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Du sang sur Rome

Du sang sur Rome

Titel: Du sang sur Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Steven Saylor
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sourire suggestif, Chrysogonus regarda longuement
les deux jeunes gens, puis se retira et referma la porte.
    Personne ne bougea. Enfin la jeune fille se baissa et
ramassa sa robe. Tiron l’aida à se rhabiller. Rufus regarda ailleurs.
    — Eh bien, dis-je, le maître de maison nous a donné la
permission d’aller fureter au premier. Allons-y.

10
    La jeune fille nous conduisit à une porte au bout du
couloir. Elle donnait sur un escalier en colimaçon.
    — C’est l’escalier qu’empruntent les esclaves, murmura-t-elle.
Si nous croisons des gens, faites semblant de ne pas les voir, même s’ils nous
regardent d’un air bizarre. Ou mieux encore, pincez-moi fort pour me faire
crier, comme si vous étiez tous ivres. Ils imagineront les pires choses, mais
ils nous laisseront tranquilles.
    Nous ne rencontrâmes personne et le couloir au premier étage
était désert. D’en bas montait le son des lyres et des flûtes, et l’on
entendait de temps en temps des applaudissements et des éclats de rire. Le
couloir était large et richement décoré, il donnait sur de vastes pièces, hautes
de plafond, somptueusement aménagées. Partout des tapis, des tentures, des
incrustations, des peintures. C’était un véritable feu d’artifice de couleurs,
une profusion inimaginable de matériaux de toutes sortes, de formes variées.
    Chrysogonus était un homme de goût qui avait réuni les
objets et les œuvres d’art les plus raffinés et les plus coûteux qui soient. Il
avait pillé les maisons des proscrits, cela ne faisait aucun doute, sinon il
aurait fallu une vie entière pour entasser tant de merveilles d’origines si
différentes. Son discernement était indiscutable. N’avait-il pas laissé aux
autres les objets sans valeur et ne s’était-il pas réservé ce qu’il y avait de
plus beau ? Il avait l’œil exercé de l’esclave qui a servi un maître
fortuné et rêve d’être libre un jour et de s’enrichir à son tour.
    Le couloir se rétrécit. La jeune fille souleva une lourde
tenture. Quand nous fumes passés dessous, elle la laissa retomber, et l’on n’entendit
plus la musique. Le décor changea, c’était comme si nous étions soudain dans
une autre maison : les murs étaient couverts de plâtre, sans aucun
ornement, et les plafonds noircis par la fumée. C’étaient les pièces à usage
domestique, mais du butin y avait également été entassé.
    La jeune fille se faufila dans ce dédale, regarda
furtivement autour d’elle, puis nous fit signe de la suivre. Elle tira un
rideau.
    Deux hommes assis par terre mangeaient du chou et de l’orge
dans un bol fêlé. Une seule lampe éclairait la petite pièce aux murs nus. Je n’entrai
pas. Tiron s’approcha de moi. Rufus était resté en arrière.
    — Pour ce que vous voulez faire, Aufilia, dit l’esclave
maigre et irascible, il n’y a pas assez d’espace ici. Tu ne peux pas trouver
une pièce vide ailleurs avec un lit assez grand pour vous trois ?
    — Félix ! s’écria son compagnon d’une voix
sifflante.
    Félix leva les yeux et pâlit en remarquant la bague que j’avais
au doigt. Il nous avait pris tous les trois pour des esclaves qui cherchaient
un endroit pour une partie de jambes en l’air.
    — Pardonne-moi, citoyen, murmura-t-il en baissant la
tête.
    Ils gardèrent le silence en attendant que je parle. Quelques
instants auparavant, c’étaient des êtres humains dont le visage rayonnait.
Subitement ils étaient devenus ternes, identiques. Leur visage, qui avait perdu
toute expression, était pareil à celui des esclaves qui, à Rome, servent un
maître cruel.
    — Regardez-moi, leur ordonnai-je, regardez-moi droit
dans les yeux ! Si vous ne voulez pas finir de manger, posez votre bol et
mettez-vous debout. Le temps presse.
    Après leur avoir expliqué qui j’étais et ce que je voulais,
ils consentirent à me parler avec la meilleure volonté du monde. Tiron était à
mes côtés, silencieux et pensif. J’avais posté Rufus à l’entrée de la chambre
voisine, qui donnait sur le couloir principal, afin qu’il fît faire demi-tour à
tout invité qui s’aventurerait dans les parages. Je dis à la jeune fille de
rester avec lui. On comprendrait que c’était à cause d’elle qu’il s’attardait
au premier étage.
    — En un clin d’œil il a sorti son poignard, dit Félix.
    — Oui, en un clin d’œil, répéta Chrestus.
    — Nous n’avons pas eu le temps de venir au secours de
notre maître. Ils nous

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