Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Eclose entre les lys

Eclose entre les lys

Titel: Eclose entre les lys Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
Vom Netzwerk:
Mézières.
    — Il est de plus en plus embarrassant de
tenir votre époux hors des menées des jeunes conjurés qui n’y mettent point
suffisamment de prudence. Il faut l’occuper, madame. Et seul l’amour peut le
distraire de l’éclipse de la plupart de ses Plaisants Cousins, dont il s’est
déjà étonné à maintes reprises.
    L’amour ? Certes, Isabelle s’était surprise à
aimer le roi. Non comme le sire de Graville, mais de cette tendresse qui
naît au contact de la vulnérabilité. La robustesse de Charles VI cachait
une sensibilité, une soif d’amour jamais épanchée. Il voulait qu’on l’aime, il
avait besoin d’amour autant que d’air pour respirer. Isabelle se tenait à ses
devoirs et se montrait avec lui complaisante et attentive. Mais elle ne se
sentait pas le cœur d’en donner davantage.
    Ses yeux croisèrent alors ceux d’Ozanne dans le
miroir de la damoiselle à atourner ; celle-ci se tenait derrière elle, achevant
d’envelopper sa lourde tresse dans une résille d’or. La reine ne fut pas
surprise de la voir fuir prestement son regard en rougissant comme une pivoine.
En maintes occasions, elle avait déjà vu la jeune femme devenir écarlate à
propos du jeune souverain.
    La princesse de Bavière eut un imperceptible
sourire : son époux voulait de l’amour, elle savait qui l’aimait.
    — Nous y pourvoirons, soyez-en sûr, assura-t-elle
malicieusement, nous y pourvoirons, monsieur de Mézières.
    Le précepteur n’en douta pas, et c’est enfin
satisfait qu’il se leva de son escabeau et prit congé de la reine.
     
    Restée seule avec sa dame d’honneur, Isabelle lui
dit doucement :
    — As-tu entendu ? Le roi aurait grand
besoin d’affection pour le distraire.
    — Certes, balbutia Ozanne dont le visage s’enflammait
à nouveau.
    Ne doutant plus de ce qu’elle soupçonnait depuis
longtemps, la reine murmura avec douceur :
    — Ozanne, tu aimes le roi, n’est-ce pas ?
    La demoiselle de Louvain s’écarta brusquement,
comme piquée par un aiguillon. Elle lui tourna le dos et cacha son visage dans
ses mains.
    — J’en ai si grande honte, gémit-elle, sans
chercher à dissimuler.
    Surprise de l’avoir tant bouleversée, la reine se
leva et la prit dans ses bras.
    — Pardonne ma brutalité, douce amie. Mais
aimer n’est pas un crime.
    — Aimer le roi en est un, et il est ton époux.
Chasse-moi, Isabelle, c’est tout ce qu’il convient de faire, chasse-moi, s’exclama-t-elle
en fondant en larmes.
    — Jamais, Ozanne, jamais ! Je ne saurai
me passer de toi, je t’aime et il me plaît que tu aimes le roi.
    Émue par la détresse de sa dame d’honneur, la
princesse de Bavière ne savait comment la réconforter. Elle l’entraîna
vers le banc abandonné par Mézières, et la força à s’asseoir près d’elle. Elle
lui tint les mains et l’assura longuement de son affection.
    Enfin, la demoiselle de Louvain se rasséréna.
    — Oui, j’aime le roi, humblement, respectueusement,
et de loin.
    — Non, pas de loin, répliqua tendrement
Isabelle. Je désire au contraire que tu t’en rapproches. Le roi se sent seul, Ozanne,
il s’ennuie, et tu connais mon cœur, je ne puis lui donner tout le contentement
qu’il mérite. Charles est affligé de son échec de l’Écluse, je ne sais le
consoler. Il a tant soif d’amour, et tu en es une fontaine intarissable. Aime-le,
Ozanne, aime-le ! Et fasse Dieu qu’il t’aime en retour, j’en serai bien
aise.
    Elle était sincère, elle voulait le bonheur du roi
dont elle trompait gravement la confiance ; et les intrigues qui se
faisaient à son insu l’isolaient de ses compagnons de plaisir, le rejetaient
dans une affreuse solitude.
    — Cela ne se peut pourtant pas, et que
fais-tu de toi ? s’inquiéta la dame d’honneur qui restait irrésolue, inquiète.
    La reine l’embrassa avec un soudain sentiment de
tristesse.
    — Douce Ozanne, je sais que nous saurons nous
en accommoder, et nous garder loyale amitié.
     
    C’est sur ce curieux arrangement que la reine s’empressa
de retrouver le roi qui devait l’attendre dans son petit retrait depuis un
moment. Elle venait tout juste de le rejoindre lorsque Angésine de Grosparty
annonça le duc de Bourgogne. Charles se résigna à le recevoir de mauvaise
grâce : d’humeur chagrine, il ne désirait qu’être seul avec son épouse.
    Le Hardi fit son entrée, apportant l’aigreur de la
froidure hivernale, déplaçant l’air de sa

Weitere Kostenlose Bücher