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Eclose entre les lys

Eclose entre les lys

Titel: Eclose entre les lys Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
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apanages qu’à faire des noces.
    Le Hardi ne voyait dans la précipitation de ce
mariage qu’un prétexte à reculer encore le débarquement. Mais l’idée de grandes
réjouissances d’épousailles princières revigora le roi tout soudain. On y
ferait grandes joutes, il faudra bien alors qu’Isabelle rende l’épée.
    — Que nenni, mon bel oncle, intervint-il
abruptement. Souffrez qu’avant la guerre, nous fassions la fête. Je me conforte
grandement de ce mariage, nous le ferons au printemps. Cela vous va-t-il, monseigneur
de Berry ?
    Ce fut la stupeur au Grand Conseil. On avait
rarement vu Charles trancher aussi nettement contre l’avis de son oncle de Bourgogne.
Le Camus se rassit en remerciant avec satisfaction. Le Hardi ravala sa fureur. Louis
d’Orléans alors se leva. Charles, pour la première fois, avait désiré la
présence du prince de France au Conseil. C’était dorénavant reconnaître un
honneur dû à son sang.
    — Messeigneurs, je souhaite faire requête
devant cette noble assemblée. Puisqu’il est question de mariage, parlons du
mien.
    Une rumeur s’éleva dans la salle. Le frère du roi
allait-il exiger réparation contre Sigismond de Bohême pour lui avoir volé sa
fiancée de Hongrie ?
    — Je désire au plus tôt faire même demande de
dispense en Avignon au pape Clément VII pour épouser ma cousine, Valentine
Visconti de Milan.
    Louis avait énoncé cette demande d’une voix claire
et posée, sans plus les éraillements de la mue. C’était celle d’un homme encore
jeune, mais qui entendait à présent mener sa vie à sa guise. La rumeur monta, s’enfla
en tumulte. Bourgogne se leva, ne voulant pas laisser échapper une seconde fois
le poids de son influence :
    — Très cher neveu, vous me voyez ravi d’une
si heureuse perspective. Mais que sait-on des dispositions de notre beau-frère
Jean Galéas ?
    — Les meilleures, à ce qu’en dit messire
Pierre de Craon, seigneur de Sablé.
    Des protestations violentes éclatèrent. Chacun
avait eu connaissance du retour à Paris de ce Breton félon. Le duc
de Berry se leva à son tour et calma l’assistance :
    — Je crois ici me faire la voix de l’indignation
générale. Il n’est rien qui ne puisse se décider sur la foi de ce mécréant qui
doit être banni à jamais du royaume de France.
    Le jeune Orléans ne se démonta pas :
    — Très honoré oncle, le sire de Craon a
fait pourtant bonne ambassade, et a négocié avec le seigneur de Milan un
contrat de mariage où Jean Galéas Visconti consent une dot de quatre cent
cinquante mille florins à sa fille, la seigneurie de Milan et le comté d’Asti.
    Il y eut un murmure d’ébahissement.
    — Qu’importe l’énormité de la dot, tout le
monde sait qu’elle ne sera jamais payée, s’emporta le Camus.
    — Quant à la seigneurie de Milan, surenchérit
le Hardi, pour une fois d’accord avec son aîné, Jean Galéas, veuf de notre
très chère sœur, vient d’épouser une oiselle qui pourrait bien lui donner un
héritier mâle, dépossédant sa fille unique de son héritage.
    — Par messire de Craon toujours, continua
Orléans, négligeant l’intervention de ses oncles, le duc m’a fait tenir une
miniature de la princesse de Visconti. Elle est si gracieuse personne que grand
amour irrémédiable m’est entré dans le cœur.
    Il s’était retourné vers le roi, certain de
trouver son appui. Le seigneur de Sablé lui avait conseillé : « Dis
que tu l’aimes, et le roi ne saura rien te refuser. »
    Le silence se fit, chacun attendait la réponse de
Charles VI. Celui-ci songeait à Isabelle et à la passion désespérée qu’il
lui vouait. Il ne douta pas un instant qu’il en était de même pour Louis envers
Valentine.
    — Nous diligenterons ce jour d’hui un
courrier en Avignon afin d’y solliciter cette dispense pour le contentement de
notre très aimé frère d’Orléans. Et pour service rendu, nous accordons notre
royal pardon au seigneur Pierre de Craon et son retour en cour.
    Le roi se leva.
    — Sixte va bientôt sonner. Tout est dit ! Levons
la séance, j’ai grand-faim.
    *
    Le repas fut morose. Ni vin, ni jongleurs et ménestrels
ne réussirent à égayer les convives. La reine n’avait pas paru. Le roi se
taisait. Les oncles se boudaient. Les convives se quittèrent pour le repos. Chacun
l’emploierait comme il l’entendait, en sieste, enjeux de table, ou en promenade
dans les jardins. Le temps était beau.

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