Enterre Mon Coeur à Wounded Knee: Une Histoire Américaine, 1860-1890
uniformes d’hiver encombrants, tentèrent d’escalader des falaises couvertes de glace. Une neige fine se mit à tomber, qui se transforma en blizzard en début d’après-midi. C’était plus que Manteau-d’Ours pouvait en supporter. Il courut se réfugier avec ses hommes dans la chaleur de Fort Keogh.
Sous une pluie de neige fondue, Crazy Horse et les siens progressèrent péniblement jusqu’à la vallée de la Little Powder, qu’ils connaissaient bien. Ils s’y installèrent en février et subsistèrent grâce au rare gibier qu’ils trouvaient. C’est alors que des messagers vinrent leur annoncer que Spotted Tail et un groupe de Brûlés arrivaient du sud. Certains des Indiens suggérèrent qu’il s’était enfin lassé d’obéir aux ordres qu’on lui donnait sur la réserve et s’était échappé. Mais Crazy Horse ne se faisait pas d’illusions.
Au cours des lunes froides, Crook avait ramené ses hommes à Fort Fetterman pour leur épargner les rigueurs de l’hiver. En attendant le printemps, il rendit visite à Spotted Tail, auquel il promit que, s’il acceptait de servir d’émissaire de paix auprès de Crazy Horse et persuadait ce dernier de se rendre, les Sioux de la réserve ne seraient pas obligés d’aller s’installer dans la vallée du Missouri. Voilà qui expliquait la venue de Spotted Tail au campement oglala.
Juste avant l’arrivée du chef brûlé, Crazy Horse annonça à son père qu’il partait. Il lui demanda d’accueillir Spotted Tail et de lui dire que les Oglalas viendraient à l’agence dès que les conditions météorologiques permettraient aux femmes et aux enfants de voyager. Puis il gagna les Bighorns, seul. Il ne savait pas s’il allait se rendre ou pas, et envisageait, pendant que son peuple allait vivre sur la réserve, de rester seul dans la vallée de la Powder comme un vieux bison exclu du troupeau.
Lorsque Spotted Tail arriva, il comprit que Crazy Horse l’évitait. Il envoya des messagers à la recherche du chef oglala, mais ce dernier s’était volatilisé dans le paysage neigeux. Avant de retourner dans le Nebraska, Spotted Tail persuada Big Foot de se rendre avec ses Miniconjous, et obtint de Touch-the-Clouds et de trois autres chefs la promesse qu’ils viendraient à l’agence avec leurs bandes au début du printemps.
Le 14 avril, Touch-the-Clouds, accompagné d’un groupe important de Miniconjous et de Sans-Arcs du village de Crazy Horse, arriva à l’agence de Red Cloud pour se rendre. Quelques jours auparavant, Crook avait chargé Red Cloud de trouver Crazy Horse et de lui promettre une réserve dans la vallée de la Powder en échange de sa reddition. Les deux chefs se rencontrèrent le 27 avril. Les neuf cents Oglalas de Crazy Horse mouraient de faim, les guerriers n’avaient plus de munitions, les chevaux étaient efflanqués. La promesse d’une réserve dans la vallée de la Powder River suffit à faire venir Crazy Horse à Fort Robinson et à capituler.
Le dernier des chefs de guerre sioux allait désormais vivre sur une réserve, désarmé, sans monture, sans aucun pouvoir sur son peuple, prisonnier d’une armée qui n’avait jamais réussi à le battre. Pourtant, il demeurait un héros pour les jeunes braves, dont l’adulation éveilla la jalousie des chefs plus âgés. Mais Crazy Horse restait distant, dans l’attente du jour où Crook exécuterait sa promesse et leur donnerait, à lui et à ses fidèles, une réserve dans la vallée de la Powder.
Vers la fin de l’été, Crazy Horse apprit que Crook voulait qu’il participe à un conseil à Washington avec le Grand Père. Il refusa. À quoi bon parler de la nouvelle réserve ? Il avait bien vu ce qui était arrivé aux chefs qui étaient allés dans la maison du Grand Père. La nourriture et le mode de vie des Blancs les avaient engraissés et complètement amollis. Il avait constaté les changements chez Red Cloud et Spotted Tail, qui savaient qu’il savait et lui en voulaient.
En août, la nouvelle arriva que les Nez-Percés, qui occupaient une région au-delà des Shining Mountains, étaient en guerre contre les Tuniques Bleues. Dans les agences, les chefs des soldats commencèrent à enrôler des guerriers en tant qu’éclai-reurs. Crazy Horse eut beau dire aux jeunes braves de ne pas partir se battre contre cette lointaine tribu indienne, certains refusèrent de suivre ses conseils et se laissèrent acheter par les soldats. Le 31 août, le jour où ses
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