Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Eclose entre les lys

Eclose entre les lys

Titel: Eclose entre les lys Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Chantal Touzet
Vom Netzwerk:
envoyant valdinguer ses armures de pied.
    — Que ne m’as-tu demandé, voleur d’épervier !
    Les solerets atterrirent contre le pare-feu qui
fermait le foyer vide de la grande cheminée. Ils tintèrent comme cloche
aigrelette, répondant à la voix grave du tocsin.
    Louis se plaqua les mains sur les oreilles.
    — Qu’ont-elles à sonner encore ! cria-t-il
d’une voix éraillée. Capucine, ferme donc les croisées !
    Le nain haussa les épaules sans bouger.
    — Même avec une escabelle, je ne les
atteindrais pas.
    — Tu n’es bon qu’à jacasser comme un geai !
    L’écuyer ferma les fenêtres avant de récupérer les
solerets de son maître. Le fou ricana et se remit à fredonner sa chanson.
    Le cardinal de Laon soupira, il n’y avait
rien à faire pour achever la querelle. Il roula l’acte de fiançailles et l’enfila
dans sa manche. Il s’était trompé, le moment n’était pas bon, le duc d’Orléans
n’était pas prêt à entendre raison. Ses bonnes dispositions envers son frère le
roi venaient d’éclater comme bulles au soleil.
    Alors que l’écuyer achevait de débarrasser Louis
de son armure, le précepteur songeait qu’il allait lui falloir trouver une ruse
pour le convaincre d’accepter de ceindre la couronne de Hongrie. Et pour cela, il
fallait le défaire de la reine. Comme le sire de Graville, il savait qu’il
n’était jamais bon de toucher à l’orgueil d’un prince, et c’est avec cet
orgueil que Pierre Aycelin allait essayer de le manœuvrer.
    L’opération dont il venait d’avoir l’idée était à
menées fort délicates, mais le seigneur de Montaigu était orfèvre en la matière.
Il lui fallait profiter de l’aveugle colère de Louis à l’encontre du chevalier de Bois-Bourdon
pour exacerber plus encore ce ressentiment.
    — Pourquoi vous faites-vous désarmer alors
que sonne l’alarme ? lui demanda-t-il tout à trac.
    Le prince explosa comme il s’y attendait.
    — Pourquoi je me fais désarmer ? Je n’ai
aucune autorité en la place. Ce diable de capitaine a tout pouvoir. Mon titre
de lieutenance n’est que jouet donné à un enfant. Mon frère s’est moqué de moi.
    — Certes, monseigneur, c’est là bien mal
reconnaître vos mérites.
    — C’est le sénéchal du Berry, ce Bois-Bourdon
qui commande.
    Louis, enfin débarrassé de son armure, était à
présent libre de ses mouvements. Capucine, se croyant oublié, chantonnait
toujours « Isabelle, mais qui adonc vous aime… », tout en taquinant
distraitement un scarabée égaré sur le sol. Louis s’approcha de lui
par-derrière sur la pointe de ses chausses et lui décocha un formidable coup de
pied aux fesses qui envoya le nain rouler sur le carreau.
    — Hors de ma vue, nabot de chiennerie !
    Capucine termina sa roulade en acrobaties, fit deux
sauts périlleux arrière, et quitta les lieux en se frottant le bas du dos, chantant
à tue-tête :
     
    Isabelle,
    Mais qui adonc vous
aime ?
    Las ! et que c’est
fâcheux,
    C’est un furiiii…
eueueueux…
     
    Sa voix s’éteignit dans le couloir. Il sembla
alors que toute la colère de Louis l’abandonna. Il s’assit sur un escabeau en
attendant le pourpoint qu’était allé lui quérir son écuyer. Coudes sur les
genoux, mâchoires serrées reposant sur ses poings, il luttait visiblement
contre les larmes.
    Les cloches se turent à nouveau : elles
sonnaient ainsi par intermittence pour appeler la population à la vigilance, et
les plus isolés à se réfugier dans les places fortes les plus proches. Le
silence se fit, pesant.
    Le cardinal de Laon observait Louis, nu jusqu’à
la taille, en chausses de soie et braies moulantes. Les muscles déliés de son
jeune torse commençaient à se faire. Ils avaient des grâces et des douceurs de
fille, mais l’on sentait déjà la force de l’homme. Pierre Aycelin n’y tint plus.
Il lui fallait toucher cette peau. Juste seulement toucher. Depuis la nuit de
la présentation d’Isabelle au roi Charles VI, rien n’avait changé en
apparence entre Louis et son précepteur. Le duc d’Orléans semblait ne jamais y
songer, n’y avait jamais fait allusion. Le cardinal, lui, se renouvelait sans
cesse cette unique caresse, savourant encore, inaltérable, le goût délectable
du prince.
    Laon se leva, déployant l’élégance de sa haute
taille et vint se placer derrière son pupille. Il posa doucement ses deux mains
sur ses épaules, commençant à le masser. Un contact

Weitere Kostenlose Bücher