choisis, pour mes derniers instants, d’orienter mon esprit vers des choses agréables. Des images de mon épouse et de mon fils me vinrent, mais elles furent rapidement supplantées par d’autres relatives à Domnikiia. Par la pensée, je m’envolai vers Moscou pour l’observer. Je m’attardai sur ses grands yeux, ses lèvres, les lobes pâles de ses oreilles. Je l’observai de près, bien qu’elle ne soit pas consciente de ma présence. Je ramenai à mon esprit le gazouillis de sa voix et, même si je ne parvenais pas à distinguer de mots, c’était une parfaite restitution du son de sa voix. Il m’aurait été difficile de trouver pour mourir un état d’esprit procurant davantage de bien-être.
    À travers le sifflement du vent, j’entendis le hurlement d’un loup, qui fut bientôt accompagné par un second. Je priai que le froid me rende insensible avant que les loups me trouvent. Au même instant, je me rappelai un conte populaire selon lequel le voordalak pouvait se transformer en loup. Je modifiai ma prière. Si le froid ne pouvait me sauver, que le hurlement vienne au moins de loups normaux et respectables.
    Je me rappelle avoir été traîné sur un sol enneigé, et avoir entendu des voix criant tout autour de moi. Je me rappelle aussi l’impression de gueules et de dents acérées près de mon visage, l’odeur répugnante de chair à demi digérée s’élevant d’un gosier carnivore, et la sensation curieusement agréable d’une langue sur mon visage.
    Lorsque je m’éveillai, la seule sensation qui se frayait un chemin jusqu’à mon esprit, entre toutes, était celle de chaleur. J’étais enveloppé dans une lourde fourrure et, près de moi, un feu flambait dans un poêle en fonte, réchauffant toute la pièce. Je sentis sur mes lèvres de l’eau-de-vie, qui avait dû y être introduite de force tandis que j’étais inconscient. À côté du feu, respirant fortement, leurs langues pendant sur le côté de leurs gueules, étaient allongés deux énormes chiens. Ils pouvaient fort bien être confondus avec des loups. Leur fourrure était un mélange de gris et de blanc, et leurs yeux gris regardaient dans ma direction avec une curiosité ébahie. L’un des chiens leva un sourcil tout en détournant son regard de moi pour le

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