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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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absence. Elle s’assit avec lassitude dans un faudesteuil devant la
cheminée et se prit la tête entre les mains.
    — Dieu n’a rien à y voir, je peux le dire, murmura-t-elle
en se radoucissant. Il nous a faits de chair et non de pierre. Aimer n’est pas
pécher.
    Elle regardait les flammes qui dévoraient les
bûches, ainsi que le feu nous consumait, et elle frissonna. Il semblait que, en
ces premiers jours de mai, l’hiver ne lâcherait pas ses griffes et qu’il n’y
aurait plus jamais d’été. Elle songea à tous ces pauvres gens que l’humidité et
la froidure avaient fauchés, à son oncle de Bourgogne, mort si soudainement, et
à son oncle de Berry qui s’en remettait petitement.
    Qu’allait-elle faire avec le Camus ? Lui
rendre sa fille grosse de son aumônier ?
    — Ne me rendez pas à mon père, madame, supplia
Nicolette comme elle songeait de même. Il me ferait mettre dans un couvent et
je n’en sortirais plus. Ou, pire, il me jetterait à la rue, en me disant :
« Telle mère, telle fille. »
    « Et tels sont les hommes ! songea
Isabelle. Je ne la rendrai pas à Berry qui ne l’a point reconnue et ne lui a
pas donné son nom, comme cela se fait avec un fils illégitime. »
    — Tu es ma première chambrière, et cela est
un grand honneur rendu à ton sang, car tu es une Fleur de lys, dit-elle à voix
haute. Et je te garde, comme Ozanne la Bâtarde, naguère.
    — Ozanne la Bâtarde ? s’effara Nicolette
en levant les yeux sur elle.
    — Ainsi fus-je nommée par ma marâtre, la
douairière de Brabant. Mon père était puissant, et ma mère, une noble dame
de cour. Aurais-je été garçon, mon enfance aurait sans doute été tout autre. Mais
j’étais fille, il m’a abandonnée aux mauvaisetés de son épouse qui me fit payer
l’infidélité de son mari.
    — Mais vous aviez une mère ?
    — Elle est morte, pour mon malheur, alors qu’elle
me donnait la vie.
    — Le bâtard d’Orléans est plus chanceux, il
va sur ses deux ans, et l’on dit que Valentine Visconti le traite comme ses
fils, dit Nicolette en oubliant ses larmes.
    — Mais le sort en est jeté pour Mariette d’Enghien,
ressassa la reine qui avait grande pitié pour cette dernière. Son époux de
Canny l’a ramenée dans sa seigneurie après ses relevailles, en si grande
souffrance que, aujourd’hui encore, elle porte le deuil de son nourrisson. Et
elle est tenue, paraît-il, enfermée dans un donjon, à ne plus voir personne.
    Nicolette se mit à rougir et osa dire avec
difficulté :
    — Il y aurait bien un moyen, madame la reine.
Votre maîtresse cuisinière Arégonde est dite avorteuse.
    — Jamais ! jeta frère Agreste. Après t’avoir
salie, je ne veux point que tu te damnes.
    — Veux-tu, la morigéna Ozanne, te retrouver
tenue, écartelée sur une table de cuisine, alors que l’on te fouille le ventre
dans le sang et la douleur ? Et tu pourrais en mourir.
    — Ma vie m’importe moins que ma honte.
    — Il n’y a pas de honte ! lança Pierre
aux Bœufs. Nous allons nous enfuir ensemble. Je me défroquerai, je t’épouserai,
et nous aurons notre enfant.
    — Je vous l’interdis, frère Agreste ! s’exclama
la reine. Le scandale serait encore plus grand, et rejaillirait sur ma maison !
Et de quoi pourriez-vous vivre ? de prières et d’amour ?
    Il y eut un silence perplexe.
    — Il y aurait bien un moyen, dit Ozanne de Louvain.
Mais je ne sais si je dois, j’ai promis le secret.
    — Nous saurons le garder, si c’est le prix de
la sauvegarde de Nicolette et de frère aux Bœufs.
    — Alors, que Dieu me pardonne, soupira-t-elle.
Parmi les chevaliers germaniques de Louis le Barbu, il s’en trouve un que
je soigne souvent, surtout quand il a chevauché.
    — Et de quoi souffre-t-il ? s’impatienta
la reine.
    — D’un mauvais coup de lance en son intimité,
lors d’un tournoi, qui a fait de lui un eunuque.
    — Peste ! Je comprends ce secret, dit
frère Agreste. Voulez-vous faire de cet impuissant le père de notre enfant ?
    — Plutôt l’époux de Nicolette.
    — N’y songez même pas, j’aime Pierre et n’en
aimerai d’autre ! protesta celle-ci.
    — Personne ne te demande de l’aimer. Ce
chevalier souffre davantage de ne jamais avoir de descendance et que son nom se
perde. Épouse-le, l’honneur sera sauf de part et d’autre.
    Nicole de Cholet resta un moment silencieuse
aux propos d’Ozanne, puis les larmes lui revinrent :
    — Mais que

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