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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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pu. Il
me l’a arraché. Je l’ai suivi jusqu’à la carrière et je l’ai vu précipiter le
bébé sur les rochers. »
    « Alors le charretier est arrivé, Capito le suivait et
lui criait de partir immédiatement. Capito était livide. Comme c’est étrange !
Je me souviens de tout comme si nous y étions encore ! Le charretier a
fait claquer son fouet, le char s’est ébranlé, et la maison s’est éloignée.
Tout était mal arrimé et cahotait. Elena s’est réveillée soudain et a réclamé
son bébé en geignant, trop faible pour crier. Capito nous a suivis du regard,
raide comme un piquet, le teint gris comme de la cendre. La sage-femme est
tombée à genoux et s’est cramponnée aux jambes de Capito en criant : « Pitié,
maître ! » Et juste au moment où nous nous engagions sur la route, un
homme est arrivé en courant à l’angle de la maison, il haletait, puis il s’est
caché sous les arbres, c’était Sextus Roscius. Ce que j’ai vu et entendu en
dernier lieu, c’était la sage-femme, qui était toujours cramponnée à Capito et
qui criait de plus en plus fort « Pitié, maître, pitié ! » »
    Tout tremblant, Félix reprit son souffle et tourna son
visage vers le mur. Il posa la main sur l’épaule de Chrestus et continua le
récit.
    — Quel voyage nous avons fait ! Trois jours, non,
quatre, dans un char à bœufs secoué par les cahots. Assez pour vous briser les
os et vous décrocher la mâchoire. Nous avons été à pied le plus souvent
possible, mais l’un de nous devait rester dans le char avec Elena. Elle ne
pouvait rien avaler. Elle ne dormait pas, mais elle n’était pas éveillée non plus.
Au moins nous n’avons pas eu à lui dire ce qui était arrivé au bébé. Le
troisième jour elle a commencé à avoir une hémorragie. Le charretier n’a pas
voulu s’arrêter avant le coucher du soleil. Nous avons trouvé une sage-femme
qui a pu arrêter l’hémorragie, mais Elena était brûlante de fièvre. Le
lendemain, elle est morte dans nos bras au moment où nous commencions à
apercevoir la porte Fontinale.
    La lampe crépita puis s’éteignit, la pièce fut plongée dans
l’obscurité. Félix se pencha, prit la lampe, la posa sur un banc dans un coin
de la pièce, puis versa de l’huile. Quand la lampe se ralluma, je vis Tiron
dévisager les deux esclaves, les yeux écarquillés et embués de larmes.
    — Alors c’est Capito qui a tué l’enfant ?
demandai-je sans conviction, comme un acteur qui se trompe de réplique.
    Félix était debout, les doigts croisés. Il les serrait
tellement que les jointures étaient blanches. Chrestus me regarda en clignant
des yeux, comme s’il s’éveillait après un cauchemar.
    — Capito ? dit-il calmement. Je suppose que c’est
lui. Je te l’ai dit, Magnus et Glaucia étaient à Rome. Qui d’autre aurait pu le
tuer ?

11
    Chrysogonus habitait une vaste demeure. Comme nous n’avions
plus Aufilia pour nous guider, nous nous égarâmes, Tiron et moi. Nous étions
partis à la recherche de l’escalier des esclaves. Soudain s’ouvrit devant nous
une étroite galerie qui débouchait sur un balcon d’où l’on pouvait apercevoir
notre cachette à proximité des cyprès.
    Dans la maison quelqu’un chantait d’une voix qui paraissait
particulièrement haute pour un homme, à moins que ce ne fût une femme dont le
registre était plutôt grave. Nous nous rapprochâmes. Le son semblait venir de l’autre
côté d’un mur orné d’une tapisserie qui représentait un Priape obscène entouré
de nymphes voluptueuses. Je plaçai mon oreille tout contre et pus distinguer
quelques mots.
    — Chut ! Tiron, lui murmurai-je en lui faisant
signe de m’aider à soulever le bas de la tapisserie et à la rouler à
mi-hauteur.
    Alors apparut une ouverture horizontale. Elle était suffisamment
large pour nous permettre de nous tenir côte à côte et de voir Chrysogonus et
ses invités. Il les recevait dans une salle au sol de marbre, dont les murs s’élevaient
jusqu’au toit en forme de dôme. Rien ne venait obstruer notre vue. Notre petite
fenêtre était une sorte de judas.
    Comme tout le reste dans la maison de Chrysogonus, le festin
était somptueux. Autour d’un espace vide, au centre de la pièce, étaient
disposées quatre tables basses. Chacune était entourée de neuf lits placés en
demi-cercle. Cicéron ou même Cæcilia Metella aurait hésité à recevoir plus de
huit convives à la fois, car chez les

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