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Duel de dames

Duel de dames

Titel: Duel de dames Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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contrefaite, menaçant
les dames de leur fausse verge. Ils étaient attachés ensemble à des chaînes qu’ils
secouaient bruyamment comme le font les fantômes.
    Le tohu-bohu était à son comble. Les rires et les
hurlements de terreur le disputaient aux rugissements des sauvages.
    Catherine, qui tenait toujours la main de la reine,
lui glissa à l’oreille :
    — Reculons-nous, Isabelle, ils sont tous si
insensés qu’ils pourraient vous bousculer, et, dans votre état…
    — Tu as raison, allons dans le déambulatoire.
Je ne m’étonne plus de la disparition du roi et de Louis d’Orléans qui font
sans nul doute partie de ce branle.
    Mais, avant de se retirer à l’abri, l’attention d’Isabelle
fut attirée par des lumières vives qui trouaient l’ombre près de l’entrée. Elle
reconnut, entourés de porteurs de torches, le duc de Berry accompagné de
son beau-frère. Ce dernier n’était donc point du charivari. Elle le vit rire, prendre
une torche des mains d’un valet, et s’approcher de la mascarade. Il parla à un
des sauvages, se pencha vers son visage qu’il éclaira de sa torchère. Une
flammèche s’en échappa pour se prendre dans une touffe de poils.
    Louis d’Orléans s’esclaffa et tapota sur la
flammèche pour l’éteindre, mais il retira vivement sa main avec une grimace de
douleur. Il s’était brûlé. Et loin d’étouffer la flamme naissante, il l’avait
éparpillée, le feu se boutait sur le corps du sauvage et, bientôt, sur les
autres enchaînés.
    Sur l’instant, elle ne comprit pas la tragédie qui
s’annonçait, elle voyait, incrédule, les flammes grandir et se propager avec
vélocité.
    Puis, tout alla très vite, les protagonistes de la
mascarade furent bientôt tous en feu et se mirent à se contorsionner d’affreuse
façon, se tapant sur tout le corps ou se roulant par terre en hurlant de
douleur. Ils ne faisaient qu’activer les flammes ou se calciner les doigts. L’horreur
et la panique gagnèrent l’assistance.
    Soudain, un petit homme maigre, tout de noir vêtu,
si gesticulant que l’on pouvait penser qu’il était de la mascarade, se mit à
hurler des imprécations :
    — Vous avez raison de croire à l’enfer, s’égosilla
Pierre de Foissy, chapelain du roi. Brûlez, brûlez, démons ! Dieu
vous a atteint de la foudre de Sa sainte colère !
    Jean la Grâce, qui venait d’arracher la nappe de
la table d’honneur, sans souci des hanaps, gobelets précieux ou mets qui
volèrent et s’éparpillèrent sur le sol, lui donna une violente bourrade au
passage.
    — Rendez-vous utile au lieu de brailler, prédicateur
du Diable.
    — Toi aussi, moine débauché, couina Pierre de Foissy
en reprenant de justesse son équilibre, tu finiras sur un bûcher et je danserai
en te regardant rôtir !
    La Grâce ne l’écoutait plus, il jeta la nappe sur
l’ardent le plus proche et tenta d’étouffer les flammes, mais, ce faisant, on
voyait bien qu’il se brûlait lui-même. D’autres l’imitèrent, arrachèrent les
tentures, certains jetèrent sur eux tout ce qui pouvait contenir de l’eau, mais
rien n’y faisait, les hommes sauvages brûlaient vifs dans une odeur qui
croissait, devenait d’une atroce pestilence. Une voix s’éleva de l’un des
ardents, terrible : « Sauvez le roi ! » Elle reconnut la
voix d’Yvain de Foix. Ainsi, Charles en était bien, et ardait aussi.
    La reine n’en vit et n’en entendit pas plus, elle
s’évanouit. Etzel d’Ortembourg la recueillit dans ses bras et l’emporta loin du
sinistre, en passant par le déambulatoire où fuyaient des courtisans affolés. Le
feu faisait partie des grandes terreurs du temps, un incendie pouvait brûler
des quartiers, voire des bourgs entiers pendant des jours, sans que l’on puisse
rien y faire. Les maisons, collées les unes aux autres, comme l’étaient les
sauvages liés ensemble, étaient faites essentiellement de bois et de torchis, les
flammes se propageaient avec voracité.
    Catherine ouvrait le chemin à son nouvel époux en
bousculant les gens, et criait : « Place, place à la reine ! »
Mais le sauve-qui-peut embouteillait déjà le portail à demi ouvert, et à tous
vouloir passer, personne ne passait plus. Le pan d’Ulysse et des sirènes était
toujours fermé, et la sortie était comme un goulet d’étranglement. La porte ne
se rabattant que sur l’intérieur, il aurait fallu faire reculer la foule pour l’ouvrir,
mais les courtisans, dans

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