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Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
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poudre à canon. Lorsqu’ils ont été capturés, ils se sont simplement fait sauter, et avec eux tous ceux qui les entouraient, raconta Pierre. Personne n’a été grièvement blessé. Enfin, personne de notre côté. Les Russes étaient fichus. Mais s’ils ne s’inquiètent même plus de protéger leurs propres vies, comment pouvons-nous lutter contre ça ?
    — Tout cela ne me paraît être que des rumeurs de guerre, intervint Vadim, rationnel et tentant de défendre son pays des accusations. Je les ai entendues sur toutes les campagnes auxquelles j’ai participé. L’ennemi doit devenir plus qu’un ennemi. Il ne suffit pas qu’il s’oppose à vous ; il doit être dans l’erreur aussi. Et si sa cause est injuste, alors ses méthodes doivent l’être tout autant. Comme personne n’aime contredire cela et donner l’impression de soutenir l’ennemi, la rumeur enfle et se répand.
    Les quatre soldats français fixaient Vadim intensément tout en l’écoutant.
    — Ainsi donc, nier les rumeurs revient à soutenir l’ennemi, c’est cela, Claude ? demanda froidement Pierre. Exactement comme tu viens de le faire ?
    Je résistai à l’envie de porter la main à mon épée, mais je me préparai à agir à tout moment. Le suspense se rompit lorsque Pierre se mit à rire, suivi de ses trois camarades, puis de Vadim et moi.
    — Tu as probablement raison, mon ami, poursuivit Pierre. Ce sont des rumeurs et, par définition, elles doivent être exagérées. Ce ne sont probablement que des Cosaques en maraude, s’attaquant à nos hommes.
    — Quoi qu’il en soit, dit Louis, qui pourrait blâmer les Russes d’utiliser une nouvelle arme, s’ils en ont une ? Toute campagne est gagnée en faisant quelques entorses minimes aux règles de la guerre. Il y a probablement eu des hommes pour se plaindre, exactement comme nous, aux premières utilisations des mousquets, ou même des arcs anglais – et maintenant, nous ne pourrions pas nous en passer.
    — Je vais rester fidèle à mon mousquet, Louis, dit Stéphane en riant. Et tu pourras avoir ton arc.
    Je restai silencieux tout au long de cette discussion, sachant qu’il y avait une part de vérité derrière ces rumeurs françaises et constatant une effrayante similitude avec les histoires que j’avais entendues de Toula. Les Opritchniki avaient navigué sur le Don et des rumeurs y étaient nées, maintenant que les Opritchniki étaient ici, les mêmes rumeurs les suivaient. Vers la fin de la conversation, toutefois, je commençai à me sentir plus rassuré. Je savais que nous n’avions affaire ni à la peste ni à des loups, mais à des hommes extrêmement habiles, zélés et violents ; des hommes dont les attaques étaient d’autant plus puissantes qu’ils répandaient la peur aussi bien que la mort. Je n’étais pas certain de la manière dont les Opritchniki provoquaient une telle exagération des rumeurs les concernant, mais entendre ces histoires de la bouche même de ces soldats français superstitieux me fit comprendre qu’elles n’étaient rien de plus que des histoires. Les Opritchniki étaient d’excellents soldats et ils étaient de notre côté. Cela, comme venait de le constater Louis lui-même, était une justification suffisante pour que nous tirions parti d’eux.
    Vadim manifesta son intention de partir.
    — Eh bien, bonne nuit, messieurs. Nous devons prendre congé et nous préparer pour la bataille de demain.
    Nous nous levâmes tous les deux, et il y eut un échange généralisé de poignées de mains et d’au-revoir. Alors que nous faisions demi-tour et commencions à nous éloigner, un dernier cri nous parvint des lèvres de Pierre.
    — Jelayou ouspiekha !
    Vadim et moi stoppâmes net. La signification en était assez simple : « Bonne chance ! » Toutefois, ce n’était pas le sens de la phrase qui nous avait surpris, mais sa langue. Pierre avait parlé en russe.

Chapitre 6
    Cela m’avait toujours paru intéressant de voir la façon dont le sens transcende la langue. Me remémorant, par exemple, la conversation que nous avions eue avec ces soldats français durant cette nuit-là, je savais qu’elle s’était tenue en français mais, si je devais la relater, je pourrais le faire tout aussi bien en français qu’en russe, ou même en italien. Je me souvenais du sens de ce qui avait été dit plutôt que du détail des mots.
    Une fois, lorsque j’étais à Pétersbourg, j’avais eu une longue conversation avec un vieux

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