Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen

Douze

Titel: Douze Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jasper Kent
Vom Netzwerk:
soldat. Il avait reçu une blessure à la tête en combattant les Turcs durant le règne de la Tsarine Catherine, sous les ordres du général Souvarov. Un grand morceau de son cerveau avait disparu. Cela affectait sa capacité à bouger et à parler mais, au-delà de ce carcan handicapant, son esprit était aussi affûté qu’autrefois. La communication était difficile, bien qu’elle devienne plus simple avec un peu de pratique. Lorsqu’il parlait, je devais écouter attentivement les sons malformés qu’il produisait. Lorsqu’il constatait qu’il ne parvenait pas à s’exprimer, je devais deviner ce qu’il voulait dire et lui faire des suggestions jusqu’à ce que nous en trouvions une qui le satisfaisait.
    Et pourtant, lorsque je parlais ensuite de lui à Marfa, je pouvais me rappeler le moindre détail de sa vie fascinante comme s’il me l’avait racontée dans un russe impeccable. Bien que je me souvienne des difficultés que nous avions eues à communiquer, ce souvenir était engrangé séparément, dans mon esprit, du contenu effectif de notre échange.
    Ainsi, lorsque Pierre nous salua par son souhait de « bonne chance », une part de mon esprit réagit à son sens amical. Une autre part me hurla un avertissement : la phrase avait été prononcée en russe, une langue que je n’étais pas censé comprendre ! Il y eut une course entre ces deux réflexions pour déterminer celle en fonction de laquelle j’allais réagir en premier lieu. Au final, le vainqueur n’eut pas d’importance. Vadim pris la parole avant que je puisse réagir de quelque manière que ce soit.
    — Pardon ? dit-il en se retournant vers Pierre et en s’en tenant au français.
    Pierre répéta sa phrase puis expliqua en français.
    — C’est « bonne chance » en russe.
    — Ah, je vois, sourit Vadim. Je pensais bien que cela avait des consonances russes.
    — Vous ne le parlez pas ? demanda Pierre.
    — Pas le moindre mot, dit Vadim tandis que je secouais la tête.
    — Pierre ici présent le parle comme un local, indiqua Stéphane. Il devrait être espion. (Il marqua une pause et réfléchit un moment.) À moins, bien sûr, qu’il ne le soit déjà. Il pourrait être en train de nous espionner pour leur compte.
    Louis et Guillaume rirent tous les deux.
    — Continue, Pierre, dit Louis. Fais-nous quelques démonstrations de plus.
    Pierre débita quelques phrases avec un accent passable. Elles étaient manifestement destinées à piéger tout Russe honnête capable de les comprendre.
    La première était « Ta femme est une pute et hier elle a baisé mon chien », suivie de « Le Tsar Alexandre I er aime sucer la bite du général Koutouzov ». Enfin il raconta une histoire souvent relatée mais entièrement fausse au sujet de la mort de la Tsarine Catherine. Si j’avais failli tomber dans le piège de son « bonne chance » surprise, il était relativement simple maintenant pour Vadim et moi de feindre de ne pas comprendre un mot de ce qu’il disait. Pour de nombreux officiers supérieurs de la génération précédant la nôtre, peu d’affectation aurait été nécessaire. Pendant un siècle, le français avait été la langue des Russes cultivés. Le russe était la langue des serfs. Dans la plupart des nations, les espions sont choisis parmi les hommes qui parlent couramment une langue étrangère, des hommes tels que Pierre. En Russie, les espions étaient des hommes tels que Vadim, Dimitri, Max et moi-même qui, de façon assez inhabituelle, étions capables de communiquer avec notre propre population. Désormais toutefois, en grande partie du fait de l’ennemi commun que tous les Russes voyaient en Bonaparte, les choses étaient en train de changer.
    — Qu’est-ce que tout cela veut dire, Pierre ? demanda Louis.
    Pierre traduisit et nous rîmes tous, particulièrement de l’histoire de Catherine et du cheval.
    Nous fîmes nos adieux une nouvelle fois et nous frayâmes un chemin en dehors du camp, pas convaincus qu’ils nous fassent confiance mais résistant à la tentation de nous mettre à courir. Nous étions presque hors de vue du groupe assis autour du feu quand nous vîmes, devant nous, trois officiers français sur le point d’entrer dans le camp. Je me préparais à les saluer avec nonchalance lorsque nous les croiserions mais, à mesure qu’ils s’approchaient, leurs trois visages devinrent reconnaissables.
    Il s’agissait de Iouda, Foma et Matfeï.
    — Alexeï Ivanovitch ! Vadim Fiodorovitch

Weitere Kostenlose Bücher