Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Eclose entre les lys

Eclose entre les lys

Titel: Eclose entre les lys Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
Vom Netzwerk:
votre sollicitude, mon
beau neveu. Je suis encore bien faible, mais la crise est passée.
    — Il ne faudrait pas qu’elle revienne. On
vous a dit au plus mal cette nuit.
    — Je vais mieux, je vous l’assure.
    La douairière n’était pas dupe des égards de l’époux
de sa nièce. Elle était sur le qui-vive. Depuis que la veine avait été rompue
et avait longuement coulé, sa jambe avait dégonflé, la douleur s’était apaisée,
mais la plaie suintait toujours. Elle suinterait toujours désormais par le
maléfique pouvoir de Thadée Visconti.
    — Que vous amène, Philippe ?
    — Le souci que me fait votre santé.
    — Allez tranquille, je ne suis pas encore
morte.
    — Grâce à Dieu ! Mais cet avertissement
devrait vous pousser à mettre vos affaires en ordre.
    — Passez outre, beau neveu ! Je sais ce
que j’ai à faire.
    Le duc se cala plus confortablement dans les
coussins de la banquette. Il joignit le bout de ses doigts, et y posa ses
lèvres, en signe de grande réflexion. Il prit un air matois.
    — Ma très aimée et très respectée épouse est
votre héritière naturelle et de droit. Ne croyez-vous pas qu’il est temps de
tester ?
    La dame de Brabant savait qu’il allait en arriver
là. La Flandre ne suffisait pas au Hardi, il lui fallait aussi son duché, il
lui fallait tous les Pays-Bas. Mais la duchesse voulait garder son Brabant pour
son amant. Elle temporisa toutefois, inquiète de l’étrange calme du duc.
    — J’y songe, Philippe, j’y songe. Que le
temps vous presse !
    — Vous connaissez ma devise ? « Il
me tarde ! » (Il se pencha vers elle et baissa la voix.) Voyez comme
je suis impatient : j’ai fait tuer ce ribaud de comte de Flandre tant
il tardait à mourir. Il y avait trop de haine accumulée contre lui et l’armée
du roi n’y suffisait plus à maintenir la couronne comtale sur le front de mon
beau-père. La riche Flandre commençait à nous coûter trop cher.
    — Vous en parlez bien à l’aise, Philippe, siffla
la douairière d’une voix blanche.
    Elle avait le souffle coupé tant l’aveu délibéré
de ce crime la prenait de court. La peur se mit à l’étreindre tandis qu’il lui
souriait d’un air narquois.
    — Nous sommes entre nous, belle tante, et
vous avez su si bien me le faire entendre. Je sais que vous tenez les preuves
que j’ai fait occire Louis de Maele…
    — Par votre sbire de Bois-Bourdon, le
coupa-t-elle, menaçante, tentant par cette précision à reprendre l’avantage.
    — … Comme je sais que vous avez fait envoûter
le roi par votre sorcière de Louvain, continua-t-il tranquillement.
    La dame de Brabant se redressa sur ses oreillers.
    — C’est un mensonge, sur ma foi !
    — Elle ne doit pas être si forte, votre foi !
lui lança-t-il avec force. Dans l’antichambre attend Ozanne sous la garde du
seigneur de Graville. Dois-je la livrer en toute justice ? Je suis
curieux de savoir ce qu’elle saura nous dire, soumise à la question ?
    La douairière se laissa aller sur les oreillers. Ainsi
donc, Bourdon avait parlé. Philippe savait tout.
    — Votre sorcière est moins habile que mon
sbire, reprit ce dernier. Il a reconnu Ozanne aux étuves, il l’a vue faire
boire une potion au roi. On sait que par son entremise vous avez voulu le
rendre impuissant. Elle a agi par magie… et sur votre ordre !
    Il se dressa de son siège.
    — Et cette nuit, Charles rendu fou par vos
poisons et vos maléfices a violenté la reine de la plus cruelle façon !
    C’étaient autant de coups assenés alors que le ton
du duc montait. Chaque fois, Jeanne semblait s’enfoncer davantage dans ses
oreillers. Penché sur elle, Bourgogne l’acheva en tonnant :
    — Et vous avez laissé la reine impubère se
faire violer !
    Jeanne se sentit anéantie, elle avait perdu son
Brabant, elle avait perdu son amant. Elle savait qu’à présent c’était silence
pour silence. Dénoncer Philippe le Hardi à Marguerite de Bourgogne comme l’assassin
de son père n’avait plus de poids : son crime à elle était encore plus
grand.
    Le duc s’était rassis tranquillement, satisfait de
son éclat, laissant la douairière à ses aigres conclusions. Enfin, il donna l’estocade
avec le sourire.
    — Croyez-moi, belle tante, je suis fort navré
pour votre voisin, le petit duc de Gueldre. Annexer votre Brabant méritait
qu’il sacrifiât à Vénus dans votre couche. Mais reconnaissez qu’il était trop
jeune pour

Weitere Kostenlose Bücher